Je ne le fais pas exprès, mais, chacune de mes visites a lieu quelques jours avant l’ajout d’une ou deux nouvelles spécialités à la carte. C’est encore mieux, cette fois: on nous annonce pour très bientôt un changement plus marquant: l’"arrivée" d’une table d’hôte avec ses tampiqueñas, mole, tostados de tinga… Nous n’avons pas le temps de nous désoler d’être venus trop tôt. "Qu’est-ce qui sent si bon?" demandons-nous à celui qui nous a accueillis. Il répond, hésitant, qu’il ne le sait pas lui-même. Derrière le comptoir qui nous sépare de la petite cuisine, ça grésille à plein et l’odeur évoque pour nous un mélange d’épices où l’ail domine un peu. Nous insistons, de plus en plus intrigués. La réponse ne nous éclaire pas davantage, mais nous excite encore plus l’appétit: una sorpresa… Eh oui, avant même d’avoir choisi quoi que ce soit, nous avons droit à un avant-goût de… l’avenir! Le fumet qui se dégage des deux petites assiettes maintenant posées devant nous me rappelle de fameuses "crevettes aux sept piments" savourées, il y a quelques années, dans un resto de la zona rosa, à Mexico. À l’époque, je mangeais… "volcanique". Ce soir, on a pris soin de nous servir à part la sauce Valentina, à base de piments qui n’ont rien de doux. Les haut-parleurs nous jouent de vieux succès latinos: à Ella, d’Alfredo Jiménez, succéderont Reloj, Jalisco, etc. Autour du monticule de riz posé au milieu de l’assiette, des endives figurent les rayons du soleil qui nous manquent tant ces jours-ci. Elles alternent avec des crevettes à l’ail, dodues et bien grillées, des tranches de radis, de petites tranches de cactus mariné. Mon amie et moi arrosons cela d’un verre de vin rouge maison (Montepulciano d’Abruzzo) et d’une Dos Equis, respectivement. Après quelques bouchées ponctuées de commentaires satisfaits, nous nous intéressons de près à la carte et prenons le temps de commander ce qui complétera notre souper. Puis nous revenons à nos crevettes… à celles qui subsistent encore dans nos assiettes. Au service suivant, ce que nous avons choisi pour nous deux: une entrée de nachos maison (salsa, guacamole, poulet) qui, en l’occurrence, n’en est plus vraiment une. Peu importe: nous lui accordons l’attention que nous lui réservions et elle nous le rend bien. Là, je m’inquiète un peu, car ma faim est presque déjà chose du passé et un autre plat s’en vient. Je n’ai pas le courage (ni l’envie) de me contredire et accueille donc sans sourciller mes tortillas farcies de poisson. Voilà qui me change un peu de la version la plus répandue (à la viande). Elles sont deux, renflées de chair de maquereau émiettée, assaisonnée, pas relevée du tout. Quelques gouttes de limette, et le tour est joué. Je ne me préoccupe pas de la salsa verde (à base de tomatillo, petit fruit apparenté à la cerise de terre); mon amie s’en chargera bien, elle à qui l’abondance de sauces ne nuit point. Elle en a maintenant trois devant elle: le guacamole, la verde et celle, plus relevée encore, qui accompagne son chili au chorizo mexicain. Elle a son appétit des grands jours et mange, tous phares allumés, à une allure de conquérante. Par trois fois, elle m’assure que "ça fait du bien". Veut-elle dire… une fois par sauce? Je finis par tâter un peu de la verde. D’abord du bout de la fourchette. Alors, les tortillas en redemandent encore et encore. À ce train, vient un moment où nous cessons de crâner pour demander… des doggie bags.
Restaurant Déli-Mex
300, rue de la Couronne
Québec (Québec)
Téléphone: 418 649-0830
Plats à la carte: 5,95 à 7,50 $
Spéciaux de la semaine: 9,75 à 10,95 $
Souper pour deux (incluant boissons et taxes): 27,78 $