Le décor est coquet, sans prétention: colonnes et embrasures d’un vert franc, chapeaux de paille, peintures, arrangements floraux, masques de bois et divers objets ornant les murs terra cotta vivement éclairés par la lumière du jour. Sur le comptoir dressé au fond de la pièce, à proximité d’une antique Remington, un panier d’osier déborde d’hydrangées séchées. Sur le trottoir, dehors, les rares passants hâtent le pas, frigorifiés. Nous apprécions d’autant plus la chaleur des lieux que les haut-parleurs nous débitent en sourdine du Buena Vista Social Club. Deux miroirs qui se font presque face de part et d’autre de la salle à manger résument en quelques lignes les menus: lasagne végétarienne sur pâtes aux épinards, spaghetti garni végé, pizzas (libanaise, végétarienne ou garnie), feuilleté de la mer, salade de moules fumées… La carte, plus prolixe, fait encore honneur aux premières spécialités de la maison, les sous-marins, à quoi se sont ajoutés au fil du temps les bagels (au jambon fumé, au thon, etc.), les croques les plus variés (aux merguez, au rôti de boeuf maison et emmenthal, à la dinde…). On a aussi le choix des salades, des amuse-gueule, des pâtes et des desserts bien, très bien sucrés. Restauration rapide, certes, mais avec ce petit plus qui nous ramène ici de temps à autre: cordialité du service et fraîcheur des produits, qu’il s’agisse de rouleaux impériaux ou d’un feuilleté aux épinards, sinon d’un pâté au saumon ou à la viande. Le premier service ne se fait pas attendre: un "potage au goût du jour" demandé par ma compagne. Ce… jour-ci a le goût des tomates (qui lui donnent sa couleur d’un rouge soutenu), mais un goût nuancé (donc pas trop acide) par celui des légumes qui constituent la part "solide" de cette soupe chaude et roborative: carottes, haricots verts, oignons et maïs en grains. N’ayant pu me décider pour une entrée, je taquine ma faim à coups de tranches de pain beurrées. Les plats de résistance ne se font pas attendre, eux non plus. La même salade, fraîche et croquante, accompagne chacune des assiettes: laitues, fèves germées, pois chiches, tomates et olives noires. En commandant sans me renseigner une quiche du fumoir, je pensais à du saumon fumé. Il s’agit de jambon – de gros cubes tendres et savoureux répartis dans la pâte moelleuse qu’on a évité de trop saler. Le dessus, saupoudré de fromage, a été gratiné à souhait et forme une croûte mince qui craque sous la dent. C’est l’une des rares fois où je me fais servir une quiche au restaurant (j’ignore pourquoi!), mais je ne le regrette pas. Nous carburons à l’eau pure, mon amie et moi, sous l’effet d’un de ces élans de sobriété qui se manifestent parfois sans raison apparente. Déjà que ma compagne m’a prévenu qu’elle s’abstiendrait de dessert! Pour le moment, elle a déjà sérieusement entamé sa tourtière du Lac-Saint-Jean – une vraie, comme j’ai pu m’en rendre compte: goûteuse, raisonnablement assaisonnée et bien "fournie" sous une croûte presque feuilletée. La viande a gardé tout son suc et vous le distille en bouche. C’est simple et bon. Les autres clients sont déjà partis quand vient pour nous le moment de conclure. Deux cafés, bien sûr. Et, pour moi, une tranche de gâteau aux bananes crémé de blanc et semé de morceaux de noix de Grenoble. Mon vis-à-vis accepte d’en tâter un peu, mais c’est à moi que revient la part du lion. Un lion qui, ce midi, montre plutôt un appétit d’oiseau.
Restaurant Bouche bée
383, rue Saint-Paul
Québec (Québec)
Téléphone: (418) 692-4680
Menu du jour: 6,84 à 7,78 $
Spéciaux à partir de 5,66 $
Table d’hôte: 7,25 à 13,50 $
Dîner pour deux (incluant service et taxes): 21,18 $