Restos / Bars

Mistral gagnant : Le bonheur en Provence

On se rend au Mistral gagnant pour l’ambiance, mais on se rappelle soudain que le dépaysement a bon goût… et les bonnes odeurs d’une cuisine résolument provençale.

Le peintre niçois Didier Robert a couché sur la toile les couleurs de sa nostalgie – la Montée du Château, le Clocher de St-Tropez, etc. -, ensoleillant de jaune, d’ocre, de vert et de bleu le mur de vieilles briques. Des pots empanachés d’herbes côtoient, sur une étagère, des livres qui vous racontent la Provence. Ça y est; le mot d’André Suarès me revient à l’esprit: "Le Nord vaut peut-être mieux pour la morale. Mais le Midi vaut mieux pour la vie." J’adhère. Je lève en son honneur mon kir royal, et mon amie en fait autant avec son apéro, dont elle m’a, peut-être, soufflé le nom… Sur la table, devant nous, salière et poivrière sont deux cigales muettes à côté d’une boîte ronde en fer-blanc dont on a remplacé les "pruneaux fourrés d’Agen" par des sachets de sucre. Dans les haut-parleurs invisibles, un air d’accordéon succède à la voix de Dalida. Au cours de la soirée, Salvador, Lama, Ferrat chanteront aussi pour nous… Nous nous laissons prendre au jeu, parlant d’évasions passées et d’escapades à venir. Mon premier plat est un tartare aux deux saumons – frais et fumé, grossièrement hachés, comme il se doit, avec juste ce qu’il faut d’épices et de citron. Il s’accompagne d’une petite salade que j’aurais eu tort de négliger car, bonne en soi, fraîche et croquante, elle permet en outre d’atténuer l’excès de sel du saumon fumé. Mon amie n’avait pas choisi d’entrée, préférant tromper sa faim à l’aide de quelques bouchées de pain humectées de la "trempette" classique d’huile d’olive et de vinaigre balsamique. Alors, c’est d’un appétit presque vierge qu’elle attaque sa copieuse bouillabaisse provençale, hérissée de moules, où se bousculent crevettes, pétoncles et poissons dans un bouillon safrané et velouté fleurant bon les herbes. Elle a ses croûtons à l’ail, sa rouille et son rosé (Billette). Que désirer de plus? Je suis quant à moi plus "terrien": des ris de veau moelleux, mouillés d’une abondante sauce brune. En plus d’un tronçon de chou-fleur, d’un gratin dauphinois, de carottes douces et trapues, l’assiette est jalonnée de grosses morilles qui font sensuelle chaque bouchée. Les plats eux-mêmes nous imposent le rythme indolent qui leur sied, et nous savourons béatement, mon amie et moi, le plaisir étale du fada. Nous déclinons l’offre d’un dessert. Trop fatigant… Arrivent nos cafés (avec pastis, pour mon amie). Et ce moment-là, nous l’étirons comme un long, très long point d’orgue.

Mistral gagnant
160, rue Saint-Paul
(Québec) Québec
Téléphone: (418) 692-4260
Menu du midi: 10,95 à 14,95 $
Table d’hôte: 20,95 à 31,95 $
Souper pour deux (incluant boissons et taxes): 94,50 $

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LE PRINTEMPS DES RELAIS ET CHÂTEAUX

C’est le thème d’une soirée hors du commun soulignant l’affiliation de trois nouveaux membres à la chaîne Relais et Châteaux: Initiale, Toqué! et Panache. Les invités de Toqué! avaient célébré l’événement la veille, à Montréal. Québec reçoit, ce soir, dans une ambiance qui conjugue avec bonheur élégance, raffinement et simplicité. Cela débute au Panache par un cocktail au cours duquel prennent tour à tour la parole, entre autres, M. Robert Gagnon, vice-président du conseil d’administration, et M. Jaume Tápies, président international de la prestigieuse chaîne. Nous nous attablons un peu plus tard pour commencer notre repas progressif par la cuisine du chef François Blais. D’abord, des pétoncles en coquille dans une vinaigrette au citron confit et champagne, suivis d’une seconde mise en bouche: huîtres Saskaya, pochées dans leur jus avec un peu de champagne, sur sabayon au champagne et gin. Et l’entrée s’amène, digne de ce qui a précédé, digne aussi du Pommery qui coule à flots: foie gras au torchon en croûte de poivre et orange, canneberges séchées, chutney de canneberges et pomme, brioche maison à l’orange confite. Puis c’est le départ pour le restaurant Initiale, où le talent du chef Yvan Lebrun prendra la relève. Quatre services dignes des grands jours! "L’attente", soit des tranches de granny smith et crabe assaisonné, aubergine à la flamme, boudin noir et sarrasin, dés de carrelet aux châtaignes, raisins verts et maniguette; "Morue d’Islande juste saisie", navet à la croque au sel, casse-croûte au raifort et condiments; "Veau de la ferme Matalik", jarret braisé et céleri lustré aux arachides, foie frit à la pomme de terre et ris au beurre noisette; enfin la "Pâte de pamplemousse rose", avec crémeux au sirop de pissenlit et pommes poêlées. Nous terminons joyeusement par un cognac Hennessy XO, après la succession des vins dont on a baptisé chacun de ces doux moments – Chardonnay 2002 (Inkameep Cellars), Riesling 2001 Cuvée Jupiter (Pfaffenheim), Divinus de Château Bonnet 2001 (André Lurton). Notre félicité n’aurait pas été complète sans le professionnalisme et l’extrême gentillesse du personnel de ces établissements dignes en tous points de leur nouvelle affiliation.