Restos / Bars

La Montée : Monter, toujours plus haut

Un déménagement qui crée de telles attentes, c’est plutôt rare. Oubliez La Montée de lait, voici La Montée, tout simplement. On n’est pas près d’en redescendre.

Quitter le Plateau pour s’installer au centre-ville: le pari est risqué. Mais les associés de La Montée de lait, qui a fait les beaux jours de la rue Villeneuve, n’en pouvaient plus de leur minuscule local. Depuis les débuts de leur succès, ils ne cessaient de refuser des clients. Des centaines par semaine, parfois. Quand l’occasion s’est présentée, ils ont sauté dessus. Les voilà maintenant dans un bel immeuble de pierre sculptée, rue Bishop. Tout un choc. Deux salles au rez-de-chaussée, une à l’étage. Un design sobre, très actuel, aux murs blancs et courbes croisant le mauve et le beige. À l’entrée, la cave est installée derrière de grandes vitres. De quoi faire saliver l’amateur de vins. La cuisine est accessible par un escalier. D’ailleurs, il faut la traverser pour atteindre une salle spécialement conçue pour les groupes, qui dégusteront leur repas pas trop loin du chef, le sympathique Martin Juneau. Mais derrière le nouveau décor, la table n’a pas trop changé. Toujours axée sur les vins et les fromages. Les vins, importés spécialement, auxquels on accorde une place de choix, dans une carte de 20 pages, avec des propositions pour tous les goûts, à tous les prix.

LES PLATS

Ce ne sont pas des tapas. Pas des grignotines à partager, mais bien des plats qui semblent tombés dans un piège de Jivaros. Ou dans les mains soigneuses d’amateurs de bonsaïs, si vous préférez. Bref, des plats complets, mais à la taille réduite. Une nutritionniste longiligne vous recommanderait probablement deux assiettes seulement, vu les portions. Nous, comme on est au restaurant quand même, on vous conseille trois plats pour les petits appétits, quatre pour les bonnes fourchettes et cinq pour les vrais gourmands. Au-delà, je ne vous garantis pas que vous sortirez de là sans quelques lourdeurs d’estomac…

Très belle soupe, pour commencer, tiens. Du panais velouté rehaussé de crosne et de shiitaké. Tout ça biologique et savoureux. Du fromage, maintenant, un chèvre frais "mais chaud" servi sur un pancake d’aubergine étonnant, accompagné de confiture d’oignon et de moût de raisin. Subtil. Le maquereau, ensuite, qui semble revenir en force dans les restaurants: cette fois-ci, il est cuit "à la torche" et accompagné de fenouil croquant aux agrumes et d’une réduction de jus d’orange. Joli contraste.

Dans la catégorie humour: "Ceci n’est pas une bouillabaisse". En effet, mais plutôt un beau morceau de flétan serti de palourdes que l’on arrose d’un bouillon dense au fumet très maritime. Le bord intérieur du bol est peint d’un large trait de sauce rouille. Très amusant de lécher la bordure avec un morceau de poisson. À côté, un granité de pastis donne de la vigueur au bouillon. Nouvelle entorse à la tradition: la carbonara, qui n’a rien à voir avec celle que vous connaissez. Sauf les ingrédients: il s’agit en fait d’une épaisse tranche de lard braisée à la chair tendrissime nappée d’une gelée de persil et décorée d’un jaune d’oeuf cru. Sur le coin, une belle pâte farcie à la crème de padano. Beaucoup trop de sodium et de gras saturés pour notre amie la diététicienne, mais quel régal cochon!

Tout aussi ragoûtant: un filet de veau cuit sous vide servi façon "vitello tonato". Entendez qu’ici, il est flanqué d’un cube de thon tiède et de mayonnaise.

Un des tops de la soirée, je le garde pour la faim: la poitrine croustillante de porcelet de lait. Éblouissante, elle a fait de nombreux jaloux. La croûte confite et laquée de mélasse, la purée de courge et de rosette de Lyon, le yogourt moutardé: un très grand moment de bonheur.

LES DOUCEURS

Les desserts sont des plats à part entière à inclure absolument selon votre échelle vorace. Régalez-vous donc de ce pot de crème au chocolat noir et de sa compotée de cerises servie avec des biscuits spéculoos, ou de ce riz au lait au caramel au beurre salé et son crumble d’agrumes: inouï. Ou encore de cette tarte à l’érable avec-de-la-croûte-tout-autour-mais-pas-en-dessous et sa petite pomme au four. Quel talent!

EMBALLANT /
Tout: les plats ingénieux, les saveurs affriolantes, la présentation, toujours soignée. Le service, fin et connaisseur, l’ambiance, chico-bistro, les accords mets et vins, toujours judicieux. Et surtout, surtout, la table nº 20. Celle du bout, grande et ronde, parfaite quand on reçoit de la visite du fin fond de l’Ontario. Merci, les filles, quelle belle soirée! Allez, c’est vrai: La Montée est un de nos coups de coeur de l’année.

DÉCEVANT /

La qualité de ce resto en fait aussi un défaut: le prix unique, 15 $ l’assiette, se justifie moins pour certains plats, notamment pour la soupe. Même si elle est excellente et biologique.

COMBIEN? /

De 20 $ à 30 $ le midi. En soirée, 45 $ minimum par personne pour trois entrées. Les quatre: 55 $, les cinq: 60 $.

QUAND? /

Les midis, du lundi au vendredi, de 11 h 30 à 14 h 30. En soirée, du lundi au samedi, de 17 h à 23 h.

OÙ? /

La Montée
1424, rue Bishop (entre De Maisonneuve et Sainte-Catherine)
514 289-9921
www.lamontee.ca

Pour d’autres critiques, consultez le site www.guiderestos.com