Restos / Bars

Loranger : Féminin pluriel

Femmes, fourrure et fusion… La gérance, la déco et la cuisine du restaurant Loranger, nouveau venu dans le Vieux-Montréal, vivent sous le signe de trois "f". Séduisant.

Dire qu’il n’y a pas plus tard qu’un an était planté là le décor de La Boucherie, le "mythique" restaurant de Pierre Marcotte et de Shirley Théroux. Depuis environ huit mois, le steakhouse et ses pièces de boeuf ont cédé leur place (et 30 ans d’activités) au Loranger, un établissement au décor sobre, chic et design et aux plats raffinés et actuels.

Dès l’entrée, le ton est donné: un gros bloc recouvert de vison synthétique cache derrière ses panneaux… une penderie. Côté cour, un long bandeau de fausse fourrure court le long du mur de brique. Côté jardin, un carré constitué des mêmes poils bruns fait office de tableau. Dans la salle, les tables sont doublement nappées de blanc, donnant l’effet d’une jupe à volants.

Il y a un je-ne-sais-quoi de féminin qui flotte dans l’air. On comprend quand on apprend que la propriétaire est une femme, Pascale Loranger, que sa mère a signé la déco, et que la cuisine a été prise d’assaut par une chef et sa sous-chef. Dans les assiettes, les présentations sont délicates. De façon subtile, le convive est plongé dans un univers féminin. Un fait rarissime dans ce territoire occupé majoritairement par des "toqués" masculins.

À TABLE!

Pour nous faire patienter, le serveur (Charles-Olivier, très sympathique et liant) apporte des amuse-bouche: un tartare de thon servi sur une mince biscotte et appuyé par une brunoise de daikon. Tout est très délicat, côté saveurs et quantités.

Les entrées que nous choisissons sont aux antipodes l’une de l’autre. Autant celle de mon convive (un savoureux et réconfortant bouillon de boeuf où flottent des lamelles de shiitake, un médaillon de poisson et des baluchons-wontons) se situe dans les notes chaudes et terriennes, autant la mienne joue dans le registre du froid et de l’aérien. J’ai dans mon assiette une réinterprétation d’un rouleau de printemps dans lequel la viande de porc est remplacée par du canard confit, et la pâte de riz par des feuilles de chou chinois. Original et goûteux, mais le chou, un peu coriace et élastique, rend la mastication malaisée.

Côté plat, mon convive choisit une épaule d’agneau braisée. Celle-ci est déposée sur un lit de quinoa trempant dans un jus riche et concentré. Les condiments utilisés pour parfumer la pièce de viande nous transportent dans une médina marocaine. Pour ma part, j’opte pour les pétoncles. Cuits à l’unilatéral, ils sont joliment présentés sur un lit de couscous d’Israël, un grain qui, par sa grosseur, s’apparente davantage à l’orge qu’au couscous. La texture est crémeuse comme un risotto. L’ensemble est dominé par une pointe de cari doux. Le tout est bien équilibré et les portions, généreuses.

À la description de ces plats, vous aurez sans doute deviné que la chef s’inspire des cuisines asiatique et méditerranéenne pour redonner un nouveau souffle à la cuisine française qui lui sert de base. La cuisine fusion représente toujours un défi, que la chef du Loranger, Sandra Cousillas, relève avec savoir-faire et sensibilité!

PETITES DOUCEURS

Pour les desserts, nous n’avons pas à nous casser la tête. Il y a deux choix, et nous sommes deux. Reste à décider qui prend quoi. Étant une bibitte à chocolat, je choisis évidemment le mi-cuit. Celui du Loranger se présente sous la forme d’un long rectangle plat très riche en chocolat, à la texture d’un brownie léger. Il est nappé d’une marmelade aux agrumes où domine le pamplemousse. Quelques traits d’un délicieux caramel "dulce de leche" font office de décoration. Mon invité n’a pas le choix (mais il est très content quand même) de goûter à l’autre dessert, un feuilleté aux pommes auquel la chef a eu la bonne idée de ne pas ajouter de cannelle. Les deux desserts sont réalisés maison.

EMBALLANT /

– Le feeling d’être plongé dans un univers féminin, une rareté en restauration.
– La délicatesse des saveurs et des présentations.
– La vue, majestueuse, sur la coupole bleutée du marché Bonsecours.

DÉCEVANT /

– Avant de me pointer dans un restaurant, j’aime bien visiter son site Internet. Celui du Loranger n’est vraiment pas à jour. On y présente encore un chef étoilé Michelin alors que ce dernier n’y officie plus. Même les heures d’ouverture ne correspondent pas à la réalité.
– Le pain aux olives était froid et pas assez cuit.
– Dans un restaurant qui se dit gastronomique, on serait en droit de s’attendre à une carte des vins plus élaborée et à du thé Earl Grey un peu plus sophistiqué qu’un sachet de Twinings.

COMBIEN? /

Les entrées se déclinent de 8 $ à 26 $ (foie gras), les plats de 29 $ à 45 $ (homard entier décortiqué) et les desserts, à 10 $ chacun. Ce n’est pas donné, mais on navigue dans le spectre des prix pratiqués dans le Vieux.

QUAND? /

Le midi, de 11 h 30 à 14 h 30, du mardi au vendredi; le soir, à partir de 17 h 30, du mercredi au samedi.

OÙ? /

Loranger
343, rue Saint-Paul Est dans le Vieux-Montréal
514 866-1515
www.restaurantloranger.com