Il y a des endroits comme celui-ci où l’on vient et revient presque instinctivement: quand on a faim de poissons grillés arrosés simplement d’une giclée de jus de citron, quand on veut manger de la pieuvre tendre et goûteuse et que l’on n’a pas une fortune à consacrer au repas. En Grèce, on appelle ça "Taverna", par opposition à "Restaurant" qui rime souvent avec coupe-gorge pour touriste dans la belle patrie d’Agamemnon.
La Rôtisserie Panama est ce genre de maisons où, à la fin du repas, on a envie de se lever et de casser quelques assiettes sur le sol pour manifester son contentement. On a envie d’être Grec pour danser le sirtaki, prendre un petit verre d’ouzo et chanter avec les tablées voisines. Il faut aussi préciser que le sourire est prodigué ici avec générosité et que cette amabilité tend à créer une atmosphère très festive midi et soir, et ce, quel que soit le jour de la semaine. À l’occasion le patron est un peu bougon, mais il faut s’y faire, le patron grec est souvent un peu bougon par nature, mais s’entoure de personnes souriantes qui équilibrent le tout et ramènent la balance côté soleil.
Rien dans ce restaurant de la très multiethnique et hétéroclite rue Jean-Talon pour révolutionner la gastronomie ou votre perception de la chose. Mais tout, par contre, pour vous rappeler combien la cuisine du terroir – celle qui existait avant que l’expression devienne à la mode et nous soit servie à toutes les sauces – est satisfaisante. Et le terroir grec, comme nous le savons tous, est le père de tous les terroirs. Si vous ne le savez pas, prenez n’importe quel Grec ami et demandez-lui; il va vous le rappeler. En fait, il va vous le rappeler même si vous ne le lui demandez pas.
La satisfaction du client ne vient pas seulement ici du gigantisme des portions, mais beaucoup de la simplicité des propositions. Simple comme dans: prendre une courgette et une aubergine bien fermes, les couper en tranches fines, les paner légèrement et les jeter quelques secondes dans l’huile; éponger, servir. Simple comme dans: couper en gros morceaux une belle tomate bien mûre; épépiner un concombre, le débiter en bouchées; mélanger les légumes avec quelques cubes dodus de fromage feta; saupoudrer d’origan et arroser le tout d’huile d’olive et de jus de citron.
On déguste ici des mézédès, ces entrées grecques, déclinées ailleurs sous les noms de tapas, mezes, pintxos et autres petits plats pour allumer votre appétit et que l’on partage souvent en assortiments avec les convives autour de la table: skordalia (purée de pommes de terre et ail); tzatziki (yogourt généreusement aillé, dés de concombre et goutte de jus de citron); petits piments gentiment épicés; grosses fèves de Lima; taramosalata (caviar de carpe, huile d’olive, jus de citron et un peu d’oignon).
Côté plats principaux, la carte de la Rôtisserie Panama regorge de plats rustiques et satisfaisants. Gros morceaux de poulet et beaux poissons à l’oeil pétillant passés sur le grill, côtelettes d’agneau, de porc ou de veau.
Si vous vous réussissez à vous rendre jusqu’au dessert – ce que les accompagnements des plats principaux rendent quasiment impossible, riz et patates constituant le nec plus ultra de l’étouffe chrétien -, optez pour le traditionnel yogourt au miel ou les loukoumades, ces gros beignets frits nappés de miel et saupoudrés de graines de sésame, servis ici croustillants.
Rôtisserie Panama
789, rue Jean-Talon Ouest
514 276-5223
Ouvert tous les jours dès 11 h. Fermeture à 23 h du dimanche au jeudi et à 1 h du matin les vendredi et samedi. À midi comptez une trentaine de dollars pour deux personnes avant boissons, taxes et pourboire. Le soir, en supposant que vous succombiez aux multiples appâts de la maison, préparez un joli petit brun et vous roulerez jusqu’à votre voiture.