Chez Roger est sans nul doute un lieu "historique": bar de danseuses dans les années 20, taverne d’ivrognes dans les années 40, établissement "Bienvenue aux dames" dans les années 80. Par la suite, il devait tomber dans un coma éthylique jusqu’à ce que, début 2000, un nouveau proprio lui fasse subir une cure de désintox pour créer un double lieu qui attire aujourd’hui une crowd urbaine et décontractée: le Bar Chez Roger d’un côté et le Bistro Chez Roger de l’autre. À la même époque, l’animatrice Christiane Charette a contribué à le faire connaître en y enregistrant son émission télé Charette en direct. Ne manquait plus qu’un chef-vedette pour en faire un lieu phare du quartier. C’est maintenant chose faite: depuis l’été, la cuisine du bistro est sous la supervision non pas d’un, mais de deux chefs-proprios, Mathieu Cloutier et Jean-Philippe Saint-Denis, du Kitchen Galerie.
Chez Roger en a parcouru du chemin depuis plus de huit décennies! Le bistro affiche un look chic et chaleureux, avec ses planchers de bois, ses murs de pierres crème et ses banquettes de cuir chamois. Un comptoir fait face à une grande cuisine moderne et ouverte sur la salle, où chefs et brigade n’ont rien à cacher. Les plats qui en sortent sont gargantuesques, dont certains gorgés de foie gras, dans la lignée de ceux du Pied de Cochon. Tout comme l’atmosphère survoltée. Chez Roger, parler fort, débarquer avec sa gang, rire à gorge déployée et chanter "Bonne fêêête" à tue-tête sont de mise.
À TABLE!
Condensé du menu du Kitchen Galerie, celui du Bistro Chez Roger en présente les greatest hits. On y retrouve, entre autres, l’offre de foie gras et les plats signatures comme la côte de boeuf rôtie, le poisson entier et le surf’n’turf.
Pour l’entrée, je me suis laissé tenter par le crab cake, histoire de comparer avec celui que j’avais dégusté récemment pour vous au Seingalt et qui m’avait laissée sur ma faim. Celui du Bistro Chez Roger, tout dodu, m’a réconciliée avec les crab cakes. D’une grande suavité, sa purée de chair de crabe cachée à l’intérieur d’une coque de chapelure craquante était ravivée par une mayo au piment sambal oelek. L’équilibre entre le croquant et le moelleux, entre le doux et le piquant était plus que satisfaisant. C’était délectable.
Pour le plat principal, j’ai également succombé au jeu des comparaisons: j’ai commandé le fish’n’chips de morue pour voir s’il surpassait celui du Burgundy Lion, qui m’avait épatée. Malheureusement, celui de Chez Roger n’a pas réussi à détrôner celui du Burgundy au top du palmarès. Le poisson goûtait un peu l’eau, la panure n’était pas assez croustillante.
Mon invité a choisi en entrée la chaudrée de palourdes au chorizo, plat convivial s’il en est un. Il n’a pas regretté son choix. Présentée dans une petite soupière, la fumante et veloutée soupe représentait le summum du comfort food. Le riche bouillon de volaille, que la serveuse est venue verser à la table sur le contenu de la soupière, était parfumé avec justesse par le goût fumé de minuscules morceaux de chorizo. Un mariage parfait.
En plat principal, il a opté pour la joue de boeuf braisée, autre plat rustique et réconfortant. La viande, longuement mitonnée, était d’une tendreté exemplaire. Elle était submergée dans un bouillon intense (mais un peu trop sucré) qui recelait des pommes de terre rattes, des haricots verts et des légumes-racines (carottes, betteraves jaunes, panais).
Moyennant un supplément de 20 $ chacun, nous aurions pu commander un "Super size me", c’est-à-dire un morceau de foie gras poêlé et truffes noires, mais l’appétit nous a fait défaut.
PETITES DOUCEURS
Micro, la carte des desserts se résume à quatre choix: tarte au citron, crème brûlée, gâteau au fromage et crémeux au chocolat. Le premier est une petite tartelette dont l’appareil sucré, généreux et coulant, est coiffé d’une meringue également coulante. Le dernier, une crème au riche chocolat, se présente dans un verre surmonté d’une spirale de crème fouettée. Les deux sont riches, généreux, gorgés de sucre et… difficiles à terminer puisqu’ils succèdent à des plats pantagruéliques. N’en jetez plus, la panse est pleine!
EMBALLANT /
La générosité et la "cochonceté" des plats. L’atmosphère décontractée et animée.
DÉCEVANT /
La cuisine ouverte sur les charbons de bois ardents du gril dégage une chaleur… accablante. Un endroit idéal pour les soirées d’hiver sous les moins vingt. Tout de même, prévoyez de porter un t-shirt ou un chemisier léger sous votre doudoune.
COMBIEN? /
Pour une entrée (de 5 $ à 11 $), un plat (de 15 $ à 32 $) et un dessert (6 $), comptez en moyenne 80 $ pour deux avant taxes, vin et service.
QUAND? /
Du mardi au samedi, de 18 h à 23 h.
OÙ? /
Bistro Chez Roger
2316, rue Beaubien Est à Montréal
514 593-4200
www.barroger.com