Restos / Bars

Les Enfants terribles : Simple et chic

Contrairement aux terribles enfants de Jean Cocteau, le restaurant Les Enfants terribles n’est pas une tragédie. Heureusement. Un bon film, même. Essentiellement grâce au directeur artistique. C’est terriblement joli.

Le style. C’est ce qui frappe immédiatement. La signature de Louis-Joseph Papineau, un vénérable architecte dont on vante la rigueur et la gueule de… l’aérogare de Mirabel. Résultat, ici: de la sobriété. Les murs de bois, et leurs étonnants reliefs, donnent une troisième dimension surprenante. Nappes blanches, verres propres… une certaine classe se dégage. Mais en fait, c’est dehors que tout se joue. Sur la terrasse. Le temps est clément, la chasse aux places est ouverte, et les Outremontais se régalent à comparer les offres et à faire jouer la concurrence sur l’avenue Bernard. Ici, c’est complet. De l’autre côté, à la terrasse presque vide de La Moulerie, un serveur zieute la nôtre avec jalousie. L’attrait de la nouveauté est impitoyable. Ce soir, Les Enfants terribles font terrasse comble.

BRASSERIE

Qu’est-ce qui intéressent tant les visiteurs? Une carte simple. Type brasserie. Rien de bien compliqué autour de ces plats maintes fois préparés: du tartare, de la bavette, de l’entrecôte, du saumon… Pas de quoi dérouter l’habitué des tables du genre. Ah oui! Le fish & chips. Petite surprise très attirante, surtout pour le critique qui se délecte de cet appétissant examen de confiance, un test classique pour tout nouveau restaurant…

Petit apéro frais alors que les rayons tièdes du soleil illuminent le théâtre Outremont. Un fumé blanc. Le choix des vins est mince mais efficace. En bouteille, pas grand chose à moins de 50 $, ce qui contraste avec les prix des plats, plutôt modestes.

Traversons rapidement les entrées. La salade, un mesclun habituel décoré de fines tranches d’oignons rouges et de quartiers de tomates, est assaisonnée d’une vinaigrette aux notes d’agrumes, légèrement sucrée. Deuxième choix, une soupe du jour. Troisième choix, des calmars frits. Encore un bon test. Une abondance de petits morceaux à la panure fine, parfois croustillante. La chair devenue caoutchouteuse a souffert d’une cuisson quelque peu prolongée. En refroidissant, les calmars s’assèchent et les plus petits morceaux deviennent presque croquants comme des chips. En accompagnement, petit mesclun, citron et mayonnaise maison.

Mais revenons à notre fish & chips. Le retour sur les cartes des restos chic de ce plat mythique surfe sur la vague de la tendance à la bouffe confort. Et il n’a heureusement rien à voir avec ceux servis dans la restauration rapide. Du vrai poisson, de l’églefin, enrobé d’une généreuse panure, peu grasse. La chair est tendre et sapide, surtout rehaussée d’un trait de jus de citron. Mayonnaises sur deux tons: une du genre tartare et l’autre, pimentée. Et un bol de frites assez généreux pour nourrir deux personnes. Note finale: 70 %. Satisfait, oui, mais pas épaté.

On donnerait sans doute la même note au tartare de boeuf, coupé un peu trop grossièrement au couteau. Beaucoup de mayonnaise dans le mélange, mais pas assez de condiments. Pas assez relevé. D’ailleurs, notre serveur aurait dû s’informer de nos goûts. On demande de la sauce Worcestershire pour essayer de fortifier le plat, mais il manque vraiment d’oignons, de cornichons et de moutarde. Question d’équilibre et de goût.

DESSERTS

Il n’y a plus de crème brûlée. Flûte! Allons-y alors pour le moelleux au chocolat, qui nous arrive 10 minutes plus tard (le temps du passage au four), prêt à déguster. Fondant à l’intérieur, croustillant en surface, savoureux de cacao, le petit pot se vide rapidement, avec plaisir. Pas mal, pour une cuisine qui est – faut-il le préciser – encore en rodage.

EMBALLANT /

La terrasse, évidemment. On passerait des heures à scruter la faune outremontaise déambuler sur l’avenue Bernard. Une cuisine sans éclats, mais qui tente de rendre justice à des classiques de brasserie. Un potentiel de réussite évident.

DÉCEVANT /

Avouons-le: nous avions hâte de goûter la cuisine de ces Enfants terribles. Parce qu’on aime les lieux (laissés vacants par la fermeture du Vasco de Gama) et la grande terrasse. Il faut donc faire preuve de retenue pour laisser à ce petit nouveau le temps d’ajuster le rythme. Le service s’égare parfois: le coup de feu a dû être difficile. L’entrecôte d’une table voisine est même retournée en cuisine. Trop cuite.

COMBIEN? /

Sans alcool, vous vous en tirerez à bon compte. En soirée, 30 $ par tête de pipe sont suffisants pour s’assurer d’un repas complet. Repas du midi et brunch du dimanche tout aussi bon marché.

QUAND? /

Tous les jours, dès 7h30, jusqu’à minuit.

OÙ? /

Les Enfants terribles
1257, avenue Bernard Ouest (angle Champagneur)
On réserve au 514 759-9918, mais attention, impossible de retenir une place en terrasse.