En ce samedi soir, on retrouve derrière l’inox des cuisines ouvertes la très talentueuse chef Phoebe Sutherland, copropriétaire, avec son mari Warren, de ce resto atypique. Car bien que les cuisines de toutes les cultures aient envahi nos assiettes, celles des nations autochtones se font bien discrètes.
Des murs aux couleurs chaudes, à dominance ocre, exhibent des oeuvres d’artistes autochtones; un mobilier élégant crée l’équilibre entre la tradition et la modernité. Le service est jeune, pas toujours à la hauteur de la cuisine – le français y est pour le moins… difficile à suivre! -, mais demeure fort sympathique.
Cerner les Sutherland, c’est partir à l’aventure: elle est Crie, originaire de la Baie-James et finissante du collège Algonquin; lui est Jamaïcain, d’abord destiné à une carrière d’ingénieur électrique… Menés par leur passion pour la cuisine, ils se sont rencontrés au New England Culinary Institute, au Vermont, d’où ils sont ressortis diplômés… et amoureux! Leur menu, changeant au fil des saisons, propose gibiers, poissons et légumes qui ont fait le quotidien des communautés autochtones d’ici et d’ailleurs, dans des interprétations qui transcendent la tradition.
En entrée, beignets de homard, relish de maïs et crème fraîche à la coriandre sont sans surprise, mais bons, alors que le ragoût de champignons d’inspiration navajo, sur lequel trône un baluchon de chèvre aux herbes qui, en fondant, se mêle aux saveurs automnales des champignons sautés est une vraie balade en forêt dans votre assiette – un plaisir dont je ne me lasse pas! Je fais suivre du plat du jour: lapin farci de prosciutto et sauge (inspiration tout italienne!), servi sur des spätzle aux herbes et bette à carde, et déglacé au cidre. Cuisson sûre, bel équilibre sucré-salé – et, ayant été Munichoise dans une autre vie, je leur lève mon chapeau pour leurs spätzle (petites pâtes maison) irréprochables. Mais c’est assurément le caribou du Nunavut dans son jus au vin rouge et aux herbes, avec marmelade d’ail, purée de pommes de terre et haricots fins, qui marquera la soirée. Une viande tellement tendre, fondante et goûteuse que mon homme ne se résignait pas à engouffrer la dernière bouchée! Un réconfortant pouding au pain au rhum de la Jamaïque viendra clore en beauté ses agapes réjouissantes.
Un souper pour deux va chercher dans les 80 $, avant vin, taxes et pourboire. Pas donné… mais ô combien mérité!
Sweetgrass Aboriginal Bistro
108, rue Murray
Ottawa
613 562-3683; 1 800 327-9338
www.sweetgrassbistro.ca
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PETITE ANNONCE: Toujours pour renouer avec nos racines, je vous propose une virée au Festival des récoltes de Wakefield, en collaboration avec la boutique d’art autochtone Khewa, samedi et dimanche (7 et 8 octobre). Une grande fête où seront mises à l’honneur les traditions autochtones des récoltes, en collaboration avec les agriculteurs et éleveurs de la région. Cérémonies traditionnelles dès 7h, rencontres d’artistes, danses au son du tambour, marché Molokai les midis, et grand festin préparé par le talentueux chef Alain Bélair, en collaboration avec la ferme de sangliers Par Toutatis, le dimanche, dès 18h (11 $/personne). Accès au site: 4 $/adulte; 2 $/enfant. Une partie des revenus ira à l’école publique de Wakefield en vue d’activités culturelles et écologiques pour les enfants. Info: (819) 459-2112 et www.khewa.com (C.Moisan)