C’est bien simple: on n’y croit pas sur le coup. Certains souvenirs sont tenaces: ceux qui ont hanté ce local au fil des ans auront l’impression, en entrant ici, de débarquer sur une autre planète. Des rénovations sur trois étages (les cuisines au dernier), un réaménagement radical de l’espace dans une fusion harmonieuse de formes géométriques pures et, à l’abri derrière son voile blanc, un imposant bouddha qui veille sur ce décor urbain extrêmement dépouillé: depuis le milieu de l’été, ce lieu en est un autre, si l’on peut dire. À l’entrée, sur la gauche, quelques tables près de la baie vitrée. Puis le bar rectangulaire, immense, aux coins adoucis. À droite comme à gauche, une longue banquette rouge court le long d’un mur de pierre peint en blanc. Entre les deux, une longue table de béton qui, tard en soirée, se déplace et devient une piste de danse. Faut le faire! De son poste de vigie situé tout au fond, sur la droite, le DJ domine la salle. Nous avons faim, mon amie et moi, mais notre curiosité s’attarde à autre chose qu’à la carte – pour un certain temps, du moins. Bientôt, les assiettes nous intriguent, parfumées quand elles passent près de nous, pointant chacune deux ou trois langues vertes – feuilles de bananier qui font partie du décor de presque tous les plats. L’asiatique donne le ton à toute la cuisine, mais avec tant de nuances qu’on prend plaisir à redécouvrir ne serait-ce qu’un plat de nouilles. La carte, petite et carrée, se veut sobre, d’une typographie élégante – au point qu’on peut avoir du mal à déchiffrer certains détails. "Fui ou Fuji?". Pour le serveur que j’interroge, la réponse semble évidente… C’est donc pour le "mesclun Fui" que finit par opter mon invitée. Les entrées elles-mêmes nous avaient placés dans l’embarras du choix – thon rouge sauté au bok-choi, rouleaux kélapa, feuille de chou frisé garnie de légumes marinés… -, autant que les soupes-repas "Amazonienne", "Chikkis", "Jeito", les salades-repas "Tataki" (thon rouge au soya), "Chin-Chin" (poulet bio, graines de sésame, vinaigre de riz, etc.). Parmi les sauces, du "pesto brésilien", eh oui! Puis une thaï, une coréenne, une autre au curry vert et coriandre. Sans parler des "Sautés wok induction" et des plats composés: délices de la mer aux bouillons de Brésil, thon rouge en croûte de poivre noir, jus de viande à la citronnelle et coriandre, satay de poulet au riz parfumé! Notre copieuse lecture nous a semblé une longue randonnée. Après avoir passé commande, mon invitée continue d’apaiser sa soif d’un verre de chardonnay australien (Penfolds Koonunga Hill), auquel succédera bientôt un deuxième. Je m’en tiens à une Belle Gueule. Premier plat, première surprise: en fait, une petite assiette creuse, carrée, dans une autre plus grande et de la même forme – de la sauce au curry rouge (un peu sirupeuse) dans la première et, dans la seconde, une salade verte (épinards, laitue, trévise et pousses de petits pois) posée sur des feuilles de bananier. Par-dessus tout cela, les brochettes. Il s’agit de poulet en tempura, d’un moelleux auquel on ne pouvait s’attendre et d’une finesse de goût qui surprend autant. La sauce ne s’avère pas aussi piquante que j’aurais pu le craindre, mais, à la longue, elle se fâche un peu… mais ma propre entrée me sollicite. La présentation est identique, mais j’ai droit à une sauce douce-amère – ni trop douce ni trop amère – pour accompagner des rouleaux impériaux absolument délicieux, pas gras pour un sou, légers, à la fois souples et croquants. Par chance, nous avions demandé la version "entrée" pour ce qui allait suivre comme plat principal. Pour moi, une grande assiette creuse, carrée, blanche, généreusement garnie de soba (nouilles japonaises au sarrasin). Sur ce lit confortable et noir, hérissé d’un chip de taro, reposent des tranches de porc bien grillées, nappées d’une sauce épaisse et sombre, à base de soya, gingembre et ail. Aucun des ingrédients ne s’impose au détriment des autres, mais on est un peu décontenancé, sans doute parce qu’inconsciemment, on s’attendait à du sucré ou à du très salé. À peine distingue-t-on une lointaine amertume… apéritive. On mange vite et on n’en peut bientôt plus. Mon invitée, plus sereine, y va lentement mais sûrement. Salade et chip de patate douce accompagnent son "mesclun Fui", constitué de langoustine, pince de homard, crevettes, agrumes, papaye, coriandre et soya. La sauce imprègne la salade et lui communique une saveur complexe résultant d’un mariage parfait entre les divers ingrédients. Là encore, rien ne s’impose… sauf le plaisir de manger. Et d’être bien jusqu’au moment de partir, hélas! avec un petit pincement au cœur.
Frankies Supperclub
48, côte de la Fabrique
Québec (Québec)
Téléphone: (418) 692-2263
Menu du jour à partir de 11 $
Plats composés: 18 à 29 $
Souper pour deux (incluant boissons et taxes): 67,73 $
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Reconnu partout au Québec comme LA référence critique sur les restaurants du Québec, le Guide Restos Voir en est à sa neuvième édition. En préparation de son 10e anniversaire, nous invitons les lecteurs du guide imprimé et les utilisateurs du guide Internet à nous faire part de leurs impressions et de leurs suggestions, afin que l’édition 2006 soit encore meilleure que le cru 2005 !
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GUIDE RESTOS VOIR 2005
Le Guide Restos Voir, édition 2005 est arrivé en librairie et est aussi disponible sur www.voir.ca! 772 maisons au total de partout au Québec, répertoriées en quatre sections: Montréal, Québec, Outaouais et Régions. 538 restos ont été visités au cours des 12 derniers mois. Beaucoup de nouveaux venus, 147 exactement; beaucoup de nouveautés aussi, clairement identifiées. Chaque critique de restaurant peut ainsi, selon le cas, être accompagnée de cinq icones:
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Fourchette indiquant une nouveauté dans l’édition de cette année
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Flèche vers le haut signalant une amélioration de la cote cuisine
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Grappe de raisins indiquant une carte des vins recherchée
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Verre à pied pour les établissements "Apportez votre vin"
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Parasol pour les terrasses, petites ou grandes
Lorsque nous visitons les établissements apparaissant dans le Guide Restos Voir, nous signalons notre passage aux propriétaires, après avoir mangé et payé l’addition, à moins que les exigences particulières de l’anonymat ne s’y opposent. Chaque critique est aussi accompagnée d’une date permettant de valider que nos visites se font selon le calendrier prévu.
Et toutes ces améliorations ont été apportées pour toutes les régions où le Guide Restos Voir cherche les bonnes tables pour vous en parler. Des Îles-de-la-Madeleine en Outaouais, du Saguenay-Lac-Saint-Jean à la Montérégie. À noter: 117 restaurants dans la section Québec.
Cette année plus que jamais, votre Guide Restos Voir constitue un outil de sélection encore plus fiable et, nous le souhaitons, encore plus agréable à utiliser. Bonne lecture et bon appétit!
Jean-Philippe Tastet et toute son équipe