Restos / Bars

Le Taj Mahal : Le palais de tous les plaisirs

La cuisine du Taj Mahal témoigne d’un savoir-faire et d’un certain raffinement qui le distinguent nettement de ce qu’on trouve dans le genre à Québec. Le service est à l’avenant.

Car, à Québec, si l’on excepte celle des amis qui s’y connaissent, la cuisine indienne m’ennuie. C’est ce que j’aurais encore pu affirmer la veille de ma visite au Taj Mahal… et même quelques minutes avant d’y entrer. En fait, nous y sommes entrés deux fois, mon amie et moi. La première, pour jeter un coup d’oeil à la carte. J’ai dodeliné de la tête et nous sommes repartis. Peu emballés par les menus d’un autre resto ouvert récemment, nous sommes revenus sur nos pas. Les nuances de rouge dominent dans ce décor. Une porte patio s’ouvre sur un bout de galerie. Plus que les deux jardinières et les lampes suspendues, la rampe d’éclairage et le grand luminaire du plafond, semblable à un vitrail, les murs retiennent à coup sûr l’attention: le panthéon hindou s’y trouve réuni sous forme de tableaux hauts en couleur. À l’autre bout de la pièce, Shiva, le "Seigneur du sommeil"; derrière moi, Ganesh ou Gajâdhipa, à la fois dieu du foyer et "Roi des éléphants"… Des préoccupations plus terre-à-terre me ramènent à nos deux Corona et aux pages plastifiées d’un menu prolixe et varié. Entrées, bhajis, kebabs, "combinés", plats de légumes, de riz, de poulet, d’agneau ou de crevettes: nous serions bien en peine de dire lesquels, autour de nous, embaument tant la salle. Les clients, nombreux, sont tous à leur assiette. Certains goûtent avec prudence, d’autres y vont carrément. D’autres encore les regardent faire en attendant d’être servis. Nous sommes de ceux-là. Les papadams (pappadums) qu’on nous a d’abord servis ne sont plus qu’un souvenir. Et puis s’amène, sans avoir trop tardé, le traditionnel mulligatawny ou mulligatowny qui fut à l’origine le repas du pauvre. Il tient à la fois de la soupe et du ragoût et se révèle aussi nourrissant que torride. Mon amie n’y va pas de main morte, croquant avec le même entrain lentilles, petits cubes de pommes de terre et… petits bouts de piments qu’elle a d’abord pris pour des carottes. Et voilà ses yeux ronds, sa bouche ouverte pour aérer une langue affolée, sa main qui attrape le verre d’eau, puis sa fourchette qui saute dans mon assiette pour y piquer une rondelle de concombre… Il faut dire aussi qu’elle avait ajouté de la sauce piquante dans son assiette! Y goûter, moi? Non, merci. Mes papilles sont du genre pacifique et j’ai fort à faire avec mes entrées de shami kebab, deux galettes de viande très finement hachée, épicées et frites. Friables sans être sèches, elles ont bon goût et s’accompagnent d’une raita (yaourt et menthe) et d’une petite salade (laitue, tomate et concombre). En ce qui concerne la suite de notre repas, la jeune serveuse et les deux serveurs – toujours prestes et attentionnés – nous avaient conseillés et avaient patiemment répondu à nos questions, nous aidant à prendre une décision parmi les Bangalore phal (cari extrêmement piquant), les sheek kebab, poulet tikka ou pakora, crevettes korma, bhajis d’oignons ou de chou-fleur, samoosas… Nous avions opté pour un "combiné", à savoir le "Tandoori Taj Mahal". C’est donc une très grande assiette parfumée qu’on pose devant nous, garnie de crevettes tikka, de sheek kebabs, d’agneau tikka et de poulet tandoori. Du riz frit aux légumes (pois chiches, carottes, etc.) occupe le centre de l’assiette. Il disparaît en un clin d’oeil. Viandes succulentes, chairs tendres… Assaisonnements subtils, sans dominante accusée, où l’on n’est jamais sûr d’avoir vraiment isolé une saveur d’une autre. Cardamome, coriandre, safran, curcuma, fenugrec et autres sont des mots qui m’effleurent à peine l’esprit. Je mange, donc je suis. Quelqu’un a sans doute déjà dit ça, c’est tellement évident. Mes préférences vont à l’agneau, et j’ai presque l’impression de le trahir quand j’amène à moi un morceau de poulet ou m’attarde à décortiquer une crevette. Nous avons près de nous deux caris de légumes, soit un Madras bien relevé et un autre, plus sage, au lait de coco. Nous passons donc à volonté du volcan à la plage. Nous avons aussi droit à un nan souple et chaud – si bon qu’après y avoir mordu et médité ma bouchée, j’avais demandé à l’un des serveurs d’en préparer un autre que j’emporterais… Il est déjà là, cet autre, prêt pour la balade. Je ne le quitte pas des yeux et me garde bien de l’oublier en partant.

Le Taj Mahal
24, boulevard René-Lévesque Ouest
Québec (Québec)
Téléphone: 418 523-2007
Menu du midi: 7,95 à 10,95 $
Plats combinés: 15,95 à 19,95 $
Repas pour deux (incluant boissons et taxes): 54,20 $