Restos / Bars

Brunoise : Une étoile est née!

Une carte courte mais réfléchie, une formule simple mais complète, une tarification posée: voilà réunis les ingrédients (en brunoise?) d’une réussite annoncée.

Où ça? Sur le Plateau, à deux pas de la rue Saint-Denis. Brunoise a porté ses pénates rue Saint-André, dans le local du regretté Fandango. On a retouché la décoration, sans faire de folies: sol en ciment, mur chocolat au lait, miroirs, bar sur le côté. Une petite salle, en somme, où les tables sont malgré tout raisonnablement espacées. (On a d’ailleurs eu le courage, eu égard à l’exiguïté des lieux, de décréter que l’établissement était entièrement non fumeur.) Tout ça pour dire qu’on ne s’est pas "coulé" d’avance en misant trop sur le design.

Le plaisir, chez Brunoise, c’est à table qu’on le trouve. La maison, malgré son jeune âge (à peine un mois), fait montre d’une maîtrise et d’une assurance étonnantes. Pas la moindre trace d’improvisation: le resto a beau être nouveau, les artisans, ça saute aux yeux, n’en sont pas à leurs premières armes. On sent la présence d’une brigade qui a du métier et, détail peut-être plus important encore, l’amour du métier.

Simple, la formule? Six entrées, six plats (auxquels s’ajoute un septième annoncé par le serveur), six desserts. Un choix dans chacune des catégories pour un prix fixe. Pas d’approximations ni de raccourcis: les propositions sont sérieuses, alléchantes.

Le potage, on l’offre ce soir en amuse-bouche: un velouté de carottes au goût bien franc, parfumé à l’ail rôti, auquel on a ajouté quelques gouttes d’huile de noix. Une belle idée.

En entrée, du saumon en escabèche (appellation peut-être un peu galvaudée): des morceaux de saumon deux manières posés l’un sur l’autre, les uns rôtis, les autres marinés (d’où l’idée d’escabèche), accompagnés de fenouil braisé, le tout nappé d’une huile d’olive savoureuse. La tarte fine de champignons confits, si elle est joliment présentée, déçoit un peu, peut-être à cause des champignons en lamelles qui, même s’ils sont cuits à la perfection, manquent de goût (ou de sel?).

En plat, on retrouve le saumon, rôti encore, mais cette fois accompagné d’une pipérade (clin d’oeil à la cuisine basque) et, histoire de brouiller les cartes, d’acras de morue posés sur une purée d’herbes. Mélange inattendu, mais séduisant, où le salé de l’acra fait contrepoids à la douceur du saumon.

Même ravissement du côté de la raie poêlée, posée sur un ragoût de tomates où se distinguent des tomates grappes jaunes et rouges, des tranches d’olives vertes bien goûteuses et, surprise! des rondelles de calmar, si fondantes qu’on dirait un nuage. Sur la raie, cuite à la perfection, on a judicieusement empilé des tentacules de calmar passés à friture. Rarement les humbles créatures de la mer que sont la raie et le calmar auront-elles été traitées avec tant de bonheur.

Le serveur, attentif mais discret, comme on les aime, donc, veut savoir s’il nous reste de la place pour le dessert. "Ça vaut la peine", dit-il d’un air entendu. Et comment! Ici non plus, ni facilité ni compromis. Le pavé au chocolat au lait est accompagné d’un biscuit craquant et de sorbet à l’abricot. Dans le genre, on ne fait pas mieux. La palme revient toutefois à la panna cotta servie dans une coupe à sundae, recouverte de fruit de la passion et d’un sirop de basilic! Mélange inattendu et explosif qui conjugue fraîcheur et légèreté, richesse et onctuosité. Une réussite totale.

Trop beau pour être vrai? On le dirait presque. Il y a bien la carte des vins, où on aimerait trouver une ou deux propositions à moins de 35 beaux dollars, surtout que la maison ne sert pas de vin au verre. On vous propose plutôt deux choix de rouge et de blanc en "carafons" de 250 millilitres, vendus au prix du tiers de la bouteille. C’est peut-être un peu beaucoup. Comme la carte des vins est courte, bien faite et éclectique, on hésite cependant à trop rouspéter.

Mieux vaut, après tout, se passer de boire, ou boire moins, que de bouder son plaisir. Et quel plaisir! À ranger d’ores et déjà au carnet des meilleures adresses.

Bémol: la formule discutable adoptée pour le vin.

Dièse: une cuisine simple, maîtrisée et réussie. Mention spéciale pour les desserts, absolument exquis.

Prix fixe: de 24 $ à 34 $.

3807, rue Saint-André

(514) 523-3885

www.brunoise.ca