Restos / Bars

Les Menus Plaisirs : Il ne suffirait de presque rien…

Il y a des risques à aborder un restaurant par son site Internet. Ainsi, celui du restaurant Les Menus Plaisirs, un des plus complets que j’aie consultés jusqu’à maintenant, donne presque le vertige, tant on y trouve de renseignements: la carte, la table d’hôte, la fondue chinoise, le menu de dégustation, les dégustations, la carte des vins, l’auberge… Bref, de quoi craindre une sorte d’entrepôt de la gastronomie.

Dans ce cas particulier, la réalité l’emporte sur le monde virtuel. On a en effet affaire à une belle grande maison sise en bordure du boulevard Sainte-Rose, dans le quartier lavallois du même nom. Frappe d’emblée l’agréable terrasse boisée et fleurie qu’égaie le clapotis de l’eau d’une petite cascade artificielle. À l’intérieur, des salles aux boiseries sombres et élégantes. Au sous-sol, la salle de dégustation est tapissée de vitrines où mûrissent des bouteilles à vous donner des palpitations. Bref, on comprend l’affluence en ce beau dimanche soir.

Un mot d’abord sur la carte des vins, si longue qu’on a prévu une table des matières. Des crus de rêve, français surtout, s’y pressent en rangs serrés. De quoi faire des folies… Heureusement, on a eu le bon goût d’y glisser des bouteilles tarifées raisonnablement et de proposer un choix de demi-bouteilles comme on en voit rarement, par exemple ce Côtes-de-Bourg Château de la Grave Caractère 2001 (importation privée), vendu à 23 $. (Si, vos moyens aidant, vous faites un peu trop honneur à la cave, la maison propose depuis peu quelques chambres…)

La soupe froide aux carottes et à l’estragon de mon invitée était fraîche à souhait, sans excès de crème et bien parfumée. Évidemment plus riche, le potage aux fruits de mer, qui grâce à ses arômes safranés rappelait la bisque, était onctueux et savoureux. Quelques moules et crevettes nordiques y faisaient gaiement trempette. Seule ombre au tableau, nos bols dûment raclés s’éternisent sous nos regards impuissants. Le service, par ailleurs courtois, a des ratés, malgré la brigade qui semble suffisante. Disons, pour reprendre une expression autrefois appliquée aux joueurs de hockey, qu’il manque de "fini".

Ensuite, mon invitée, aventureuse, opte pour le tartare d’autruche à la moutarde violette, gaufrettes de Yukon Gold. Bien relevé, le mélange se défend sans renouveler le genre. Les chips maison, en revanche, sont ratées: brûlées par endroits, huileuses et molles. La danse de crevettes sur salsa à la créole (où l’ananas domine), aux accents estivaux, est heureusement loin du "cocktail" de crevettes qu’on aurait pu craindre.

En plat, la salade tiède de caille laquée aux airelles et balsamique sur paillasson d’asperges et croustilles d’ananas est elle aussi tout indiquée pendant la belle saison. Les volatiles sont fondants, point trop sucrés. Outre les asperges, le plat se présente à la manière d’un bouquet, accompagné d’un bel éventail de fruits (fraises, caramboles, abricots, etc.), de chips d’ananas mieux réussies et de quelques feuilles vertes. Quant au carré de cochonnet de lait Gaspor (du nom du producteur et non du goret, j’ai vérifié, vous pensez bien) sur braisé de jambonneau et croustillants d’Oka, peut-être moins de saison, il tient ses promesses: la viande, deux belles côtes tendres et juteuses, nappées de juste assez de sauce, s’accompagnait d’une garniture de légumes diversifiée et d’une sorte de choucroute au jambon bien goûteuse.

Difficile, dans ce contexte, de s’expliquer la corbeille de pain, où reposent, outre le beurre salé en barquette, des mini-baguettes à la mine bien pâle, à la mie collante, incompatibles avec une table qui offre un menu de dégustation à 82 $ et une telle cave à vins. Bémol aussi du côté des desserts de la table d’hôte, où le choix se limite à une crème caramel un peu tristounette et à des sorbets. On a beau parler des "gâteries de la chef pâtissière", à ces prix-là, on aimerait se faire gâter un peu plus. Rien à redire, par ailleurs, sur le sorbet à la poire, bellement servi dans un fruit évidé et glacé, tout à fait indiqué par temps chaud.

Bref, on passe une soirée agréable, et il s’en faudrait de peu pour que les "menus" plaisirs n’en soient de "grands".

En soirée, comptez de 70 à 80 $ pour deux, en table d’hôte, et le midi, de 25 à 30 $, avant les taxes et le pourboire.

Bémol: corbeille de pain décevante, service par moments brouillon, choix de desserts limité en table d’hôte.

Dièse: cadre agréable, jolie terrasse, carte des vins impressionnante, plats dans l’ensemble maîtrisés.

244, boulevard Sainte-Rose
Laval
(450) 625-0976
www.lesmenusplaisirs.ca