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Meatmarket – Restaurant, café : Le sex-appeal des nouveaux bouchers

Les retours de vacances sont toujours un peu inquiétants. Après les bijoux gastronomiques catalans, hallucinantes tapas de Barcelone ou impeccables parilladas du Restaurant de la Plage à Cerbère, je crains toujours de ne pas m’enthousiasmer suffisamment pour notre quotidien. Erreur maintes fois constatée. Cette année par exemple, l’allégresse vient de Meatmarket, joli estaminet ouvert par un groupe de joyeux drilles ébouriffés manifestant une foi sans limites envers leur produit et l’avenir de la restauration en général au Québec, au Canada et dans le reste du monde industrialisable.

À l’heure où le légume fait loi et où il est de bon ton de suçoter des algues, que de sympathiques jeunes gens décident d’ouvrir un truc baptisé Meatmarket relève d’un optimisme remarquable. Sans parler d’un solide sens de l’humour quand on pense à l’évolution des relations filles-garçons en ce début de 21e siècle. Même si je me soigne, je me sens souvent un peu dépassé devant ces accès occasionnels de métrosexualité manifestés par la génération montante de restaurateurs.

Le Meatmarket plaira à tout gastronome curieux, amateur de branchitude plateauesque. Le décor est plein de petites trouvailles amusantes, et les grands tableaux de Jean-François Lantagne contribuent à l’élévation de l’esprit. C’est petit, cool, décoration intérieure tendance néo-Ding & Dong; musique très chill, urbaine. La faune? Ils sont jeunes, ils sont beaux, ils sentent bon le sandwich chaud; quelques baveux aussi, à l’attitude volontairement face à claques. Mais tout le monde finit toujours par sourire et se donner viriles accolades et grandes tapes dans le dos comme dans les clips de MTV.

Dans les assiettes, le divertissement est tout aussi complet. Et réussi. On aborde le thème de la viande avec fraîcheur et, comme les gens en cuisine semblent vouloir partir avec de très bons produits, le résultat est impressionnant. Le talent est là, ça va sans dire.

Sandwichs frais, salades-repas, grillades et autres gourmandises, la production locale est impressionnante. Tout comme l’ardeur de ses concepteurs. Très tendance aussi, le comptoir de produits maison. Et quand c’est bon comme ici, la tendance est bienvenue.

À midi, pour une petite dizaine de dollars, on peut se lécher les doigts en savourant un Polloloco (poulet grillé maison, tapenade d’olives vertes, tomate, laitue et mayonnaise) ou un Over-the-Top (dinde fumée, bacon, cheddar américain, concombre à l’aneth, miel-citron-Dijon) tout aussi divertissant. Et faire suivre le tout d’un sorbet au chocolat qui meublera vos rêves les plus érotiques pendant des lunes.

La créativité des jeunes propriétaires ne se limite pas aux noms exotiques dont ils ont affublé leurs sandwichs ou hambourgeois – Here’s the Beef, Country Cowboy, East Meats West, Cuba Libre ou Mardi Gras. L’originalité de la conception est soutenue par la qualité de la réalisation de ces beaux sandwichs. Même si l’on n’est pas un inconditionnel de Lucy Liu, on sort en effet rarement indifférent d’une soirée passée en compagnie d’un Shanghai Nights (poulet grillé, marinade gingembre et sésame, mayo japonaise épicée); belle grillade et saveurs déridantes. Ou, pour les amateurs du genre, d’un tête-à-tête avec un Stampede (bavette grillée, marinade zeste de citron, mayo pesto) qui rappelle toute l’émotion ressentie à Calgary le jour de la finale de ce monument culturel ouest-canadien.

Tous ces plats – y compris les splendides grillades (filet de porc grillé, poitrine de poulet, bavette ou entrecôte AAA) – sont servis accompagnés de frites, de salade maison ou de légumes du jour. Ce qui part, bien entendu, d’un bon sentiment. Toutefois, si vous aimez votre frite un peu dodue, replète sous la dent, souple et croustillante, vous devez repasser, la version proposée ici étant sèche et rabougrie, sorte d’allumette revue et mal corrigée par un comptable tatillon. Dommage, pour l’instant. Nul doute que, dynamiques et entreprenants comme ils sont, les proprios rectifieront la chose sans tarder. Merci d’avance.

Meatmarket
4415, boulevard Saint-Laurent
(514) 223-2292

Ouvert du lundi au vendredi de 11 h à 23 h et le samedi de 17 h à 23 h. À midi, comptez une dizaine de dollars par personne avant boissons, taxes et service. En soirée, emporté par l’ambiance débridée des lieux, vous voudrez vous détendre un peu; auquel cas, tout est possible, doublez, triplez ou même quadruplez.

Erratum: Une erreur s’est glissée quant aux heures d’ouverture mentionnées dans la critique de Pintxo parue il y a deux semaines. Le soir (de 18 h à 23 h), l’établissement est ouvert du lundi au samedi et non du mardi au samedi.