Restos / Bars

Charles Baillairgé : Peau neuve

Chef du Charles Baillairgé, après en avoir été longtemps le sous-chef, Marc Blouin apporte sa touche personnelle à une tradition de table bien établie dans la maison.

Un peu tristounet, tout de même, le Clarendon sans le jazz! L’établissement, qu’on croyait éternellement jeune, semble avoir subitement pris un coup de vieux. De la joie, de la bonne humeur, de la vie, de l’"ambiance"? Niet. Du business, des congrès, du sérieux… On essaie de ne pas trop y penser et l’on se fait désormais à l’idée de rentrer tout de suite chez soi en sortant de table. À notre arrivée, seulement deux couples occupent la grande salle à manger. Peu de temps après, plusieurs clients arrivent et s’installent en petits groupes dans les deux parties de la pièce. Le décor n’a pas changé depuis notre dernière visite: toujours ces boiseries superbes, ces grandes photographies du Vieux-Québec des années 1920 et ces miroirs qui vous renvoient inopinément votre visage ou celui d’une cliente, ou bien la silhouette d’un serveur se précipitant, bouteille en main, vers le couple qui, près de vous, vient de commander un passe-tout-grain. Les haut-parleurs, discrets, nous jouent du Boccherini. Ce sera, un peu plus tard, du Tárrega. Au dessert, nous aurons droit à Chopin. Pour l’heure, nous errons, un peu perdus, du menu "Découverte" (7 services) aux nombreux plats à la carte, dont les "Flambés en salle" (ris de veau en feuilleté, etc.). Entre ces deux "extrêmes", la table d’hôte, prolixe, qui ne nous facilite pas le choix: baluchon aux petits légumes et chèvre crémeux, sa gastrique aux abricots; terrine de gibier du Québec, tartare de boeuf au cumin et basilic… Puis le potage; puis les plats principaux – filet de tilapia au lait fumé, simplement saisi, suprême de volaille en croûte d’herbes, mignon de porcelet au sésame (jus de viande aux effluves d’agrumes, soya et gingembre), émincé de filet de boeuf mariné, filet de sandre cuit sur la peau (salsa de mangue et ananas, poivrons doux et lavande), éventail de magret de canard… Mon invitée a presque terminé son verre de Madiran; le mien, de Stella Artois, est à moitié vide et le restera. On tergiverse, on pèse le pour et… le pour – car il n’y a pas de "contre". Puis on se décide pour ce qui avait d’abord capté notre attention. En attendant nos premiers plats, nous tentons d’amadouer notre faim: pain aux olives pour mon invitée, aux fines herbes pour moi. La présentation de nos entrées est identique: orchidée épanouie au pied d’un petit bosquet, pousses vertes dans une jardinière de luzerne cerclée de concombre. L’essentiel pour moi est un feuilleté d’escargots et sa tombée de tomates aux câpres, persil et ail rôti. Ça vous confond un sceptique dès la première bouchée. Surtout quand on s’est demandé ce qui pourrait encore arriver de mieux à des escargots. La réponse? Une petite succulence qu’on fait traîner en longueur pour savourer la moindre nuance de saveur. Mon invitée s’impatiente, car je n’ai toujours pas accepté l’offre de sa fourchette tendue vers moi. Je ne comprends son insistance qu’après avoir goûté à mon tour: aucune surprise avec le "bouquet de laitue", mais toute une avec ce qu’il accompagne, soit une roulade de saumon fumé (onctueux et fin) accommodée de crème sure et d’aneth. "Ça démarre bien, hein!" Le problème avec une excellente entrée, c’est qu’après, le moindre manque vous paraît énorme. Le potage suit: crème de poireaux. Bonne, certes, mais faible en… poireaux. On y décèle par contre un petit apport de pomme de terre et des arômes d’herbes, des traces fugitives de céleri… Mon invitée se fait servir un deuxième verre de rouge, et nous attaquons le troisième service. Dans une grande assiette creuse (on dirait presque un haut-de-forme renversé), d’énormes medaglioni de cerf qui, dès le premier contact avec une fourchette, exhalent un parfum grisant: poêlée de petits champignons aux fines herbes et crème aux lardons. Exactement la sensation que vous imaginez. Oui, le pied! Et ce n’est même pas mon assiette!… Moi? Du jeune cresson vert, frais et tendre – et en abondance, du brocoli, une purée (sans doute de panais, mais je n’y ai pas goûté), une pomme de terre, un petit fagot de fèves vertes (qu’il faudrait absolument faire cuire un peu plus) liées d’un ruban de bacon. Et autre chose aussi, sans doute, pour l’accompagnement, mais je me concentre sur le médaillon de cheval – rosé, tendre et si prompt à vous juter tout son suc dans la bouche. En fait ils sont deux et entre les deux se blottit de l’ail confit, trois gousses siamoises qui vous font du beurre sur la langue. Après cela, et après le dessert ("Fraîcheur d’Afrique à l’orange et ananas"), nous avons hâte d’aller expier par une bonne marche digestive.

Le Charles Baillairgé
Hôtel Clarendon
57, rue Sainte-Anne
Québec (Québec)
Téléphone: 418 692-2480 et 1 888 554-6001
Tables d’hôte: 24,95 à 38,95 $
Menu "Découverte": 54,95 $
Menu du jour à partir de 9,50 $
Souper pour deux (incluant boissons et taxes): 91,40 $

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LA SAINT-VALENTIN CHEZ NOURCY

Le traiteur Nourcy a concocté pour la fête des amoureux un menu sensuel qui vous mène progressivement jusqu’à la conclusion. "Préliminaires": brochettes de fromage et pistache, crostini aux herbes, pailles au fromage; "Éveillez le désir": carpaccio de boeuf, roquette et noix de Grenoble, vinaigrette à l’huile d’olive, érable et parmesan, ou phyllo de canard confit en réduction balsamique et miel; "Aiguisez vos charmes": crème de courgettes et chips de poires. "Succombez" pour le carré d’agneau à la fleur de sel ou pour le bar rayé sauce vanille et huile d’olive… "Poussez la folie" avec desserts et fromages fins. Coût: 32 $ par personne (plus les taxes). Il vaut mieux réserver tôt: 418 653-4051.