Jamais vu accueil plus neutre, pour ne pas dire froid ou indifférent! En effet, celle qui nous reçoit a l’air submergée par l’ennui – ou a l’esprit complètement ailleurs. Aussitôt qu’elle nous a installés (en nous donnant le choix de table), une autre serveuse prend la relève. Ouf! Le jour et la nuit, comme on dit. Celle-ci est vive, enjouée et semble prendre beaucoup de plaisir à conseiller les clients et à leur expliquer les différents menus. En ce début de soirée, malgré la fraîcheur de la température, des clients occupent la terrasse; certains la déserteront un peu plus tard. D’autres, que nous avons aperçus de l’extérieur, ont préféré la seconde salle à manger, mieux décorée et plus chaleureuse que la première où nous nous trouvons. En entrant, nous avions jeté un bref coup d’oeil aux "thématiques" de la maison. La Chine est à l’honneur jusqu’à la fin du mois. En juillet, le chef Guy Gagnon vous mène en Italie. Puis, ce sera le terroir québécois, puis la Californie, l’Inde, la Grèce, etc.
Mon amie se fait servir un verre de gewurztraminer (Andante 2005, cave de Ribeauvillé); elle le convertira bientôt en demi-litre. J’opte plutôt pour une Tsingtao. Quelques nouveautés d’un peu partout jalonnent la carte: profiteroles du Périgord (fondant de foie de volaille et élixir aux canneberges), "Dry ribs coréens", salade West Coast, brochette de crevettes africaines, salade amazonienne. La rubrique "Embarquement" regroupe entre autres le brie au sésame, le tartare de saumon, le curry de crevettes Bora Bora et le canard à l’hydromel. Quant au "Voyage", il comprend le fameux poulet du général Tao, la bavette de bison, du filet mignon, des fajitas. On peut aussi s’offir un "Tour du monde" en pizzas qui passe par le Bas-Saint-Laurent, Charlevoix, l’Italie, le Portugal… Et nous arrivons à la thématique présentée sous forme de menu découverte pour deux (incluant une bouteille de vin), de menu individuel et de "Plateau dégustation"… soit toute la table d’hôte pour deux! Quel gourmand dirait non? Surtout que notre serveuse, toujours aussi accorte, nous le décrit, ce plateau, avec tous les détails possibles. Au moment où elle s’éloigne de nous, quelqu’un lui dit: "C’est ce qu’on va prendre, nous aussi." Le "nous" désigne quatre membres du groupe installé près de nous.
Un petit réchaud installé sur la table, et le service commence par de délicieuses "crevettes won-ton" enrobées et même hirsutes de tempura. Nous passons ensuite aux beignets de crabe et goberge, assaisonnés à souhait et accompagnés d’une sauce aux arachides bien relevée. Je m’emballe moins pour les "travers de porc" caramélisés au sucre du Yunnan, trop sucrés à mon goût. "Ça m’en fait plus", commente mon amie, car elle les adore. Au service suivant, nous avons droit à une échappée hors de Chine, soit un velouté de brocoli aux herbes de Provence qui fleure bon les vacances. Malgré un goût fort intéressant, il nous laisse en bouche une furtive âcreté due à l’excès d’herbes. Il est de plus très épais, trop épais – presque une compote. Arrive un troisième plateau chargé de victuailles: une savoureuse darne de flétan servie sur du riz cantonais malheureusement trop salé; du poulet fumé (vraiment maison) aux cinq épices et parsemé de sésame. Pas mal, la volaille, mais… le fumage l’emporte, et de loin, sur la saveur des épices. Dessous, un lit de vermicelle de soja à la sauce hoisin. Enfin, un énorme et goûteux rouleau nommé "croustillant de canard laqué aux shiitakes"; la farce comporte certes des shiitakes, mais rien n’atteste le "laqué" du canard effiloché qui en fait partie. Nous nous contentons de la napper de nuoc-mam à l’orange et d’en manger avec plaisir sans trop nous poser de questions. Après quoi, je laisse mon amie se régaler du chop suey, dont elle raffole.
C’est ici une tradition: vous avez le choix entre un dessert et un digestif. Notre serveuse nous les énumère avec cet enthousiasme souriant qui lui va comme une seconde nature. Malgré cela, je m’en tiendrai à un café. Ma compagne hésite un peu, pour la forme, puis se laisse tenter par des profiteroles (je me demande d’ailleurs pourquoi tant de gens disent et écrivent plutôt "profitéroles"). Elles sont nappées de sauce au chocolat noir. Je n’en prends qu’une minuscule bouchée – pour la forme, moi aussi.
La Faim de loup
2830, chemin Sainte-Foy
Québec
Tél.: 418 653-8310
Menu du jour à partir de 9,50 $
Table d’hôte thématique: 26 $
Menu découverte pour deux: 66 $ (vin inclus)
Plateau dégustation pour deux: 54 $
Souper pour deux (incluant boissons et taxes): 82,40 $
Légende /
grande table : 5 étoiles
très bonne table, constante : 4 étoiles
bonne table : 3 étoiles
petite table sympathique : 2 étoiles
correcte mais inégale : 1 étoile