Restos / Bars

Guido et Angelina : Plus beau que bon

Mamma mia!

On a cru que ça n’ouvrirait jamais. Depuis longtemps était annoncée la venue d’un autre resto à sushis dans un coin où il s’en trouve déjà de fort réputés. À la place, c’est un italien qu’on a inauguré. Dans une ville où la pizza risque un jour d’être aussi populaire que les sushis (!), il y avait presque de quoi se réjouir.

Il faut dire que le lieu est alléchant: le coin Sainte-Catherine et Atwater, dans l’antre de l’ancien Forum (rebaptisé d’après une marque de boisson gazeuse qui se passe de publicité), où s’illustrent encore, dirait-on, les fantômes des Glorieux d’antan.

Guido et Angelina est à l’image du lieu: high-tech, démesuré, à la limite du kitsch. La salle, qu’on s’attendait à trouver déserte (le resto ouvre à peine), est presque remplie. Idem pour les deux terrasses aménagées le long des grandes artères. C’est bruyant, foisonnant. Au-dessus de la cuisine ouverte, des télés, inexplicablement, diffusent des extraits de péplums et de dessins animés entrecoupés par le logo des Canadiens. Même chose pour un écran monstrueux installé dans ce qui passe peut-être pour un détail du Colisée de Rome.

Il s’agit, on l’aura compris, d’un concept. Il suffit pour s’en convaincre d’une visite au site Web. Là, on trouve, outre le menu, une série animée présentée en épisodes mettant en vedette, oui, bien sûr, Guido et Angelina qui, sur place, montent aussi la garde sur la porte des toilettes! De là à penser qu’on cherche à détourner l’attention de la cuisine…

Tout avait pourtant bien commencé. Une entrée toute simple de saucisses et d’olives auxquelles on avait ajouté quelques dés de poivron rouge incarnait la simplicité et le charme de la bonne cuisine italienne. Même remarque pour les légumes grillés, fort bons, sauf les aubergines, gorgées d’huile au point de faire penser à une viande trop cuite. Honorables, les calmars frits, omniprésents de nos jours, étaient servis sur quelques feuilles vertes bien vinaigrées qui tranchaient agréablement sur la friture. Les petites bêtes auraient toutefois gagné à être servies plus chaudes. Quant à la sauce d’accompagnement, envahissante, on l’a cavalièrement laissée choir d’un côté de l’assiette. Pourquoi ne pas la mettre dans un petit récipient?

En gros, donc, un premier service apprécié. C’est après que tout se détraque. Le commis a, comme il se doit, enlevé les couverts, mais oublié de les remplacer. Il faut dire qu’il a été pris de vitesse par un serveur qui, tout de suite, a apporté trois des quatre plats commandés. Dans cette fâcheuse position, nous restons là, dépités. Peut-être un des messieurs en costume qui déambulent sans but apparent nous aidera-t-il? Non, hélas. À force de gesticulations, nous finissons par alerter la serveuse.

Le saumon au gril, demandé "saignant", est beaucoup trop cuit. On le remporte. La margherita, chichement garnie, passe le test. La pâte, bien croustillante, manque cependant de sel. Enfin de retour, le saumon (servi avec des légumes traités inégalement), s’il est à peine grillé, tient la route. À 12 dollars, il s’agit, disons-le, d’une aubaine. La lasagne au ragù, arrivée longtemps après le reste, est un peu trop riche en pâtes (légères, impeccables), mais la sauce est elle aussi insuffisamment salée. Quant aux linguine con vongole fresche… c’est l’horreur. Les pâtes s’agglutinent, la sauce est acide et l’ail écrase jusqu’au goût fin des petits mollusques. Immangeable. Pourtant, la serveuse rapporte l’assiette presque pleine sans poser de questions.

Elle ne se donne pas non plus la peine de remplir nos verres. C’est le royaume du libre-service. Idée intéressante, par ailleurs, on n’offre que des vins maison, répartis en trois ou quatre catégories. Malgré une sélection limitée, le blanc choisi manque à l’appel. Sans vice ni vertu, son remplaçant, un cran en dessous, se boit agréablement.

Heureusement, les desserts sauvent la mise. Le gâteau au chocolat, dense et savoureux, est joliment présenté avec une fourchette en trompe-l’oeil tracée au cacao. Réponse italienne aux profiteroles, les zeppoli, beignets farcis au ricotta, servis froids, clôturent sur une note heureuse une expérience en dents de scie.

Et si, au fond, la cuisine passait en second? Ou si, plus justement, on ne venait pas ici d’abord pour manger? Après tout, on trouve à Montréal une multitude de restos, italiens notamment, où l’on ne fait que ça.

Bémol: un service à la va comme je te pousse, des cuissons et des assaisonnements approximatifs.

Dièse: des plats servis en portion familiale, des prix raisonnables.

Entrées: de 4,75 $ à 8,50 $

Plats: de 6,50 $ à 24 $

Desserts: de 4 $ à 7,50 $

2313, rue Sainte-Catherine Ouest

(514) 228-5225

www.guidoangelina.com