C’est peut-être que la très british clientèle tente de noyer la grisaille en se gavant de cette cuisine que l’on dit "toscane expressive" et qui fait miroiter les plus beaux soleils de l’Italie? J’ai toujours voulu trouver l’endroit sympathique, voisinage oblige. J’ai voulu oublier les bleu, rouge et jaune criards d’un décor franchement fatigué. J’ai voulu trouver dans ces plats souvent inutilement compliqués la fraîcheur certaine des ingrédients. Mais tout cela demande trop d’efforts pour que j’apprécie mes visites. Celle-ci comme les précédentes.
En ce soir de novembre pluvieux, j’avouerai que l’ail grillé qui nous est apporté avec le pain et l’huile d’olive a de quoi réjouir. J’ouvre donc sur une note positive, tartinant avec un plaisir non feint les gousses crémeuse et parfumées. On fait suivre d’une assiette d’antipasti colorée, mais un peu chargée, signature d’un chef qui a la fâcheuse tendance à en faire trop. Tomates et bocconcini, artichauts marinés, ail au vinaigre balsamic, saumon fumé et fromage à la crème, frittata, prosciutto, purée de fèves blanches, champignons cremini marinés. Et j’en passe. Tout est fait maison, dit-on… Il faut simplement s’entendre sur la définition du "fait maison". Les artichauts en boîte on reçu un petit coup de pouce requinquant, tout comme les aubergines marinées. Disons, pour faire bref, que l’ensemble est assez réjouissant, les saveurs franches et les portions plus que suffisantes, comme c’est toujours le cas ici. On remarquera d’ailleurs que la plupart des clients repartent les bras chargés de boîtes de styromousse blanche contenant au moins la moitié de leurs assiettes trop copieuses…
Après une telle entrée en matière, nulle envie de se lancer dans les plantureux – et combien célèbres – tortellini au gorgonzola sur lesquels se vautre, sans gêne aucune, un filet de boeuf, ni d’y aller d’un trio de poissons, tous plats bien trop lourds. Louise ira donc simplement d’une pizza au salami calabrese. Une croûte ni mince ni épaisse – un entre-deux inintéressant et un peu sec – est garnie de salami, champignons, olives noires, mozzarella, oignons braisés et tomates. Pas mauvais, mais rien qui vaille qu’on en parle plus longuement.
La déception est plus grande de mon côté. Poulet grillé et fusilli sont d’une tristesse! Bon, précisons: le poulet est tendre et juteux – c’est déjà ça – mais on pourrait faire pareil chez soi, sans trop se forcer. Et pour ce qui est des fusilli sur lesquels il repose, alors là, franchement, j’ouvre un resto! Une sauce rosée à la vodka inferno tombe à plat – fade et trop tomaté. Et la petite salade qui accompagne le tout – mesclun, bout de tomate et bout de concombre – est nappée d’une vinaigrette à la tomate grillée qui fait mauvais écho aux pâtes.
On finit avec un bon déca – c’est toujours ça de pris! – et on rentre. Sans boîtes, ayant préféré laisser nos déceptions au fond de nos assiettes. Un repas pour deux, avant vin, taxes et pourboire coûtera une cinquantaine de dollars. Entrées entre 7$ et 12$; plats entre 13$ et 27$. L’addition peut donc être nettement plus salée si on y va d’un plat de poisson ou de viande dans les 20$ chacun.
Trattoria Zingaro
18, Beechwood
Ottawa
Tél.: 744-6509