Restos / Bars

Charbon : Effet boeuf!

Si le Charbon demeure le meilleur steak house en ville, il peut aussi s’enorgueillir de posséder une carte des vins qui ferait l’envie de plusieurs.

J’ai déjà dit de cet établissement qu’il était "un temple dédié au culte de la viande". Je m’y présente donc aujourd’hui avec une ferveur digne d’elle, bien préparé par une faim de plusieurs heures et l’esprit libre de toute végé-pensée. On nous place, mon invitée et moi, à une grande table bordant une fenêtre qui nous livre un pan de paysage – la terrasse et ses jardinières suspendues, un palmier nain et, plus loin, une agitation de la rue qui semble appartenir à un autre monde. Nous trinquons – Boris contre Heineken – et entamons les libations sans quitter des yeux le bréviaire du carnivore: "coupes de monsieur Tremblay" (mignon de boeuf, steak New York, boston de boeuf), filet de porc grillé (sauce poivre vert et abricot), tartare de filet mignon, "le haché du Charbon" et autres grillades. Je m’arrête pour la forme aux crevettes, sandwich au rosbif, penne au thon et palourdes, filet de doré poêlé en croûte de maïs (salsa rosa, jeunes pousses de laitues, émulsion de basilic). Je passe commande dans les meilleurs délais et, trop pressé d’en arriver au steak, j’en oublie de mentionner une entrée. Notre serveuse me le rappelle en souriant et je me décide pour la mousse de foie de volaille au porto. Cette dernière, semblable à une meringue chocolatée, m’est présentée avec deux toasts aux raisins, une petite salade et des confitures (oignons et carottes). Elle n’est pas désagréable, mais le goût du porto en est vraiment absent. Et il lui aurait fallu, peut-être, une petite pincée de sel. Cela prépare tout de même bien l’estomac, comme le fait, de l’autre côté de la table, la crème de betteraves jaunes – de bon goût, mais pas assez crémée, selon moi, et "parfaite" selon mon invitée. De temps à autre, l’une des serveuses s’approche de notre table pour s’assurer que tout va bien. Quelques minutes plus tard, c’est l’arrivée de la viande! Une obsession? Bien sûr; je ne m’en suis jamais caché. Un faux-filet grillé, donc. Et puis, tout autour, une sauce périgourdine dont j’humecte de temps à autre l’une des excellentes frites servies en garniture avec des portobellas, du brocoli… Puis-je encore dire le mot? Viande. Goûteuse, vieillie à point, tendre, juteuse et, plus que tout, bien marquée au fer et rosée à l’intérieur. Même le gras se mange – c’est du moins ce que je fais. J’en oublie ma bière. Mon invitée, elle, a opté pour le torride: des pepperettes extrafortes, servies sur une choucroute (pas trop acide) truffée de petits lardons, escortée de frites, de moutarde et de ketchup. Je comptais finir par un café. Mon invitée en demande un aussi, mais avec "une petite tuile aux amandes". Ce sont plutôt deux grandes tuiles ajourées qu’on pose bientôt devant nous, accompagnées de quelques morceaux de fruits en salade. Délicieux sacrifice.

Charbon
450, rue de la Gare-du-Palais, Québec
Téléphone: 418 522-0133
Menu du jour: 12 à 25 $
Table d’hôte: 33 à 57 $
Dîner pour deux (incluant boissons et taxes): 47,15 $

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LOUABLES TENTATIONS

Avec autant de justesse que d’élégance, le chef Jean Soulard présente le livre de recettes que vient de publier Marie-Chantal Lepage: Marie-Chantal Lepage, chef au Château Bonne Entente. On ne peut résister à la tentation de citer un extrait de cette préface: "L’assiette qu’elle dresse est le fruit de la vie, avec ses rêves, ses excès, ses envies. Sensible à la beauté, Marie-Chantal élabore une cuisine passionnée qui se décline au féminin, dans l’humilité et l’amour du travail bien fait." Après avoir lu cela, comment ne pas succomber à une autre tentation? Celle de s’installer confortablement pour parcourir ces pages illustrées de photographies salivantes signées Tango. Il ne s’agit que d’entrées: non pas de simples bouchées qu’on improvise avec ce qui nous tombe sous la main, mais de véritables créations qui, chacune à sa façon, témoignent d’un goût sûr et d’un incontestable savoir-faire. Deux ou trois d’entre elles vous feront tout un repas. On ne s’improvise pas chef: Marie-Chantal Lepage a bûché pour le savoir et mérité ses galons, au pays comme à l’étranger. Outre la préface et l’introduction, l’ouvrage comporte sept chapitres consacrés respectivement aux "Salades, soupes et légumes", "Entrées de volaille", etc. Il se termine par un index détaillé suivi du mot… "Faim". Après pareille lecture, ce dernier mot agit comme un message subliminal: on reprend le livre à partir du début, car on veut se concocter pour le soir même l’osso buco de lotte rôtie ou la crème d’oursin et poêlée de foie gras caramélisée au sésame, sinon les croustillants de saumon en feuilles de basilic, les ris de veau poêlés à l’hydromel. Le choix ne sera pas plus facile en ce qui concerne les desserts!

Marie-Chantal Lepage, Marie-Chantal Lepage, chef au Château Bonne Entente, Montréal, Les Éditions de l’Homme, 2006; 120 pages.