Il y a presque six ans, l’originalité de cet établissement avait attiré mon attention et j’en avais dit beaucoup de bien. C’était alors un tout petit café niché sous l’escalier d’un centre commercial – et qui porte encore aujourd’hui ce nom évoquant un conte de fées. Des thés choisis, d’excellents cafés, des sandwichs maison, des biscuits et quelques friandises constituaient l’essentiel de sa carte. Au fil du temps s’y sont ajoutés des mets un peu plus élaborés qui, sans prétendre à la haute gastronomie, témoignent d’une cuisine plus qu’honnête. On a pu voir grossir sa clientèle qui, peu à peu, finit par occuper presque tout le hall d’entrée. D’où l’urgence d’un réaménagement: une salle à manger d’une quarantaine de places, sobrement meublée, accueille maintenant les clients. Tout au fond, un grand miroir où vous vous voyez arriver; mur rouge et mur blanc se font face. Sur une cimaise, deux coqs en bois se font face, eux aussi – une collection de cafetières les suivant comme des poussins. L’arrivée récente d’un jeune chef lyonnais vient encore diversifier le paysage – tartiflette et autres spécialités. On serait alléché à moins. Nous voici donc, ce soir, installés à l’une des tables carrelées de mosaïque. Avant les "cafés et plaisirs chauds", les biscuits, muffins et grenobloise, il y a là toutes sortes de paninis: jambon-fromage, charcutier (jambon, salami hongrois, rosbif et fromage), thon, fromage de chèvre, poulet mariné; les salades sont au brie, au poulet, au thon, tandis qu’on vous propose, pour les sandwichs, toutes sortes de garnitures. Nous passons outre la rubrique des petits déjeuners – ce n’est pas le moment, et notre faim commence un peu à ruer. Mon amie commence par choisir une "salade Jacques" tiède, au poulet mariné. J’hésite encore un bon moment – un peu distrait par la voix de Joséphine Baker chantant La Petite Tonkinoise – avant de me décider pour un panini au brie et agneau fumé du Québec. Nous commençons tous deux par un potage parmentier, fumant, velouté et sans grumeaux, à base d’un délicieux bouillon assaisonné sans excès. D’infimes éclats de carottes, de bacon, de tomates et de poivrons s’attachent aux morceaux de pommes de terre qui résistent à peine sous la dent. Les bols ne sont petits qu’en apparence. Quelques minutes après avoir commandé, mon amie s’était ravisée et avait plutôt opté pour une "salade valencinoise" (du nom d’une banlieue lyonnaise) dont la description l’avait quelque peu impressionnée. "Pouvez-vous tout de même y rajouter un peu de poulet mariné?" avait-elle demandé à celle qui nous sert. Ce qu’on lui apporte donc maintenant a de quoi surprendre les moins impressionnables. De loin, on dirait un kouglof. L’imposante salade est en effet couronnée de morceaux de poulet répartis sur un épais lit de champignons grillés. Des croûtons maison à l’ail, des oignons, de gros morceaux de concombre, de savoureux lardons (dont je ne me prive pas), des noix de Grenoble et des cubes de cheddar s’abritent un peu partout sous les laitues et feuilles de chêne luisantes de vinaigrette (encore maison). De beaux quartiers de tomates y rougeoient. "Vraiment bien mariné, le poulet!" Évidemment, je goûte avant de pouvoir acquiescer. À ce train-là, mon panini risque de refroidir. La première moitié laisse déborder une large langue d’agneau fumé; je l’attaque par là. Le brie encore tout chaud tente de filer en douce par le bas; je le stoppe net. Une salade complète mon assiette, semée de luzerne et cloutée d’un petit cornichon. J’ai aussi droit à un quartier de tomate, à des concombres… mais je reviens à l’agneau. Fines tranches, mais nombreuses; fumées juste assez, pas trop salées. Elles ajoutent du goût au brie qui, je l’avoue, n’est pas de mes fromages favoris – je préfère les corsés. J’entame la deuxième moitié en me demandant si elle va subir le même sort que la précédente. La faim a eu son compte; l’appétit aussi. À la gourmandise de jouer maintenant son rôle. Elle fait la sourde oreille, je la secoue un peu, elle s’ébranle et, tout à coup, prend la clé des champs. Je ne lui cours pas après, préférant écouter la voix de Brassens qui vient de relayer celle de Piaf. Une fois nos assiettes reparties et nos cafés commandés (un "spécial" pour ma compagne), on nous apporte une petite assiettée de chocolats fins, de truffes et de caramels au beurre. La panique doit se lire sur nos visages… "Vous pouvez les emporter", nous dit-on. Nous ne nous faisons pas prier.
Isabelle la Cafetière
2880, chemin des Quatre-Bourgeois
Sainte-Foy (Québec)
Téléphone: 418 651-9007
Repas complets à prix variés
Repas légers à partir de 6,95 $
Souper pour un (incluant boissons, taxes et service): 29,25 $