Les restos se succèdent, des boutiques de luxe ouvrent leurs portes, les émissions de télé portant sur la cuisine sont plus populaires que jamais, sans parler des réseaux consacrés uniquement à ce sujet 24 heures sur 24. Les ouvrages sur la cuisine sont en haut des listes des best-sellers de tous les libraires et le Festival Montréal en lumière n’est pratiquement rien d’autre qu’une grande kermesse gastronomique annuelle. Bref, le commerce gourmand se porte bien, merci beaucoup!
Voici donc nos coups de coeur pour l’année qui se termine. Une année féconde et annonciatrice d’un futur véritablement gastronomique.
Qu’est-ce qu’un coup de coeur?
Un coup de coeur symbolise une rencontre particulière, un moment privilégié, une coïncidence qui a fait boum! Un rendez-vous avec le sublime peut-être, quelle que soit la définition que nous lui donnons: intense, endiablé, colossal ou inouï. Un coup de coeur n’est pas réfléchi, il est spontané, presque instinctif. C’est une émotion forte. Mais une émotion n’est pas toujours le résultat d’une fièvre, elle peut surgir d’un état de grande paix. C’est ce que nous avons ressenti cette année sur la terrasse du Khyber Pass, une soirée de canicule, entourés de verdure, de tapis afghan et d’un patron truculent. Qui nous parlait de son passé, de son pays qu’il a connu si sophistiqué, aujourd’hui réduit en cendres. Nous sommes des proies faciles quand il s’agit de ces Coups de coeur. Et nous vous les donnons en mille.
Grands restaurants
Ceux-là sont des professionnels du métier. Il n’y a rien d’improvisé ici, sinon un petit sourire ou une explication du chef, parfois une attention particulière, de celles dont on se souvient. Un grand restaurant, c’est un feu d’artifice, une excuse pour célébrer, marquer un moment, honorer une personne et, pourquoi pas, pour flamber un peu, histoire de s’affranchir de la dictature du signe de piasse. Nos héros:
CUBE, Hôtel Saint-Paul, 355, rue McGill – Cuisine de charme, moderne, cadre éclectique.
IL MULINO, 236, rue Saint-Zotique Est – Comme en Italie, très sophistiqué. Cuisine exceptionnelle.
ANISE, 104, avenue Laurier Ouest – Cuisine harmonieuse, différente, dans un décor singulier.
TENTATION, 7076, boulevard Saint-Laurent – Des idées exprimées sans déroger à la rigueur, ni à l’humilité devant le produit. Prestigieux.
Bistros
LEMÉAC, 1045, avenue Laurier Ouest – Un bistro modernisé, une cuisine affranchie de la nostalgie.
EUROPEA, 1227, rue de la Montagne – Généreux et sans colifichets, cuisine méticuleuse.
AU PIED DE COCHON, 536, avenue Duluth Est – Synthèse de tout ce que l’on voudrait trouver dans un bistro: convivialité, charme, cuisine de coeur. Pour amoureux de la viande.
LE MARGAUX, 371, rue Villeneuve Est – Le Sud-Ouest dans tous ses recoins, truculent et généreux.
CHRISTOPHE, 1187, avenue Van Horne – Cuisine bourgeoise, savante et raffinée, sans compromis.
Ethniques
NONYA, 1228, boulevard Saint-Laurent – Indonésien, le seul en ville. Rien que pour ça on aime. Mais en bonus, c’est exquis.
SR.VINHO, 3750, rue Masson – Portugais, simplement: des grillades, de l’ambiance.
RUMI, 5198, rue Hutchison – Un malaxage de cultures orientales, sympa comme tout.
AUX LILAS, 5570, avenue du Parc – Libanais, le meilleur en ville. Tout est dit.
AU CYCLO, 5136, avenue du Parc – Vietnamien, service attentionné et cuisine soignée.
Chefs
MARTIN PICARD (Au pied de cochon): Un chef enthousiaste, la tête remplie de projets et d’idées. Sans parler d’un sacré coup de main avec les viandes.
CHRISTOPHE GEFFREY (Christophe): Il sait mêler tradition et innovation avec une verve et une maîtrise absolues.
STELIO PEROMBELON et RICHARD BASTIEN (Leméac): Ce tandem d’enfer a présidé à la plus belle réussite de l’année en matière de resto convivial. Cuisine tout à fait excellente.
Le Meilleur de la ville
Le meilleur sandwich: le Banh Mi de porc laqué au Cao-Than, 1082A, boulevard Saint-Laurent.
Le meilleur café: au Caffè Italia, 6840, boulevard Saint-Laurent. Velouté, robuste et crémeux, fait par des maîtres dont le tour de main est inimitable.
La meilleure glace: celle au litchi et à la goyave, prise chez Ripples, 3880, boulevard Saint-Laurent.
La meilleure pâtisserie: la queue de homard au mascarpone, jouissive. À la pâtisserie Alati-Caserta, 277, rue Dante.
Notre plat coup de coeur: le foie de veau, plat emblématique des vieux bistros, redécouvert, remis à la mode un peu partout en ville cette année, une concentration de protéines et de mémoires d’enfance.
Le plus courageux
Et enfin, une mention courage pour un resto dont l’histoire récente a été tragique: ouvert en 1999, couronné de succès, Soy, autrefois installé rue Saint-Denis, a été décimé par les flammes en 2000. Les patrons, Manny Cheng et Suzanne Liu, ont pris leur courage à deux mains, et ont rouvert leur remarquable petit troquet au 5258 du boulevard Saint-Laurent, et ce, depuis une semaine seulement. Trop tard malheureusement pour être dans le Guide Restos de cette année. Mais pas trop tard pour le découvrir.