Vous êtes sous le charme, dès l’entrée du Château Bonne Entente où règne une atmosphère qu’on n’hésiterait pas à qualifier de sereine. Pour un peu, vous avanceriez sur la pointe des pieds. Sur le seuil du restaurant, on vous souhaite la bienvenue avec un sourire qui compense un peu la grisaille intermittente de ce début d’été. Mon amie et moi prenons place à quelques pas du fond de la pièce. À ma droite, c’est l’enfilade des petits salons semi-privés délimités par de légers rideaux. Du côté opposé, on distingue à travers le vitrage quelques-uns des clients installés sur la longue galerie convertie en terrasse. Nous soupirons d’aise quand arrivent nos apéros. "À nous! – À nous!" Nous n’avons plus qu’une envie… ou plutôt, deux: paresser et manger. J’ai laissé à notre serveur le soin de me choisir un mousseux (un produit Monmousseau), tandis que mon amie a préféré un blanc australien (Zimmermann, 2005). On nous sert peu après des amuse-gueule, en l’occurrence un petit gaspacho (pas trop glacé), auquel je décernerais sans hésiter une médaille d’or, et un sashimi de thon rouge qui nous fait glousser de plaisir. Les premières rubriques de la carte présentent les entrées, les chaudes et les froides, que l’on peut diversement combiner pour composer un repas tel que le "Menu hédoniste". On y trouve le risotto aux champignons sauvages et cheddar Perron, le boeuf Kobé, le tartare de canard (espuma au wasabi et oeuf de caille poché), les langoustines "Fiji", du thon… Quand nous songeons enfin à tourner la page, nous le faisons presque à regret. Nous nous attardons un peu aux "Assiettes à partager", dont la gigantesque pièce de boeuf Black Angus et la paëlla réinventée (riz bambou et abondance de crustacés). Les "Assiettes solo" suivent de près: carré de veau, demi-carré d’agneau en croûte d’olives… La salle s’est remplie. Des fumets en maraude nous racolent en douce et nous finissons par succomber à la tentation, surtout que nous sommes venus pour ça. Je commence par les pétoncles pochés au saké. Ils s’accompagnent en principe de wakamé et de "tomates translucides"; j’ai préféré une purée de pommes de terre. Les mollusques entourés de sauce reposent sur un confit de fenouil dont le goût prolonge en toute délicatesse celui des pétoncles – qu’un feu trop vif ou une cuisson prolongée n’ont pas crispés. Pour sa part, mon amie avait craqué pour une crevette géante qu’elle avait vue passer. Dans son assiette, le crustacé tendre et délicieux, apprêté à l’huile de safran, semble encore plus imposant sur son coussin de purée de pois verts – flanqué d’une onctueuse polenta formée en petit pain et dorée. Tous feux allumés, elle… oeuvre, alternant les bouchées avec de petites gorgées d’un vin piémontais aux arômes d’herbes et de bonheur (Roreo Arneis, 2006). Elle passe un peu plus tard au rouge (Vigna Grande, Castel del Monte, 2004) pour accueillir un râble de lapin de belle allure, sanglé de jambon de Parme, farci d’épinards et de pruneaux (macérés au porto). "Te dire!…" s’exclame-t-elle. Le goût ne serait-il pas plus éloquent que la parole? Je m’en donne la preuve sur-le-champ, m’extasiant à mon tour sur le parfait équilibre des textures et des saveurs, sur – disons-le! – la perfection de l’ensemble. Dans mon assiette s’impatiente une élégante tourelle coiffée de "microlaitue": deux escalopes de foie gras poêlé dressées sur une petite tatin de betteraves jaunes. Un large "sillage" de betterave rouge traverse l’assiette presque d’un bord à l’autre. Ma fourchette esquisse quelques pirouettes lentes, hésite, effleure et, finalement, se décide. Modérément assaisonné, onctueux, doré sous toutes les coutures, ce foie gras a été lui aussi dorloté en cuisine, et une sauce sublime imbibe la crêpe tenant lieu de croûte à la tatin. Je mange… ému. À un certain moment, je m’arrête pour désigner à mon vis-à-vis les ingrédients maintenant désordonnés dans mon assiette. "Ils s’aiment tous", dis-je, attendri malgré moi. Rien qui cloche, pas un accroc, pas une seule fausse note. Nous le pensons encore au moment de la Belle de Brillet (liqueur de poire et cognac) dont nous accompagnons un "Antipode". Ce dernier? Un dessert riche et frais à base de sablé breton, chocolat noir, croustille de grué, pommes caramélisées au xérès et sorbet à la poire Williams.
Monte Cristo Resto-Lounge
3400, chemin Sainte-Foy
Québec (Québec)
Téléphone: 418 650-4550
Entrées: 10 à 45 $
Plats à partir de 36 $
Menu du jour à partir de 11,50 $
Souper pour deux (incluant boissons et taxes): 134,89 $
Légende /
grande table : 5 étoiles
très bonne table, constante : 4 étoiles
bonne table : 3 étoiles
petite table sympathique : 2 étoiles
correcte mais inégale : 1 étoile