Restos / Bars

Dev : Par ici les caris

Vous êtes pris d’une irrésistible envie de cari? Pourquoi ne pas sortir des sentiers battus et honorer de votre clientèle cet inestimable petit troquet de l’avenue Victoria? À l’intention de ceux qui s’imaginent un long périple semé d’embûches quasi insurmontables, précisons d’emblée que c’est tout près du métro Plamondon. Votre estomac et votre portefeuille vous en remercieront.

Ni le quartier ni le resto ne sont très "glamour", évidemment, mais les amateurs d’authenticité et de rapports qualité-prix imbattables voudront à tout le moins tenter l’expérience et faire abstraction du décor modeste, un peu tristounet, où tranche le sari coloré de la patronne, qui assure le service. Et encore, on a retouché la salle tout récemment. Le chic, ici, on le réserve aux assiettes.

En ce qui concerne les restaurants indiens d’ici, le plus dur, en fin de compte, c’est de trouver des établissements qui se démarquent nettement de la concurrence. Qu’est-ce donc qui distingue Dev? La constance (soir après soir, mois après mois et même année après année, les plats portent la même signature), le savoir-faire et quelques spécialités différentes de la liste des suspects habituels. Mentionnons à titre d’exemple la purée d’épinards très crémeuse (saag) servie avec des "pains" au maïs qui ressemblent à s’y méprendre à des tortillas. Doit-on attribuer cette différence aux origines des patrons, venus du Panjab?

Mieux vaut, en définitive, goûter. En entrée, difficile de passer à côté des pakoras, délicieuses boulettes de légumes frites qu’on vous vend à la livre (4 $) ou à l’assiette (2 $). Difficile aussi de choisir entre les sauces proposées (tamarin, un peu sucrée, ou piment et coriandre, piquante). Ne manquez pas non plus le channa samosa (3 $), sympathiques chaussons fourrés de pommes de terre, brisés en morceaux et mélangés à du yaourt et à des pois chiches, auxquels on ajoute un peu de laitue. Un régal, relevé à point. Les pakoras au poisson (4 $ l’assiette), chair blanche bien ferme, frite elle aussi, déconcertent au départ, mais finissent par convaincre.

Pas de doute en revanche du côté de la baigen bartha (6 $), purée d’aubergine au bon goût de fumée, crémeuse, savoureuse, ici parsemée de petits pois, sans doute plus pour la texture et le coup d’œil que pour le goût. Ce plat végétarien, hélas trop peu présent sur les cartes des restos indiens de Montréal, est un must.

Pour le reste, vous avez littéralement l’embarras du choix. Dev interprète avec gusto les incontournables, genre poulet au beurre (6,50 $), agneau korma (7 $), cari au bœuf (6,50 $) et le reste, mais rien ne vous empêche d’opter pour le poulet jalfrazi (7 $) ou le poulet au chili (7,50 $), par exemple, curieuses et fort agréables préparations aux accents… chinois, attribuables peut-être à la sauce soja qu’on croit deviner en contrepoint.

De la cuisine familiale, en somme, honnête, maîtrisée, délicieuse, sans excès de parfums.

À l’intention des personnes seules, chagrinées à l’idée de ne pas pouvoir goûter un peu à tout, Dev propose des thalis, repas complets, végétariens ou non, servis dans des assiettes à compartiments, façon "TV Dinner", mais là s’arrête la comparaison.

On a pensé à tout, même à mettre au menu une cuisse de poulet tandoori (2,50 $), à la chair moelleuse, succulente, idéale pour les enfants ou les petits appétits. Un peu de riz et de pain nan, tout à fait convenables, ici, quelques légumes évidemment, et le tour est joué. À moins que vos rejetons ne vous jouent eux-mêmes un tour en préférant finir à la cuillère la sauce de votre cari à la crevette, irrésistible il est vrai!

Les gulab jaman, boules de lait au sirop omniprésentes sur les menus indiens, satisfont sans excès votre dent sucrée, à moins que vous n’ayez accompagné votre repas d’un lassi à la mangue, savoureuse boisson à base de yaourt à la couleur insolite, quelque chose comme orange électrique. Sinon, Dev propose du vin au verre, mais vous préférerez une bière, brésilienne, par exemple, histoire de jouer à fond la carte de la mondialisation.

À noter que les prix cités comprennent les taxes.

La cuisine de Dev a stimulé votre créativité et votre esprit d’aventure? Courez faire le plein d’épices et d’autres articles indispensables au sympathique Marché Victoria Oriental (6324, avenue Victoria), un peu au nord.

Bémol: Décor réduit à sa plus simple expression ; ambiance un peu limitée.
Dièse: Cuisine authentique, savoureuse ; au menu, quelques surprises.

Dev
5997, avenue Victoria
733-5353