Restos / Bars

Confusion Tapas du monde : Carnet de voyage

Effet de mode oblige, vous croyiez partir pour l’Asie, où vous attendraient les désormais inévitables sushis, une énième version des rouleaux impériaux et sans doute aussi quelques plats de nouilles, façon pad thai. Or, pour votre plus grand bonheur, c’est sur le pourtour de la Méditerranée que vous vous retrouvez.

Ouvert depuis six mois environ, Confusion Tapas du monde séduit d’emblée par son nom qui, avec humour, prend à rebrousse-poil les reproches dont on abreuve la cuisine "fusion". Sans compter que le terme "tapas" s’entend ici au sens le plus large, soit celui des petites assiettes dont, dans le cas présent, on fait tout un repas. (À ceux que la formule horripile, on propose aussi quelques plats de résistance de taille "normale".) D’emblée, le message est clair: pour le poulet rôti à la perfection ou le pot-au-feu à la mode de grand-maman, il faudra s’adresser ailleurs.

Un mot, d’abord, sur le cadre: à l’étage, une belle salle où la brique côtoie la pierre, des planchers en vieux bois brut, un plafond tout en moulures, un foyer, un bar central au comptoir éclairé de l’intérieur, de jolis luminaires et, au fond, quelques petites tables, façon lounge. Cette intégration harmonieuse de l’ancien et du moderne, sans déploiement de moyens extravagants, on la retrouve aussi au rez-de-chaussée, appelé Les Indécis (autre clin d’œil?), que dessert la même cuisine. On peut même y casser la croûte assis sur une balançoire. À cela s’ajoute un service souriant et empressé.

Mais venons-en au fait. On nous apporte d’abord le hummus carnivore (6 $): une purée de pois chiches où l’ail est très présent, surmontée de cubes d’agneau braisés, tendres, maigres et savoureux, de pignons et d’un peu de persil. Entrée en matière goûteuse dont on ne fait qu’une bouchée.

Vient ensuite le tartare de saumon et son procureur (12 $): une belle portion de dés de poisson et d’avocat (d’où, vous l’aurez compris, le nom) que coiffent quelques feuilles de jeune roquette. Des petits toasts comme à-côté, un trait d’huile à l’herbe au goût un peu indistinct, et le tour est joué.

La maison fait la part belle à la cuisine grecque. La pieuvre grillée (10 $), "sans prétention la plus tendre en ville", clame-t-on dans le menu, en est un bel exemple. Que l’affirmation soit fondée ou non – la concurrence, en la matière, est féroce -, on est en présence de tentacules grillés à merveille, effectivement moelleux, mis en valeur par la compotée d’oignons qui les accompagne. On retrouve en gros le même apprêt dans la salade grillée du marché et son petit chèvre (9 $); cette fois, la "compote" sert de contrepoint aux courgettes et aux aubergines, sur lesquelles s’abandonne une tranche de fromage.

On est en présence d’une cuisine travaillée, mais sans chichis: à preuve, les pâtes du jour (12 $), des penne al dente servis avec deux grosses boulettes de viande bien grillées mais fondantes, accompagnées de champignons de Paris braisés, d’une exceptionnelle tendreté, de tomates cerise et d’une généreuse quantité de copeaux de fromage. Maîtrise, simplicité, saveur: tout est là.

Le clou de la soirée demeure indiscutablement le "pop corn" de ris de veau (12 $): des "pépites" de ris de veau tendres à souhait et des grains de maïs dans un fond fortement édulcoré au miel. C’est tout. Une réussite totale.

Pendant qu’on est dans le "sucré", disons que la crêpe aux dattes (6 $) goûtée ce soir-là, servie avec une quenelle d’une excellente glace à la vanille (dont on ne nous a pas révélé la provenance) posée sur un biscuit au sésame émietté, a conclu le repas sur une note heureuse et peu banale.

La carte des vins (bouteilles à partir de 25 $) est relativement courte pour l’instant, mais il y a fort à parier que le nouveau cellier vitré aménagé dans l’entrée se garnira vite. Outre plusieurs vins au verre, on propose aussi, histoire de rester dans la note grecque, le demi-litre de retsina à 11 $. Au sortir du temps des Fêtes, ce petit blanc résineux sans prétention vous fera peut-être songer au sapin qu’il est temps de démonter…

Une adresse à découvrir (et à retenir) au cœur du quartier latin.

Bémol: la musique lounge qui agace plus qu’elle n’habille. Affaire de génération, peut-être.

Dièse: décor réussi, service sympathique, plats d’une remarquable constance.

1637, rue Saint-Denis
(514) 288-2225