Côté cuisine, du 17 au 27 février, cette 6e édition "Les Plaisirs SAQ" du Festival Montréal en lumière a éclairé les nappes montréalaises de bien belles lumières. Petits lampions ou gros spots lumineux, tout a contribué à faire de ces dix jours une fête magnifique. Dix jours, dix moments d’émotion intense qui resteront en mémoire, un peu comme ces instants de pure magie au spectacle de Passare, la dernière création de Ginette Laurin pour O Vertigo présentée lors du Festival, où l’on sent l’éblouissement des passages de la vie. Des passages d’émotion, encore et toujours.
Que de beaux moments, en effet. On est encore tout éblouis par ces feux d’artifice gastronomiques. Comme je le fais depuis toujours, je vous offre en rappel les moments forts de cette année. Le Festival est clos, on a entamé une petite cure de crudités et d’eau minérale, allons-y donc.
Dans le cadre du Festival, Racha Bassoul, l’élégante chef d’Anise, proposait à ses clients un événement intitulé "Ô les mains!". Doit-on en rajouter? Du plaisir chargé des souvenirs de l’enfance (sans les reproches: "On mange pas avec ses mains…"). Comme toujours, dans à peu près tout ce que Madame Bassoul touche en cuisine, on a eu droit à du travail de haute voltige. Le moment fort: un plat joliment intitulé "Péché de pêche" et composé de trois éléments – bonbon de saumon, samosa de crevette, pétoncle en robe de nori – accompagnés d’un coulis d’ananas. L’art de pousser les clients à pécher avec délectation.
Anise – 104, rue Laurier Ouest, Montréal, (514) 276-6999.
Les deux toqués des Chèvres, Stelio Perombelon et Patrice Demers, recevaient un collègue de Toronto, Claudio Aprile, du restaurant Sen5es. Beaucoup de classe, comme toujours dans cette maison, en cuisine et ailleurs. Le moment fort: un plat nommé H2O épicée//Slush au kalamanci. En milieu de repas, comme pause, un petit verre d’un liquide divin, fort en cannelle et en gingembre, quelques rondelles d’agrumes et, déposée au milieu de la table sur une feuille de bananier, une pierre de rivière chauffée au four sur laquelle grésille une pincée d’épices moulues, l’odeur créant une harmonie et un lien avec le goût.
Les Chèvres – 1201, avenue Van Horne, Montréal (514) 270-1119
Sen5es – 318, Wellington Street West, Toronto, (416) 935-0400
Au Cube, Éric Gonzalez recevait Davide Brovelli, chef du Il Sole di Ranco, Relais Gourmand des Relais & Châteaux et membre du très sélect club des Grandes Tables du Monde, Traditions et Qualité. Si l’on passe près de chez eux, on ne manquera pas d’aller saluer le chef et sa maman, une sainte femme qui, toute la soirée, a fait le tour des tables pour expliquer avec délicatesse lorsque c’était le moment d’expliquer. Et toujours avec le sourire. Que d’attentions! Le moment fort, un doublé: Risotto à la " Milanèse", mousse de Reggiano affiné et Perdrix rouge rôtie, crème brûlée au foie gras. Rien de farfelu, mais un respect des traditions suffisamment intelligent et bien dosé pour rendre celles-ci supportables.
Cube – 355, rue McGill, Montréal (514) 876-2823
Il Sole di Ranco – Piazza Venezia 5 I-21020 Ranco, 011 39 0331 97 65 07
Chez Leméac, Marco Fadiga et son pétulant second avaient quitté Bologne pour venir tester la brigade locale. Tout a été comme sur des roulettes bolognaises, cette maison prenant tranquillement sa place parmi les très bonnes tables de chez nous. Le moment fort, un doublé encore: un Tartare de pétoncles aux baies roses, crème de brocolis, écume d’ail, surtout pour ce dernier élément et une Crème légère au rhum, sauce au cigare Cohiba, dessert intrigant s’il en est, amusant et d’un goût décoiffant.
Leméac – 1045, rue Laurier Ouest, Montréal, (514) 270-0999.
Marco Fadiga Bistrot – Via Rialto, 23/c, 40124 Bologne, 011 39 051 22 01 18
Patrick Saint-Vincent, garnement de chez BU, et son compère Jean-Philippe Lefebvre, garnement de l’agence de vins Rézin, aiment bien partager avec leurs clients et amis. Ils ont réussi un splendide tour de force en invitant, le premier, Raquel Carena ; le second, Thierry Puzelat et Marcel Lapierre. Madame Carena est chef-propriétaire du Baratin, bar à vin du XXe arrondissement où vous voudrez absolument aller à votre prochain passage à Lutèce. Puzelat (Touraine) et Lapierre (Morgon) font des vins sans soufre, tout en dentelle et émouvants au plus haut point. Le moment fort: dans le verre, un petit vin de table de Puzelat joliment appelé "Le tel quel un poil dur" et, dans l’assiette, un chou farci aux champignons et au porc, d’une surprenante légèreté. Ah, ces Argentines tout de même, qu’est-ce qu’elles sont fortes.
Bu – 5245, boulevard Saint-Laurent, Montréal, (514) 276-0249
Le Baratin – 3, rue Jouye-Rouve, 75020 Paris, 011 33 1 43 49 39 70
Comment être œnologue et passionnante. Cristina Geminiani, grande gourou de la Fattoria Zerbina Faenza, a instruit et charmé tout au long du repas préparé avec beaucoup de brio par la brigade du restaurant Il Sole sous la houlette du chef invité, Vincenzo Cammerucci. Le moment fort: deux verres de joie céleste; pendant le repas, un Torre di Ceparano 2000, pur Sangiovese, ample, puissant et plein de fleurs et, au dessert, un irrésistible Scacco Matto 2000, robe de velours sur fond de pêche et de miel.
Il Sole – 3627, boulevard Saint-Laurent, Montréal, (514) 282-4996
Lido, Lido – Via Ferrara, 14 Cesenatico, 011 39 05 47 67 33 11
Invité par Alain Pignard et Thierry Villette du Beaver Club, le chef Susur Lee a ébloui par tout ce qu’il a présenté. On comprend pourquoi ce monsieur est considéré comme l’un des plus brillants chefs au monde. Il n’y a pas eu de moment fort puisque tout était éblouissant. En ouverture de repas, à la Susur: le plat principal. Un canon d’agneau chargé de boulets de cari, d’arachides, de menthe, de piments qui canonna tout en subtilités. Suivit une tarte au chocolat accompagnant un confit de foie gras fumé laqué au miel, citron vert, chili et réduction de pigeonneau. Plus tard, une jouissive croquette de homard aux abricots salés, rouleau de truffe, une touche de jicama et de céleri. Rendus à l’eau de rose aux oranges sanguines et sirop de vanille, les convives étaient bouche bée. Chaque élément de chaque assiette est époustouflant, chaque assiette est époustouflante et, en toute honnêteté, sans avoir abusé de bons vins, ça m’a pris un bon trois heures après le repas avant de pouvoir penser à autre chose qu’à ce que je venais de manger. Si ce n’avait été de vous, je déménageais à Toronto.
Beaver Club – 900, boulevard René-Lévesque Ouest, Montréal, (514) 861-3511
Susur Restaurant, 601, King Street Ouest (416) 603-2205.
Lee Restaurant, 603, King Street Ouest (416) 504-7867.