Restos / Bars

Bistrot Le Moulin à poivre : Lyon à l'honneur

Pour le meilleur, et jamais pour le pire, spécialités lyonnaises et alsaciennes se disputent amicalement la carte du Bistrot Le Moulin à poivre.

Par un temps pareil, on s’estime chanceux d’avoir un bon petit bistrot près de chez soi. Quelques minutes de grésil, de vent hurlant et de poudrerie, ce n’est pas la fin du monde, mais plutôt celle de nos précoces illusions printanières. "Les braves se font rares", me dis-je constatant que la salle à manger n’est pas bondée. Des clients mangent sans se presser et, comme d’habitude, la jeune proprio prend parfois le temps de piquer avec eux un brin de causette. Cette cordialité fait partie du charme de la maison. On peut en dire autant du plaisir manifeste avec lequel on vous présente les nouvelles spécialités de la maison ou le menu thématique du mois. Ainsi, Lyon est à l’honneur pendant tout le mois de mars… "à moins que le chef ne se décide à prolonger un peu", complète le chef lui-même en se détournant de ses fourneaux – sans doute par nostalgie de son coin de pays, du boudin blanc aux pistaches et ris de veau sauce cassis, du suprême de pintade au chablis, de l’andouillette grillée, de la quenelle lyonnaise sauce Nantua… Et je ne parle même pas de la cervelle de veau grenobloise, de la côte de veau à la crème et champignons, du saucisson aux pistaches. Je m’octroie une gorgée de Kronenbourg pour cesser de saliver à vide, puis une deuxième après avoir trinqué avec mon amie qui, elle, a préféré un verre de rouge argentin (Trumpeter, cabernet-sauvignon, 2006). Je m’égare encore un peu et dérape parmi "Les classiques du bistrot" – cassoulet sarladais, choucroute à la sundgauvienne, manchons de lapin confits, etc. – avant de revenir sur terre, c’est-à-dire au menu du midi. Le choix n’est pas restreint, mais j’hésite. J’ausculte ma faim, qui me connaît bien. Elle finit par me conseiller l’omelette. Mon amie se décide pour le rôti d’épaule de veau de Charlevoix, mais se ravise in extremis et opte pour le sauté de boeuf à l’ancienne. Nos commandes passées, nous nous offrons un brin de lecture: Murs peints de Lyon et Les Recettes de nos grand-mères, deux des ouvrages bien en vue près de nous. Et voici nos premiers plats. J’ai pris en entrée une terrine de campagne, belle tranche épaisse et goûteuse où abondent les petits morceaux de viande entiers. Cornichons et confit d’oignons la complètent. Mon amie fait ses délices d’une salade d’endives mouillée d’une excellente vinaigrette maison qui en atténue considérablement l’amertume. C’est frais, croquant, apéritif. En attendant la suite, j’examine de loin les invitations au voyage, ces grandes affiches qui vous proposent la Bourgogne, la Corse, le Languedoc-Roussillon… Nos plats de résistance comportent la même garniture: frites (peu habituelles ici) et légumes (haricots verts, carottes, etc.). Pliée en deux et bombée, mon omelette évoque par sa forme un calzone. Ni trop baveuse ni trop sèche, elle présente une texture moelleuse qui achève de se défaire en bouche, alors que les fines herbes vous aromatisent le palais. Cela se mange lentement, à petites bouchées attentives. Mon amie ne se montre pas plus pressée, accordant à son plat toute l’attention qu’il mérite. La viande est on ne peut plus tendre. La sauce, abondante et savoureuse, fleure bon le vin et les herbes. En fouinant dans l’assiette qui n’est pas la mienne, je découvre le bol de mayonnaise maison que la bouteille d’eau cachait à ma vue. C’est donc le moment de faire honneur aux frites, fines et dorées, puis d’accorder un peu d’attention aux légumes. Je ne m’y attarde pas, l’omelette risque de trop refroidir. Nos assiettes finissent bien par se vider (la mienne, pas complètement). Je ne songe pas à un quelconque dessert, mais plutôt à ce café chilien qui m’intrigue. Je lorgne depuis un moment ces paquets de El Palto alignés sur le comptoir qui me fait face. "Biologique, corsé, équitable" annonce l’emballage. On nous en sert bientôt deux tasses de format respectable, fumantes. L’arôme en est puissant et le goût assez soutenu pour justifier une petite faiblesse. Nous goûterons donc à l’une des tartes maison, aux pommes ou aux poires et amandes. "Une toute petite pointe", dis-je. Nous avons droit aux deux. C’est trop, mais comment refuser?

Bistrot Le Moulin à poivre
2510, chemin Sainte-Foy
Sainte-Foy (Québec)
Téléphone: 418 656-9097
Menu du jour: 13,50 à 15,95 $
Tables d’hôte: 18 à 33 $
Dîner pour deux (incluant taxes et boissons): 48,82 $

Cuisine :

Légende /
grande table : 5 étoiles
très bonne table, constante : 4 étoiles
bonne table : 3 étoiles
petite table sympathique : 2 étoiles
correcte mais inégale : 1 étoile