Michel Del Burgo, invité au restaurant Nuances du Casino de Montréal
Est-ce vraiment une coïncidence? Del Burgo, dont le père est espagnol (de Catalogne, curieusement), vient pourtant du Nord de la France où il a fait son apprentissage auprès de son père restaurateur, bien qu’il ait depuis migré vers le sud.
Passé chez Taillevant en un coup de vent (trois ans, quand on sait que les chefs précédents y sont restés bien plus longtemps), Del Burgo, formé à l’école des Ducasse, Guérard et Robuchon, vient tout juste d’ouvrir les portes de son propre établissement, La Bastide de Gordes, dans une bourgade popularisée par les romans de Peter Mayle (Une année en Provence). Parions qu’il ne manquera pas de clients. Le contraire serait étonnant, si l’on se fie à la prestation qu’il nous a donnée au restaurant Nuances la semaine dernière. Reçu par le chef Jean-Pierre Curtat, il a donné un aperçu de sa cuisine, d’une époustouflante rigueur, d’une précision minutieuse, loin de tout conformisme mais incontestablement ancrée dans la Côte d’Azur où le soleil fait parfois gonfler les têtes (et les ego). Rien de ça chez Del Brugo qui a non seulement beaucoup de talent mais une personnalité jouissive et rieuse. Quand on goûte de ce foie gras confit "sel et poivre" étendu sur un pain de campagne bien craquant, et qu’on l’accompagne d’une bouchée de compote de poires à la vanille, on sent tout de suite la capacité de renouvellement. La Provence se manifeste par un plat de filet de vivaneau impeccable, poêlé à l’huile d’olive et servi avec des taches de tapenade; ou dans un filet de veau cuit au sautoir et dans un dessert merveilleux aux relents de citron frais. Sage, sans excès d’ornements, voilà une grande cuisine hors du commun qui mérite le recueillement.
Cela dit, nous devons aussi reconnaître au Nuances et à sa brigade un professionnalisme assidu. Même les salles combles – ce qui arrive souvent – ne les prennent pas de court. Le personnel est toujours impeccable, et vous accueille avec un sourire non feint. On comprend qu’ils aient reçu de nombreuses récompenses.
Nuances, au Casino de Montréal
392-2708
BILAN du Festival Montréal en lumière
TEMPS FORTS:
Cette idée de mettre la Catalogne en lumière, un coup de génie qui nous a fait découvrir une cuisine immense, singulière et complètement inattendue. Parlant d’originalité, beaucoup s’y essaient, peu réussissent. Les Catalans que nous avons eu le plaisir de découvrir au Toqué!, chez Alexandre, à l’Hôtel Reine-Élisabeth, à l’ITHQ et à L’Épicier nous ont montré qu’ils avaient eux aussi, effectivement, une culture distincte.
TEMPS FAIBLES:
Un drôle de numéro ce Bob Blummer, mais qui n’aura pas comblé les attentes d’une soirée psychotronique qui s’annonçait singulière mais qui a fait "plouf!".
Un chef japonais invité au restaurant Soto, Morimoto, qui jouit d’une réputation d’enfer aux USA que lui envient plusieurs de ses confrères. Ancien de chez Nobu, affublé d’un costume argenté de cosmonaute à ses passages répétés à l’émission Iron Chef, on attendait de lui une prestance inoubliable. On a découvert l’expression d’un ego démesuré dont la cuisine ne révèle certainement pas l’exubérance. Et celle d’un businessman futé dont les sakés et autres entreprises commerciales jettent un peu d’ombre sur la carrière. Le chef du Soto, Junichi, peut faire de ce genre de cuisine Est-Ouest quand il veut, et probablement mieux!