Restos / Bars

Miso : Oeufs au bacon, sushis et caris

Rassurez-vous: l’établissement dont il est ici question ne propose ni sushis au bacon ni makis au cari. Il a plutôt la particularité de jumeler deux types de "cuisine" qu’on n’a pas l’habitude de réunir sous un même toit: les déjeuners et la cuisine asiatique. Pas les déjeuners japonais ou vietnamiens à base de poissons et de légumes dont on nous vante les mérites, mais qui sont à peu près introuvables ici – et dont l’absence au menu de Miso déçoit un peu. Non, on sert ici les déjeuners nord-américains d’inspiration britannique qui font les beaux jours de toute une catégorie d’établissements: œufs, crêpes, omelettes.

Une fois passé l’étonnement suscité par cette proposition originale, il faut bien l’avouer, on a affaire à une jeune maison aux visées larges qui, au vu d’une première visite réjouissante, donne l’impression d’avoir les moyens de ses ambitions.

Miso, établi à l’angle de Sainte-Catherine Ouest et d’Atwater, en biais par rapport à l’ancien Forum, joue la carte des restos branchés, façon Ginger, et y réussit plutôt bien: décor dénudé, tons de beige et de vert, musique lounge. La comparaison s’arrête toutefois là parce que, sous ses dehors de petite salle ouvrant sur un beau bar à sushis bien éclairé, le resto cache deux étages supplémentaires. Quand on sait qu’il y avait là auparavant un McDonald, on comprend mieux. (Les sushis dament le pion aux hamburgers et aux frites? Mais non. Le McDo a simplement déménagé de l’autre côté de la rue.)

Encore des sushis? Oui, mais pas seulement. (Soit dit en passant, les quelques bouchées goûtées à l’occasion de notre visite étaient fort honorables.) Miso se revendique de la "fusion asiatique". Je profite de l’occasion pour ouvrir une parenthèse sur le profond agacement que je ressens chaque fois que l’expression "fusion" est utilisée à tort et à travers par les restaurateurs et, hélas, par certains de mes collègues. La fusion, c’est, pour dire les choses trop succinctement, le mariage, dans une même assiette, de techniques et d’ingrédients de cultures différentes. Miso, qui propose des plats japonais et chinois au fond traditionnels, fait non pas de la fusion, mais plutôt de la cuisine pan-asiatique.

Bien d’ailleurs, et souvent très bien. J’en veux pour preuve cette tempura aux crevettes et aux légumes à la friture légère et croustillante (7 $), les quenelles (appellation abusive à laquelle il faudrait peut-être préférer celle de "beignets") au poulet (6 $), servies façon dim sum dans un cuiseur vapeur en bambou, collantes en diable mais moelleuses et savoureuses, et les brochettes de shiitakes à la texture parfaite et au bon goût fumé. Trempés dans la sauce ponzu, les champignons font merveille. Dommage que la portion (trois champignons en tout), pourtant détaillée à 7 $, soit si menue.

Les plats de résistance, en revanche, sont fort généreux, comme en témoigne ce poulet général Tao (12 $) irréprochable ayant vaincu l’appétit d’un pré-ado qui, à l’instar d’une multitude de ses concitoyens, en raffole. Même remarque pour un exquis bœuf au cari (13 $): de beaux morceaux de viande fondante et des légumes servis dans une sauce inclassable, ni thaïe, ni chinoise, ni vietnamienne. Comme quoi les caris sont d’abord et avant tout une affaire personnelle. Les légumes grillés (6 $) commandés comme à-côté, impeccables, témoignaient d’un net parti pris d’esthétisme. D’inspiration manifestement chinoise, les pétoncles aux fèves noires (16 $), moelleux à souhait, faisaient bon ménage avec les légumes croquants détaillés en petits morceaux et la sauce riche en fèves aux propriétés quasi enivrantes.

Parlant d’ivresse, la maison, à l’intention de ceux qui ne préfèrent pas la bière comme complément d’une telle cuisine, propose une carte des vins courte (bouteilles de 28 à 56 $), mais bien faite, et même quelques demi-bouteilles.

Côté douceurs, on vous offre, outre des glaces commerciales et des sorbets du Bilboquet (signe de sérieux, tout de même), une crème brûlée du jour (8 $). Celle au thé vert proposée ce soir-là était à la fois si onctueuse et si dépaysante qu’elle s’imposera fort probablement au menu. La maison faisait par ailleurs l’essai d’un pouding aux litchis (5 $), léger, exotique et délicieux.

À souligner, la qualité des présentations, les tables bien dressées, la jolie vaisselle et le service empressé, assuré par une brigade à l’évidence soucieuse de la réussite de l’entreprise.

Bémol: On souhaiterait des entrées un peu plus généreuses.
Dièse: Cadre agréable, présentations soignées, plats maîtrisés.

Miso
4000, rue Sainte-Catherine, 908-6476
www.restaurantmiso.com