Pour la durée d’une émission, le peintre Jean-Luc Dehours s’est uni dans un tango à Michèle Youinou, propriétaire de la crêperie où il expose régulièrement quelques-unes de ses oeuvres. Cela se passait le 21 août 2006, dans un épisode de La Petite Séduction présentant au grand public Saint-Antoine-de-Tilly, ses habitants, ses notables, ses maisons trois fois centenaires. À demi assise sur la balustrade bordant l’étroite galerie aménagée en terrasse où nous nous sommes installés, la sympathique Bretonne évoque pour nous, photos à l’appui, ces moments de télé qui expliquent en partie les retombées "touristiques" dont a bénéficié tout le village. Ainsi, jour après jour, curieux et visiteurs s’ajoutent à une clientèle déjà séduite par ses crêpes de sarrasin ou de blé entier. Depuis notre arrivée, en effet, des voitures ralentissent, passent, repassent, s’arrêtent. À l’intérieur, la petite salle à manger est bondée et l’odeur de la pâte à crêpe chaude embaume. Sur le mur qui fait face au comptoir, l’oeil accroche au passage une grande photographie en noir et blanc signée Cynthia MacAdams. Dehors, derrière moi, sous une jardinière en fleurs, deux clientes terminent leur repas; d’autres leur succéderont. Deux couples et leurs enfants occupent une table à pique-nique en contrebas de la minuscule terrasse… La jeune serveuse va et vient, entre et sort, toujours souriante et un peu timide. Les crêpes débordent des assiettes. L’établissement ne sert rien d’alcoolisé; en revanche, jus, café, moût de pomme de la Cidrerie Saint-Nicolas coulent à flots – sans parler des tisanes Alkimiya du "terroir québécois", de l’eau Perrier, du chocolat belge chaud… J’ai choisi un thé à l’abricot, parfumé à souhait, tandis que mon invitée a préféré un bol de café au lait. On ne se décide pas aussi vite qu’on fait le tour de la petite carte. Tenté par une crêpe à l’agneau fumé et gouda, je me fais dire que d’autres y ont pensé avant moi: il n’en reste plus. Raison de plus pour reprendre ma lecture, depuis les "classiques" aux oeufs, au jambon, au gouda ou aux tomates fraîches. Puis, c’est la "crêpe du village" (poireaux et Coureur des bois), la "crêpe bruschetta" au jambon et fromage, une autre encore au fromage de chèvre frais, tomates, jambon et pesto. Quant à l’"Assiette du terroir" au confit d’agneau, magret de canard, jambon fumé, fromages et toutim, elle fait partie du nouveau menu qui ne sera en vigueur que dans une semaine ou deux… Il en est de même pour la crêpe aux petits fruits de la région, les potages froids (pêche et persil ou bien concombres, yaourt et menthe), la coupe glacée et autres tentations estivales, dont la crêpe préférée d’Andrée Lachapelle (nous dit-on), au sucre d’érable, petits fruits et purée d’abricots. J’ai finalement opté pour celle dite "du pêcheur" (et pour la farine de sarrasin), accompagnée d’une salade de laitue fraîche chapeautée d’une tranche de tomate. Elle est semée de câpres et repliée sur des tranches (un peu épaisses) de saumon fumé (peu gras sans être sec). La présence du gouda atténue le goût un peu trop salé du poisson. Mon invitée n’avait pas tergiversé avant de se décider pour une "gouda classique", également au sarrasin, décorée d’une salade identique à la mienne. Je repense en mangeant à toutes les sucreries qu’on m’a "contées" et la perspective d’un dessert s’impose de plus en plus. Il en est de même pour mon invitée que le simple mot érable met dans tous ses états. Elle déclare, elle, que j’incline pour la rose en raison de mon côté fleur bleue. En attendant nos crêpes desserts, je me fais servir un café pour remplacer mon thé à l’abricot qui n’est plus. Il fait grand soleil en ce tout début d’après-midi, mais l’air fraîchit soudain et quelques clients s’empressent d’enfiler des chandails. Ma crêpe dessert s’amène, à peine repliée sur une mince couche de gelée… de pétales de rose. Celle de mon invitée est au sucre d’érable et jus de citron. De loin en loin, nos fourchettes s’amusent à se tromper d’assiette et, les dernières bouchées avalées, elles semblent encore chercher quelque chose. Elles devront attendre la prochaine fois.
Du côté de chez Swann
3897, chemin de Tilly
Saint-Antoine-de-Tilly (Québec)
Tél.: 418 886-1313
Repas légers à partir de 5 $
Dîner pour deux (incluant boissons, taxes et service): 39,75 $