Restos / Bars

La Binerie : D'amour et de fèves au lard

La Binerie: nombreux sont les vacanciers qui, en montant vers le nord, font l’arrêt obligé à Kazabazua pour acheter… des fèves au lard! Virée automnale au paradis de la bine.

Pour notre pèlerinage annuel au très sympathique Festival Images et Lieux de Maniwaki, j’avais promis à Méli de lui faire découvrir la Binerie. Comme plusieurs, elle avait entendu parler, encore et encore, de cette Haïtienne qui fait cuire ses bines dans le sable, mais elle n’y était jamais allée. J’en conviens, on ne passe pas tous les jours par Kazabazua, mais il faut, au moins une fois, faire le détour.

Une petite cabane en bois rond. Tout à côté, une maison bleu pâle. Et entre les deux un abri de bois et de tôle, où fume la braise encore chaude. On pousse la porte de la cabane et on est aspirées dans l’univers de Marcelin et Sauphonie. Lui, originaire de Farley, au nord de Kaz, a 85 ans; elle, née à Jacmel, à Haïti, en a 49. Dès qu’il l’a vue, dans son île antillaise, il y a plus de 25 ans, il est tombé amoureux fou. Il lui aura fallu trois ans et trois mois bien comptés pour la convaincre de l’épouser et de le suivre au Canada. Et elle ne regrette rien. Les regards qu’elle porte sur "Papa" sont empreints d’une immense tendresse pour cet homme à qui un récent AVC n’a pas fait perdre son humour: "Des fois, elle me dit que je suis beau: je la crois pas… mais ça me fait plaisir!" s’amuse-t-il à répéter!

C’est elle qui nous accueille, en ce samedi matin, dans le sympathique fourbis de son commerce. Quelques tables encombrées, un comptoir où trônent contenants de fèves au lard et sculptures haïtiennes. La veille, comme tous les jours, elle a préparé ses célèbres bines: trempage des fèves, préparation des grandes casseroles de fonte dans lesquelles le lard, les fèves et quelques ingrédients secrets sont mélangés. Les casseroles sont ensuite enfouies dans le sable et recouvertes de braise chaude. Il est souvent près de minuit quand Sauphonie arrive à cette dernière étape. Elle va dormir, laissant à la nuit le soin de faire le reste du boulot. Dix à douze heures plus tard, vous pouvez goûter les meilleures fèves au lard à des lieues: juste assez fermes, pas trop sucrées, un tantinet épicées.

"Mais pourquoi les fèves au lard?" avez-vous envie de demander – comme je l’ai fait – à la charmante Sauphonie. Parce qu’il y a 18 ans, quand ils ont acheté ce petit commerce, les bines étaient nettement plus populaires que la cuisine créole… Les ingrédients de base sont faciles à trouver et peu coûteux. Marcelin lui a enseigné la technique de cuisson traditionnelle des autochtones, et elle s’est lancée dans l’aventure. Si ses premières expériences furent douteuses – demandez-lui de vous parler de son premier chaudron de bines "aussi noires que son père!" -, toutes ces années lui ont permis d’atteindre un sommet dans l’art de la fève au lard!

De mai jusqu’à la fin décembre, vous pouvez donc vous procurer les bines de Sauphonie. Un grand contenant vous coûtera 7,95 $; 4,25 $ pour un petit. Elles survivent très bien à la congélation; faites-en provision pour les déjeuners de bûcherons du temps des Fêtes! Le reste du menu offert sur place – hot-dogs, burgers et autres poutines – n’a rien qui vaille le détour, mais pour découvrir l’univers de Sauphonie et Marcelin on ferait bien des kilomètres.

La Binerie
770, route 105
Kazabazua
819 467-4848

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PETITE ANNONCE: mercredi dernier, le restaurant Par-fyum célébrait la fin de l’été…et l’arrivée du chef réputé Stephen Vardy, anciennement de Beckta. Un nouvel élan plein de promesses pour le restaurant de la promenade du Portage. Une aventure à suivre!