Restos / Bars

Diêp : Le tour du Viêt Nam en quatre-vingts minutes

L’avènement d’un nouveau restaurant vietnamien, fût-ce rue Saint-Denis, ne nous donne plus de palpitations, sauf peut-être lorsqu’on réussit d’emblée à piquer notre curiosité.

Dans ce cas, ce sont les spécialités régionales annoncées qui font saliver le voyageur sédentaire. Tiens? Nous proposerait-on autre chose que les grillades et les soupes que préparent les adorables petits bouibouis qui font désormais partie de notre ordinaire et qui, été comme hiver, nous sont essentiels?

Oui et non. On retrouve un certain nombre de suspects habituels, mais le menu nous réserve tout de même de belles surprises, assez sans doute pour justifier quelques visites. De quoi s’offrir son tour du Viêt Nam sans trop (se) dépenser.

On a affaire à une salle au décor soigné, signé, nous a dit le serveur, par la femme du chef. Un long miroir camoufle habilement l’exiguïté des lieux (il n’y a qu’une vingtaine de places), que prolonge une terrasse. Les tables sont joliment dressées, et on a même droit à des nappes et à des serviettes en tissu.

En entrée, la maison propose un petit éventail de rouleaux. Les rouleaux impériaux comme les rouleaux printaniers témoignent du savoir-faire voulu. Plus intéressant est le rouleau au porc grillé du chef. Ici, une languette de porc barbecue remplace les habituelles crevettes coupées en deux. Pour changer de la routine, on peut également choisir une salade de boeuf grillé sur lit de cresson. Proposition toute simple où des tranches de viande très tendre reposent sur du cresson croquant à souhait. Le plat s’accompagne d’une intrigante petite sauce très poivrée, au goût à la fois acide et légèrement amer.

Parler de soupes vietnamiennes, de nos jours, c’est un peu comme parler de religion ou de politique. Dès qu’on s’ouvre la trappe, on tombe dedans. Disons simplement que les tonkinoises au boeuf et au poulet m’ont convaincu. Bouillon aux parfums prononcés pour la première et au goût intense pour la seconde. Je réserve le reste de mes commentaires à mon confesseur. À souligner aussi, une agréable salade jardinière nappée d’un bonne vinaigrette toute fraîche.

Les plats principaux sont servis dans de belles grandes assiettes. Dans le registre des classiques, on propose une poitrine de poulet grillé à la citronnelle. La viande, que le chef marque savamment au gril, est savoureuse et un peu sèche, d’où sans doute les cuisses désossées qu’on rencontre plus souvent dans ce genre de préparation. L’assiette est garnie d’un beau choix de légumes sautés et, naturellement, d’un bol de riz de bonne facture.

Même présentation et même remarque pour le saumon poêlé à l’ail. Le poisson aurait gagné à être un peu moins cuit, lui aussi, même s’il s’est laissé manger agréablement. Plus réussies étaient les crevettes géantes aux échalotes: de beaux gros crustacés sont grillés de main de maître dans leur écaille, ouverts en papillon et recouverts d’un hachis d’oignons verts. La chair, qui se détachait sans trop de mal, était à la fois juteuse et succulente. On oublie parfois que les Vietnamiens sont de véritables poètes du gril.

En revanche, ils négligent un peu les nouilles, si on excepte les soupes, évidemment, et les nouilles frites, formées ou non en nid d’oiseau. Ici, on les poêle et on les sert avec du boeuf et des crevettes sautés aux légumes. Ce qu’il y a de particulier, c’est que les nouilles, qu’on fait croûter en dessous, restent moelleuses au centre, un peu sur le principe des röstis. Amusant et pas banal, quoique, avec les baguettes… bonjour, les dégâts!

La maison est encore jeune, et c’est peut-être ce qui explique le maigre choix de desserts. Le soir de notre visite, il n’y avait que des sorbets (ce qui n’est pas un mal en soi), auxquels nous avons préféré un de ces exquis cafés glacés, sucrés au lait condensé. Succédané idéal à un dessert.

À noter le service, extrêmement sympathique. Difficile cependant d’en mesurer l’efficacité puisque, le soir de notre visite, il n’y avait pas grand monde. On verra à l’usage. Car il faudra revenir, ne serait-ce qu’afin de terminer le périple.

À midi, comptez une vingtaine de dollars pour deux, avant les taxes, le pourboire et le service; le soir, environ le double. La table d’hôte du soir en particulier offre un bon rapport qualité-prix. Vous apportez votre vin.

Bémol: Carte des desserts trop courte.

Dièse: Un vietnamien "moyen de gamme" proposant quelques plats hors du commun.

4118, rue Saint-Denis

514 844-1260