Restos / Bars

La Closerie – côté bistro : Forces inégales

Ce n’est un secret pour personne: il s’agit d’une renaissance. On en attend au moins les qualités auxquelles feu La Closerie du boulevard René-Lévesque nous avait  habitués.

Il nous revient sous le même nom, mais sous deux formes dites "côté bistro" et "côté gastronomique". La terrasse d’angle nous a tentés, autant que la petite carte qu’un membre du personnel vous présente avec le sourire. La faim nous suggère de rester et nous voici bientôt installés sous un immense parasol rouge à l’emblème de Stella Artois. Pour le moment nous sommes les seuls, mis à part un couple d’anglophones accompagné de deux jeunes enfants pleins d’énergie. En bordure de la place George-V, trois énormes autobus déversent leurs flots de touristes asiatiques – jeunes et moins jeunes, ados et bébés – qu’on voit se diluer progressivement dans la foule des promeneurs. Nous en sommes là de notre passivité quand on nous apporte la petite carte vue précédemment, avec ses entrées de chèvre chaud rôti en salade aux noix, potage, terrine ménagère aux foies de volaille de grain, gaspacho, cassolette d’escargots et champignons. La rubrique des plats de résistance, typique d’un menu bistro, inclut le confit de canard gavé, le contre-filet de boeuf à la lie de vin (pommes frites et salade), l’escalope de saumon au curry, le rôti d’agneau, etc. Bien plus tard, à la fin de notre repas, nous découvrirons qu’il existe aussi un "menu terrasse" plus simple. Le passage en trombe d’un camion de pompiers nous distrait un instant. Alors que je me rabats sur les tranches de pain, mon invitée se fait servir un verre de rosé. Peu de temps après, la serveuse lui sert son potage, une délicieuse crème d’asperge et poireaux servie brûlante. On y décèle une pointe d’acidité qui ne gâche rien et un léger goût de cresson résultant sans doute de l’assaisonnement. Comme je m’attends à un plat de résistance imposant, je n’ai pas pris d’entrée; et comme ma faim ne cesse de rouspéter à force de borborygmes, la corbeille de pain y passe et la serveuse doit bientôt la renouveler. J’ai droit à deux autres cuillerées de potage, histoire de rappeler à mon estomac qu’il n’y a pas que les baguettes dans la vie. Cette fois, c’est un serveur qui amène nos assiettes. Celle de mon invitée exhale un parfum qui sollicite toute mon attention. Deux filets de bar grillés au fenouil s’y chevauchent, largement mouillés de sauce. Cuite à point, la chair du poisson se défait sensuellement sur la langue. L’équilibre des saveurs s’avère presque parfait – "presque" car le sel me semble dominer un peu, avis que ne partage pas mon invitée. Je m’attarderais volontiers dans cette assiette, dont la garniture se complète de brocoli, dés de tomates, carottes, courgettes, ainsi que d’une tranche de fine polenta. Ma propre assiette fait un peu pitié avec son air tristounet. "Paëlla à notre manière": tel est son nom. Une variante de la valenciana, somme toute: un morceau de poulet, un coeur d’artichaut, deux ou trois tomates cerises entières, des rondelles de calmars, trois ou quatre crevettes roses, des moules dressées autour et des palourdes égarées dans un riz truffé de petits pois. À vrai dire, il y a là tout ce qui pourrait faire une réussite, mais ce n’est pas le cas. Manque de goût, manque d’arômes… et cette impression, justifiée ou non, que ce plat n’en est pas à son premier réchauffage. Tristounet, ai-je dit? Je le suis autant, sinon davantage. Et j’essaie de comprendre… Le chef était peut-être absent et quelqu’un d’autre a cuisiné cette paëlla… "Le jour et la nuit!" résume mon invitée en comparant nos deux assiettes. Et nous passons plusieurs minutes à imaginer des justifications, simplement parce que l’ancienne Closerie nous avait souvent gâtés. "Nous aurions dû choisir le resto…" Cette réflexion me console à peine, mais il est vrai que la carte "côté gastronomique", à laquelle nous avons jeté un coup d’oeil, nous avait fait saliver tant et plus. Pour essayer de conclure sur une note agréable, je termine par un nougat glacé au miel et aux noix. Mais le coeur n’y est plus.

La Closeriecôté bistro
1210, place George-V Ouest
Québec (Québec)
Téléphone: (418) 523-4465
Menu terrasse: de 4,75 $ à 15,75 $
Table d’hôte: de 25,75 $ à 29,75 $
Souper pour deux (incluant boissons et taxes): 70,17 $