On dit "viande", et je me retiens pour ne pas applaudir. Viandeux je suis, donc, et fier de l’être. Ce qui me ramène de temps à autre dans ce restaurant? Comme tous ses clients, peut-être, une vague nostalgie d’un temps – celui du Deauville – que le Rascal a figé dans son décor de Tiffany (torchères ou lampes suspendues), de banquettes rouges où l’on s’éternise pour siroter une bière et s’éveiller l’appétit avec des têtes de champignons à l’ail ou un avocat farci aux crevettes, avant de faire honneur au plat-vedette de la maison: la côte de boeuf au jus. La salle est immense et, comme toujours, presque bondée. Les clients se succèdent à un bon rythme, les serveuses vont et viennent, bouteille de vin à la main ou les bras chargés d’assiettes. De la musique? Je ne sais. J’ai l’esprit occupé par tout ce que j’imagine par avance des plats pourtant brièvement présentés sur la carte: bavette de veau, sole, crabe, filet mignon au bleu, homards de 2 à 6 livres, entrecôte, escalope de veau parmigiana, combinés filet mignon et… cuisses de grenouilles, pétoncles, crevettes ou langoustines. Sans parler de la "coupe spéciale côte de boeuf 32 onces": de quoi fantasmer un brin, non? Mon amie s’est commandé un verre de Brouilly pour donner la réplique à ma Mick’s Red. Nous sommes installés dans la verrière. À quelques pas devant moi, dans la salle même, des desserts tournent lentement dans leur armoire de verre. Plus loin, c’est le bar rutilant de bouteilles. "Encore?" s’étonne ma compagne en entendant pour la troisième fois chanter "Joyeux anniversaire" à un client ou une cliente. J’ai choisi une simple entrée de saumon fumé; la voici. Tranches fines et appétissantes, coussinées de laitue et presque ensevelies sous une abondance de câpres. Dessus, des tranches d’oignons… finissimes, comme dirait Pinard. L’huile et le vinaigre sont à la portée de la main. En face de moi, des escargots gratinés grésillent dans leur caquelon. Mon amie hésite un peu, pige au hasard et porte à sa bouche impatiente un mollusque lesté d’une longue queue de fromage gratiné. "C’est bon", déclare-t-elle dans un souffle. Puis c’est notre échange rituel de bouchées, ponctué de gorgées de bière ou de vin. Elle se commande un deuxième verre de Brouilly et accueille peu après son "rib steak" à la saucisse de Francfort. Cette dernière, fendue dans le sens de la longueur, montre par endroits sa peau fragile boursouflée par le gril. C’est par là qu’on aime attaquer. Ça croustille, et la partie plus tendre jute dans la bouche. La viande, quant à elle, tout aussi grillée, se révèle de première qualité, sapide à souhait. Il y a là des frites en abondance, pour moi aussi qui ai commandé une côte de boeuf au jus. La tranche est rose sympa, de bonne épaisseur, cerclée de cette partie, brunie par la cuisson des épices, qui empêche le gras de s’échapper. Ils sont bien là, les îlots de gras blancs ou crémeux, comme je les aime. Je les apprécie surtout quand personne à ma table ne s’avise de parler de cholestérol. On m’a déjà fait le coup, une fois, et j’avais mal mangé. Cette fois, c’est le régal. Jusqu’à plus faim.
Restaurant Le Rascal
2955, boulevard Laurier
Sainte-Foy (Québec)
Téléphone: 418 654-3644
Menu du jour à partir de 12,95 $
Table d’hôte: 17,95 à 22,50 $
Souper pour deux (incluant boissons et taxes et service): 73,15 $
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COEURS À TABLE AUX FANTAISIES LYRIQUES
En collaboration avec le restaurant Le Saint-Amour, le Nouveau Théâtre des fantaisies lyriques vous invite à venir célébrer la Saint-Valentin sous le thème "Coeurs à table" les vendredi 9 et samedi 10 février, à partir de 18h30. Cela commence par un "Prélude amoureux", suivi par l’entrée "Romance de Neptune": baluchon de crustacés aux fruits exotiques en habit de poisson fumé sur nid de mesclun et de luzerne, fine sauce à l’émulsion de mangue et citron vert. Plat principal: "Toréador, l’amour t’attend", soit un mignon de veau farci aux champignons sauvages, jus au porto, gratin de pommes de terre multicolores, farandole de légumes et flan à la courge butternut. Puis vient le "Crémeux des amoureux", variation de fromages fins du terroir et fine sélection de noix au miel de fleurs de bleuets, et vous terminez en douceur avec le "Délice de Cupidon et ses coulis" et par un péché tout en chocolat (mignardises). Seulement 75 $ par personne (taxes incluses). Renseignements et réservations: 418 832-1632.