Restos / Bars

Momento : Savoureux moments

De loin en loin, la carte du Momento s’offre de petits changements qui, néanmoins, épargnent les classiques de la maison.

Depuis quelque temps, nous arrivons assez tôt au restaurant, mon amie et moi, à une heure où tout est encore tranquille et où le personnel s’empresse malgré tout auprès des clients encore peu nombreux. La salle à manger s’emplit, en général, à mesure que se vident nos apéros. Ce soir ne fait pas exception. Installés tout au fond de la pièce, à proximité de la grande murale artistement "craquelée", nous levons nos verres pour la nième fois quand s’amène une nouvelle vague de clients, la troisième depuis notre arrivée. Nous n’avons commandé jusqu’à présent que mon Henkel Trocken et un verre de vin maison (Miglianico 2006).

Nous feuilletons paresseusement la carte, l’attention surtout fixée sur ce qui contribue à l’ambiance: les linguine alla matriciana qui flambent près d’une tablée de quatre personnes, l’imposant groupe qui festoie sans bruit près des colonnes cannelées, un autre groupe où l’on commente pastas et pizzas à peine servies… Une serveuse vient s’enquérir de nos choix; nous lui demandons un sursis de quelques minutes.

J’ai gardé un bon souvenir de l’escalope de veau al limone et de l’osso buco, mais ce n’est pas une raison pour en redemander cette fois encore. Jarret de veau aux herbes italiennes et risotto Arborio? Il y aurait bien le magret de canard aux cinq épices et risotto frit aux champignons… Et aussi les penne au chou-fleur, le nid de pâtes au pesto de basilic, puis toute la cohorte des pizzas qui ne nous simplifient pas le choix. Même le menu du midi tente de nous distraire, mais nous revenons obstinément à nos pizzaïola, siciliana et consorts. Pour les entrées, je décide de choisir ce qui me tombera immédiatement sous les yeux. La mitonnée d’escargots à la crème d’ail doux l’emporte, mais je bifurque et opte pour un carpaccio. Mon amie se décide illico pour le potage du jour. Même stratégie, ou à peu près, pour la suite. Il ne nous reste plus qu’à attendre un peu.

Autour de nous, les conversations s’animent. "De toute beauté", dis-je en voyant se poser devant moi le carpaccio divinement parfumé. Cri du coeur ou cri du ventre? Les deux, sans doute. Une touffe de luzerne et de larges copeaux de parmesan parsèment les tranches de filet de boeuf, presque transparentes de minceur. Deux feuilles d’endive dépassent de la petite salade où s’entremêlent feuilles de chêne, tomates cerises, jeunes pousses de betteraves, tranches de concombre, ciboulette, etc., tout cela mouillé d’une excellente… vinaigrette – qui, cependant, ne semble pas contenir de vinaigre. La vue et l’odorat ne m’ont pas trompé: cette entrée me comble au-delà de toute attente.

Mon amie se délecte pour sa part d’un potage Crécy relevé de gingembre, qui à la fois excite l’appétit et attise la soif. Un deuxième verre de vin rouge s’impose donc – et s’amène, peu après suivi du plat de résistance, les linguine "trois saveurs": poulet mariné, grosses crevettes, pesto, poivrons rouges, plus une profusion de pignons grillés et de jeunes pousses de blé d’Inde. Il s’agit là d’un plat parfaitement équilibré sur le double plan de l’aspect et du goût. Ces pâtes se mangent avec entrain et ne vous autorisent que des pauses justifiées: par exemple, pour une gorgée d’eau ou de vin. Dans mon assiette, une délicieuse poêlée de betteraves (en dés) fait à demi le tour de ce qui constitue l’essentiel: deux cannellonis, dont l’un de pâte aux épinards, posés sur un lit de courge spaghetti et saupoudrés de parmesan. La farce est constituée de saumon frais, d’épinards et de petites crevettes entières. J’y décèle un très vague goût fumé (pas désagréable) que rien n’explique. La sauce, on ne peut plus onctueuse, est une "écume de bisque de crevettes" au cognac, dont un filet de crème fraîche nuance la couleur orangée-rosée. Ce mets copieux serait parfait si les cannellonis, un peu trop raides à mon goût, avaient cuit encore un tout petit peu. Je n’en aurais peut-être rien laissé, passant outre la satiété qui me guettait depuis un moment déjà. Nos assiettes reparties, nous jetons un coup d’oeil à la rubrique des desserts, par acquit de conscience, nous demandant si une crème brûlée, une tarte au citron ou une glace italienne ne serait pas la bienvenue à notre table. Chacun de nous semble attendre que l’autre en prenne la responsabilité… Bon. Ce sera seulement deux cafés.

Ristorante Momento
1144, avenue Cartier
Québec
Téléphone: 418 647-1313
Tables d’hôte: 20 à 36 $
Menu du jour: 11 à 17 $
Souper pour deux (incluant taxes et boisson): 90,19 $

Légende /
grande table : 5 étoiles
très bonne table, constante : 4 étoiles
bonne table : 3 étoiles
petite table sympathique : 2 étoiles
correcte mais inégale : 1 étoile