La maison de la rue Laval, excentrée du côté du boul. Sacré-Coeur, a bien peu changé: extérieur agréable, intérieur sobre, pas génial, mais tout à fait correct. L’accueil est très chaleureux à l’exemple du service. On nous propose une "cuisine française innovatrice": classiques réinventés à la saveur locale, quoi.
En amuse-bouche, un ensemble plutôt joyeux et coloré: mousseline de saumon parsemée d’une salsa pomme-mangue garnie de capucine – à noter la présence de cette fleur dans tous les plats, lui enlevant vite tout intérêt. Pas le temps d’avaler les deux bouchées et de finir notre apéro que les soupes sont posées sur la table. Ce fut d’ailleurs un des seuls reproches sérieux que nous ayons à faire au service, ce soir-là: moins vite, svp! Le potage à la courge bio et crème au basilic de Claude sera mangé tiède, ce qui n’arrangera en rien sa fadeur qu’un fond de caille n’arrive pas à contrer. J’ai plus de chance avec un gaspacho de tomate et fenouil parsemé de livèche citronnée et bien relevé de vinaigre balsamique. Une belle acidité fraîche et surprenante.
Il poursuit avec un soufflé de fromage de chèvre Floralpe – un classique de la maison – sur croustillant de basilic, tomate confite, coulis de poivron et julienne de céleri-branche. L’ensemble est fin. De mon côté, une mini-lasagne de caille et canard confits, bien que bonne, est étourdissante pour les papilles. Imaginez une superposition de pêches légèrement caramélisées et nappées de brie fondu, une pâte à raviole, les volailles confites, raviole encore et finalement confit d’oignons et gingembre. Le tout est encerclé d’un coulis de citron confit, d’une réduction de vinaigre balsamique et d’un coulis de poivron… Ouf! Le tableau est beau, rien ne choque vraiment, mais cette polygamie débridée nous mènera tout droit en Cour Suprême!
Nous brisons le rythme effréné du service avec un granité au Sancerre et Belle de Brillet, rafraîchissant comme il se doit. Claude s’attaque ensuite avec scepticisme à un médaillon de caribou sauce légère au chocolat. Notre serveuse – et co-propriétaire – le rassure: fond de veau, porto et chocolat bien noir crée un ensemble agréable. Il lui donnera raison. J’y vais pour les ris de veau. L’inspiration du chef, ce soir-là, est en accord avec cette fin d’été: sauce crème légère aux chanterelles et pleurotes. Ris de veau fondants, joliment servis dans un petit potiron d’automne et entourés d’un gratin de pommes de terre, de courge spaghetti, mini-pâtisson et autres petites courgettes en fleur, tomate confite. Les mêmes accompagnements qui garnissent d’ailleurs l’assiette de mon ami. Côté vin, un petit espagnol, Vinas del Vero 2000, Somontano, trouvera son équilibre entre nos plats fort différents.
Enfin, côté dessert, nous y allons d’un trio chocolaté: mousse, terrine, fondant. Tout est bien fait, réjouissant, et élégament présenté avec tuiles chocolatées, crème anglaise et coulis de petits fruits.
Bref, une table qui mérite le détour, mais gagnerait à se simplifier un peu, question de nous donner la chance de jouir pleinement des belles et bonnes idées du chef. Surtout qu’à près de 95$, avant vin, taxes et pourboire, pour deux personnes, on s’attend à un beau moment, sans presse et sans reproche.
Le Verlan
222, rue Laval
Gatineau (secteur Hull)
Tél.: 777.8883