Tournant le dos à l’entrée, la plus jeune des deux serveuses présentes semble occupée à je ne sais quoi et, sans se retourner, demande "vous êtes combien?" et autre chose du genre. Les trois clientes qui nous précèdent dans l’entrée répondent patiemment aux questions et, finalement, la jeune serveuse se retourne et les confie à sa collègue. Elle nous fait face et nous interroge du regard et je lui annonce que nous avons réservé. Cela ne lui fait ni chaud ni froid et elle nous conduit à la première table qui lui tombe sous les yeux dans la petite verrière. Un instant de réflexion, puis je me lève et la rejoins pour lui rappeler que nous avons pris la peine de réserver et que, dans ce cas, nous devrions avoir soit le choix des places, soit une bonne place déjà prévue pour nous. Elle soupire, appelle sa collègue, parlemente; cette dernière nous conduit machinalement dans la seconde verrière, après un petit détour dans la partie surélevée de la salle à manger. "Qu’est-ce qui leur arrive?" demande tout bas ma compagne. Nous rappelant l’excellence de l’accueil et du service dont nous avons plusieurs fois bénéficié dans cet établissement, nous nous disons qu’il y a peut-être eu changement récent de proprios ou de gérants. Les clients sont nombreux et tout laisse croire qu’il en est de même à l’étage. Cela sent bon partout et les mets qui passent feraient envie même à des gens repus. Nous commandons des apéros. Pour moi, une Cheval blanc. Ma compagne avait longuement hésité, fascinée comme toujours par la série étourdissante de martinis, puis avait fini par opter pour un verre de rosé (Villa Soleil, Côtes-du-Roussillon, 2006). Quelques minutes plus tard, ils nous sont servis avec le sourire – le premier de la soirée! Ma compagne pouffe: "Elle a vu que tu prenais des notes…" J’en prends peu, à vrai dire, car la faim me presse, les plats "environnants" donnent à voir tapas de toutes sortes, petites brochettes, pâtes, etc., et j’ai hâte de me décider. Racoleuse à souhait, la carte évoque la soupe de poissons, la salade crétoise, le fondant de foie blond de pintade au cognac, l’entrecôte de boeuf grillé, le confit de canard "en décliné", les côtelettes d’agneau, le "Fleuron de ris de veau…" et toute la panoplie de "Tapas grands crus" dont on n’a pas fini de faire le tour. Choix dit, choix fait. Nous n’attendons pas trop longtemps. "Au moins, la cuisine n’a pas changé", dis-je entre deux bouchées rapides. Le petit régal qui m’arrive regroupe calmars frits au citron, "souvlaki de poulet grillé", tataki de thon, salade thaï, ris de veau et crevette en friture au porto, tartare de saumon en charlotte de saumon fumé. On a oublié de nous apporter du pain et il nous faut en demander. Mon plat? Une panoplie harmonieuse de saveurs qui s’aiment bien, sans manque et sans excès – sauf dans le cas du tartare, légèrement trop salé. Sur le plan de la texture, je m’estime moins choyé: le poulpe est beaucoup plus coriace qu’il ne le devrait, le poulet grillé souffre de sécheresse et les calmars, bien que savoureux, se révèlent un (tout petit) peu moins tendres que la dernière fois. De l’autre côté de la table, on ne s’ennuie pas non plus: pétoncles et chorizo (sur le gril), avocat et crevettes au poivron, et… Tout à coup, nous ne savons plus qui a pris quoi: les tapas voyagent d’une assiette à l’autre à la vitesse de la lumière et, parfois, le même se tape un aller-retour. Mon amie entame son second verre de rosé. Le risotto frit, présenté sous forme de croquette, nécessite un partage d’urgence; un morceau de souvlaki croise un peu de tartare suivi d’une bouchée de paëlla "Valence" (pétoncles, crevettes, moules, tomates, chorizo et petits pois). Si bien partis, pourquoi s’arrêter? Je passe une nouvelle commande, histoire de vérifier que tout est bon. Mon amie prévient qu’elle ne m’aidera pas. Elle change d’idée à la vue de ma "brochette de poisson" – en fait, un gros cube de saumon sur un cure-dent. Elle accepte de m’en soulager, vu que (je me répète, évidemment) je n’aime ce poisson que fumé ou cru. Elle goûte au "grilleton de canard", pas aux petits oignons, et nous nous extasions tous les deux en dégustant le plus lentement possible un extraordinaire fondant de foie agrémenté de confiture d’oignons. Après quoi, il ne nous reste qu’à fournir l’effort nécessaire pour nous lever de table et gagner la sortie. L’auto me semble loin, loin…
Café Sirocco
64, boulevard René-Lévesque Ouest
Québec (Québec)
Téléphone: 418 529-6868
Menu du jour à partir de 9,95 $
Table d’hôte: 20 à 26 $
Souper pour deux (incluant boissons et taxes): 58,97 $
LÉGENDE
Grande table:
Très bonne table, constante :
Bonne table :
Petite table sympathique :
Correcte mais inégale :