C’est triste, mais la dernière décennie nous a livré des vins souvent capiteux, ce qui est tout à fait normal, car nos tablettes sont de plus en plus garnies de vins du Nouveau Monde. Qui dit vin moderne dit vin d’endroit ensoleillé, donc plus de matière, plus de concentration et plus d’alcool. Est-ce qu’un 14,5 % d’alcool est vraiment nécessaire à la qualité d’un vin? Loin de là. Vous n’avez qu’à penser à un délectable riesling allemand à 9 % ou à un fin pinot noir de Bourgogne à 12 %!
L’Australie, le Chili, l’Argentine, l’Afrique du Sud et la Californie nous livrent fréquemment des vins avec un pourcentage d’alcool excessif. Ce sont des pays assez solaires, donc la maturité phénolique du raisin y est rarement absente. Par contre, comme nous le disent les oenologues de ces pays, "il y a un marché pour ce type de vins-là". Des produits pas seulement alcoolisés, mais aussi de grande extraction, des vins volumineux qui regorgent de fruit. Mais est-ce qu’on finit toujours la bouteille? N’oubliez pas que l’une des meilleures façons de savoir qu’un vin est bon est de constater qu’on en termine la bouteille!
Bien sûr, il existe des exceptions. Pensez à un grand Châteauneuf-du-Pape à 15,5 %, à un phénoménal Amarone de la Vénétie à 16 %. Mais ces vins ont la colonne vertébrale qu’il faut pour prendre une charge en alcool aussi élevée. Même son de cloche pour les divins portos; leur degré alcoolique titre 20 %, mais ils possèdent une charge en sucre résiduel qui nous fait oublier l’alcool. Je lance la pierre (ou mon verre!) aux syrahs, aux malbecs, aux cabernets de l’hémisphère Sud, des produits souvent début de gamme où l’alcool (et le boisé!) dominent sur le fruit. Où est donc l’équilibre?
De plus, ce n’est que la pointe de l’iceberg avec le réchauffement planétaire. Au cours des prochaines années, les produits viniques seront encore plus mûrs, plus denses et probablement plus alcoolisés. Verrons-nous avec ces changements climatiques du chardonnay à l’île d’Orléans ou du zinfandel dans les Cantons-de-l’Est? J’en doute fortement. Par contre, le climat nordique et alpin québécois permet aux vignerons d’élaborer des vins à bas pourcentage d’alcool, ce qui est selon moi formidable!
Le but premier d’ouvrir une bouteille n’est pas l’ivresse, mais bien la découverte d’un liquide, un échange entre amis, un partage, car le vin est rassembleur et convivial.
LE VIN DE LA SEMAINE
J’adore cette appellation, le Québec aime cette AOC: Cahors. Cette région est située dans le sud-ouest de la France, près du Bordelais. Voici donc le Cahors 2004, Croix du Mayne à 18,15 $ (10542049). Une couleur de bonne intensité (comme la plupart des vins rouges de cette zone!), le nez est axé sur les petits fruits, le bois est presque absent. Au gustatif, les tanins sont serrés, le vin est net et sans défaut. Vous devrez par contre manger avec ce type de produit; pensez à une côte de cerf saignante allongée sur une poêlée de champignons sauvages. Servir à 17 degrés en l’oxygénant au moins 45 minutes en carafe.