Restos / Bars

Hinode Sushi Bar : Lendemains de veille

La dernière chose dont vous avez envie qu’on vous parle, en ce lendemain de veille, c’est probablement de bouffe. D’ailleurs, vous préférez sans doute qu’on ne vous parle pas du tout ou encore pas trop fort. Je vous promets donc d’écrire tout bas, à mots couverts en quelque sorte.

Le choix du restaurant de cette semaine n’est donc pas innocent. Après le ragoût de patte, la dinde, la tourtière et tout le tremblement, l’estomac demande, revendique, exige des petites choses pas trop riches, du genre de celles qu’on trouve, justement, chez les Japonais.

À condition, évidemment, d’en choisir un qui ne viendra pas piquer votre curiosité à grand renfort d’innovations iconoclastes (et souvent irrésistibles), façon tempura de foie gras ou makis au poulet cajun.

À cet égard, Hinode est peut-être la réponse à vos voux: un petit bar à sushis sympathique où, évidemment, on ne sert pas que des sushis. Il est d’ailleurs intéressant de noter que c’est souvent le reste du menu qui distingue les restaurants japonais entre eux. Du côté des makis et des nigris, quelques catastrophes mises à part, on note en effet une certaine uniformisation, tant dans les produits proposés que dans la qualité: rares sont ceux qui goûtent la différence entre deux grains de riz ou deux tranches de saumon crues, peut-être issues, au demeurant, du même fournisseur. Le commun des mortels fera plus facilement les nuances qui s’imposent du côté des autres plats.

On est ici en présence d’un établissement jeune (aux deux sens du terme), urbain, décontracté et plutôt agréable : un bar à sushis, un bar tout court, une décoration dépouillée avec banquettes couleur crème et murs de briques. Le service, courtois et efficace, est à l’avenant. À noter aussi un écran géant où étaient présentés, ce soir-là, des clips mettant en vedette des chanteuses que je n’ai pas l’honneur de connaître et qui, à en juger par leur tour de taille, doivent se nourrir exclusivement de sushis (sans riz). On aime ou on n’aime pas: chacun ses goûts.

En entrée, on vous propose une surprenante et agréable salade de fruits, composée, outre quelques feuilles vertes et des languettes de mangue verte, de tranches de raisin, de carambole, de poire et même, jolie surprise, de petits morceaux de litchi. On la sert avec une vinaigrette toute simple à base de sauce soja et de vinaigre de riz.

Toujours dans le registre des choix précautionneux post-abus, le sashimi de bouf (7,95 $), de fines tranches de filet généreusement nappées d’une sauce ponzu goûteuse à souhait, emporte l’adhésion.

Première entorse à la diète, que seul explique le sens du devoir: une entrée de tempura de légumes (4,75 $), friture classique exécutée correctement. À signaler: la trempette, curieusement insipide.

Si la carte des sushis est sans surprise (à l’exception peut-être de la présence de patate douce dans un maki), l’exécution, elle, paraît sans grand reproche. Notons un sushi à la chair de "vrai" crabe, façonné en barquette, ici judicieusement distinguée de la goberge commune. Ce qui frappe, c’est la présentation. Le chef décore les assiettes de fleurs (non comestibles, attention!), et le résultat est si joli qu’on le soupçonne d’avoir été fleuriste dans une autre vie. Les esprits retors, désargentés aux lendemains de Noël, y verront le moyen d’offrir à l’élu(e) de leur cour un repas et des fleurs en même temps…

Nouvelles entorses: le poulet katsu (11,95 $), une tranche de blanc de poulet escalopé, légèrement panée, accompagnée de légumes qui grésillent sur une "pierrade" (merci à une aimable lectrice de Voir de m’avoir fourni le mot qui me manquait) et le filet de poisson flambé (appellation manifestement erronée), offert à 15,95 $, lui aussi pané et servi de la même manière. Deux propositions fort honnêtes, moins riches qu’on pourrait le craindre, les fritures japonaises bien faites étant, comme dirait l’autre, d’une insoutenable légèreté.

En revanche, évitez la glace frite aux fruits, alléchante sur papier, même à 6,95 $. Il s’agit en réalité d’une grosse boule de glace enrobée d’une sorte de crêpe froide, accompagné d’un coulis (de mangue, par exemple) et d’un sirop.

Si vous avez encore mal aux cheveux, je m’excuse d’avance de causer "boisson": outre la bière et le saké, Hinode vous propose quelques vins un peu convenus, néanmoins adaptés à la cuisine. À moins que vous ne préfériez vous en tenir sagement au thé vert.

Bémol: la radio commerciale à plein tube le midi.

Dièse: le soin apporté à la décoration des assiettes.

4525, avenue du Parc
849-9778