Restos / Bars

Alcools : Le millésime de la victoire

Toute la spéculation entourant l’effet du millésime me fait bien rigoler. Pourquoi? Qu’est-ce qui est mieux dans la vie: regarder pendant 15 ans une de vos fioles bordelaises de l’anthologique récolte de 1982 en pensant qu’elle vous causera un jour une extase buccale, mais qui au fond s’avérera quelque peu essoufflée, ou déguster une bouteille étonnante d’une année qui s’est fait lapider par les critiques? Croyez-moi, beaucoup trop de gens croient à tort à la qualité d’un produit en se basant seulement sur son année de naissance.

Les grandes années, nous pouvons les nommer: 1929, 1949, 1961, 1970, 1989, 1990. Et 2000, non? Parlons-en de la louangée cueillette de collectionneur 2000! Le gourou du vin Robert Parker nous confiait dans ses écrits que 2000 était le "meilleur millésime de tous les temps". Ce dernier n’a pas dû aller faire un tour à Sauternes en septembre 2000 – la pluie a mené la vie dure aux pieds de vigne dans cette zone en fin d’été. Pour avoir goûté de multiples produits français du millésime 2000, je peux vous affirmer qu’il s’agit bel et bien d’une année sous le signe du soleil (pas partout!) qui nous a livré des rouges qui vieilliront très bien, mais son "excellence" fut sûrement trop gonflée par l’effet du nouveau millénaire…

Il ne faut surtout pas généraliser une bonne année. Prenons pour exemple 1997; les Italiens et les Californiens l’adulent (et pour cause), mais en Bourgogne et à Bordeaux, c’est une année qui a engendré des vins à déguster sans plus attendre. Même son de cloche pour 2002. Les journalistes ont détruit cette récolte en raison des pluies diluviennes qui ont touché quelques régions. Par contre, cette même année est superbe en Côte-d’Or, en plein coeur de la Bourgogne.

Mis à part le grandissime été de 1961, qui est à classer à Bordeaux parmi les meilleures périodes végétatives de la viticulture moderne, quelle autre année a vu naître des bouteilles d’exception? Les experts britanniques et américains s’unissent pour dire que 1811 est une révélation, une année culte. Soyons honnêtes: qui nous prouvera le contraire, ou plutôt qui en a goûté? Le millésime le plus réussi presque partout dans la vieille Europe est l’année de la victoire: 1945. En dépit des ravages de la guerre, ce fut un été exceptionnel. Mis à part une petite gelée en mai, l’été fut brûlant et permit une toute petite récolte, mais quelle récolte… Que celui qui goûtera un Mouton Rothschild 1945 me lance le premier verre!

LE VIN DE LA SEMAINE

Je me permets de faire un clin d’oeil à un domaine de Saint-Eustache dans les Basses-Laurentides qui n’est plus. En effet, le Vignoble de la Rivière du Chêne, qui possède la plus grande superficie en province (18 hectares de vigne), a été la proie des flammes le 15 novembre dernier. Les propriétaires Isabelle Gonthier et Daniel Lalande s’étaient lancés dans cette courageuse aventure en 1998 et avaient fait des investissements majeurs dans le chai, la cave, la boutique ainsi que dans une splendide salle de réception en 2005. Le tout a entièrement été réduit en cendres il y a un mois. Vous trouverez en succursale une bonne diversité de produits du Vignoble de la Rivière du Chêne, aussi appelé le Domaine Lalande. À 13,50 $, la cuvée William 2006 rouge est surprenante (743989).