Restos / Bars

M sur Masson : Minuscule, Magnifique et Mignonne Maison

Après le F, le G, le S et le W qui fleurissent Montréal, voici le "M", bistro de quartier qui réveille la rue Masson.

Il y a des gens que l’on aime voir au travail. En plus de s’agiter consciencieusement derrière leurs casseroles, ils possèdent le talent et la passion qui distinguent les très bons dans chaque corps de métier. Quand on va au restaurant, il y a aussi des endroits que l’on affectionne particulièrement; on s’y sent bien, quelles que soient les circonstances. On y découvre de nouvelles recettes, d’autres mises au goût du jour, des manières originales de préparer des plats que l’on pensait connaître. Sans parler des classiques qui y sont religieusement mitonnés avec une stabilité touchante.

Le M sur Masson possède tout ça et plus encore. Dans la lilliputienne cuisine au fond du restaurant s’agitent Jean-François Vachon et Martin Filiatreault; lilliputienne est un doux euphémisme tant les murs sont proches les uns des autres et semblent ne laisser de libre qu’un étroit couloir. Par contre, ce couloir mène à de vraies belles assiettes, des choses pleines de vie et de bonne humeur apportées par Philippe Lisack, dernier élément du triumvirat en activité à cette nouvelle adresse.

Un midi, pour quelques dollars, le bonheur s’est présenté sous les traits d’une soupe du jour, d’un poisson rôti et d’un joli dessert. À 20 dollars, le trio est une aubaine puisque l’on parle ici de cuisine au sens noble du terme. Si l’on trouve que c’est cher, on peut toujours se rabattre sur le hot-dog et la poutine du coin de la rue, qui sont moins onéreux, mais on sera tôt ou tard forcés d’appeler le vétérinaire après en avoir consommé.

Une très pimpante soupe de fenouil, tomate et basilic; un petit flétan rôti, servi avec purée, quelques asperges croquantes et une belle vinaigrette de tomate séchée; et, pour clore le tout, une soupe de fraises au basilic, rafraîchie avec un sorbet au citron.

En soirée, trois plats dignes de mention: poêlée de chanterelles, quelques dés de jambon, des petits pois (et non les gourganes annoncées au tableau noir) dans un croquignolet bouillon. Poulet de Cornouailles (en fait, un demi-poulet, heureusement pas trop rétréci au lavage) grillé impeccablement et alangui sur un lit de pâtes au beurre et herbes fraîches. Plat simple et parfaitement adapté aux circonstances. Et pour finir cette trinité gastronomique, une superbe soupe de poissons, servie dans un plat aux proportions pantagruéliques; de beaux morceaux de lotte, de flétan, de thon et de homard, un bouillon tomaté, très safrané et relevé avec retenue. Tout est là pour assurer le plaisir des sens: senteurs marines, festival de couleurs et clapotis de tous les éléments lorsqu’ils se présentent devant le client affamé.

Les gens du quartier qui ont fui le Plateau surembourgeoisé et hors de prix seront à juste titre enchantés de découvrir ce nouveau voisin et sa vingtaine de places assises. Des ajustements seront sans doute apportés rapidement (desserts ternes par rapport au reste du repas, carte des vins un peu mince, portions exagérément généreuses pour certaines entrées), mais déjà la rue Masson prend des airs de fête gastronomique. Et, au-delà des très belles réalisations en cuisine, on remarque tout de suite la grande amabilité du personnel et l’on apprécie la qualité des rénovations, qui donnent une si belle petite adresse dans un coin de la ville qui en manque cruellement.

Il y a quelques années, on avait apprécié le travail du trio Vachon, Filiatreault, Lisack à La Bastide, ce très joli petit resto qui éclaira la rue Bernard quelque temps. On retrouve aujourd’hui au M, leur propre maison, tout ce qui faisait le plaisir de s’asseoir à La Bastide. Entre autres et avant tout, une cuisine très soignée et pleine d’allant. Gourmets et gourmands feront dorénavant le détour avec joie pour une halte rue Masson.

M sur Masson
2876, rue Masson (entre la 5e et la 6e)
514 678-2999

Ouvert à midi du lundi au vendredi et en soirée du lundi au samedi. Brunch les samedi et dimanche. À midi, comptez une quarantaine de dollars pour deux personnes avant boissons, taxes et pourboire. Le soir, doublez. Après le repas, si tout s’est aussi bien passé pour vous que pour nous et que vous voulez remercier Les Plus Hautes Autorités de Leur Bienveillante Sollicitude, l’église Saint-Esprit est juste en face.