Restos / Bars

Le Kaméléon : Effet boeuf

Aussi chaleureux qu’inattendu, Le Kaméléon s’avère une heureuse découverte à plus d’un titre.

Accueil enjoué, service cordial et empressé: voilà pour le côté chaleureux. Inattendu? Parce que je pensais me retrouver dans un bistro comme les autres et qu’une carte trop variée suscite au moins une vague méfiance. Sur les murs de briques rouges, des affiches laminées et de grands miroirs se relaient de loin en loin. De ma table, j’entrevois des bouteilles de vin nichées au fond de la pièce, sur la droite. Plus près de nous, le bar, illuminé, rutilant. "Ah, vous copiez notre carte pour prendre nos recettes!" lance en riant la jeune serveuse qui nous a reçus. Sur les pages de mon calepin, en effet, mon stylo mène déjà un train d’enfer. Nous avons bientôt droit à une brève "visite" du chef. "Caméléon pour s’adapter à toutes les tendances, cuisine moléculaire pour se distinguer des autres": c’est à peu près en ces termes qu’il définit son établissement. Il nous parle de sa façon de faire et promet de revenir pour une petite démonstration. Ma curiosité se relègue d’elle-même au second plan, laissant toute la place à une faim qui s’élance dans toutes les directions. Escargots en tulipe, crevettes Singapour, pétoncles de Gaspé, saumon fumé en fleurs, sushis, burger espagnol… Mon amie s’accorde une longue halte du côté des salades (Chin-Chin, au thon, au poulet thaï…), revient aux entrées, commente à mon intention des plats de viande tels que les escalopes de veau et la côte de boeuf Angus. Poulet du général Tao, fajitas de crevettes ou de poulet, pâtes à toutes les sauces, des pizzas diversement garnies, puis les fruits de mer, sans parler de la table d’hôte gastronomique: tout cela surexcite la faim et donne soif. Je m’octroie deux gorgées de Moretti, mon amie une rasade de vin blanc (Folonari, Pinot Grigio, 2007). On nous a prévenus que les plats étaient copieux: je me passe d’entrée, tandis que ma compagne se laisse tenter par une salade, laquelle arrive aussi colorée qu’un petit jardin choyé. Éclats de poivrons et tomates cerises entières ponctuent de rouge les différentes nuances de vert des feuilles de chêne et des jeunes pousses. Fraîche, croquante, elle s’épanouit en bouche sous l’effet d’une vinaigrette moléculaire à base de pamplemousse et de sirop d’érable. Les plats suivants? Impressionnants. D’abord, la gigantesque côte levée (annoncée comme une "demie") servie en face de moi, escortée d’un riz moucheté de petits légumes et d’une verrine pleine de sauce. La viande, d’une qualité irréprochable, est d’une extrême tendreté et a un goût de… viande. Pour moi, une assiette tout aussi imposante. Une salade composée, de couleur franche (comme si elle n’avait pas été cuite), combine pâtissons, petits poivrons jaunes, tomates cerises et bulbe de fenouil. Une cuisson modérée en a préservé toute la saveur. J’ai des frites en abondance. L’essentiel occupe le milieu de l’assiette: un filet mignon de boeuf Angus AAA, épais comme ce n’est pas possible, coiffé d’une tranche de brie qui n’a pas fini de fondre sous l’action de la chaleur, et quatre langoustines posées çà et là. Ma sauce aux champignons dans une mini-flûte, du beurre à l’ail dans un petit bol: j’attaque. Il y a longtemps que je n’ai pas ressenti un tel choc en mangeant un filet mignon. Ça vous jute du bonheur dans la bouche et un petit frisson frétille le long de votre colonne vertébrale. Cette viande, ce n’est plus de la tendreté, mais de la tendresse! Mon amie, elle, commence à s’essouffler. Elle se commande un autre verre de vin pour s’encourager à en finir avec le dernier vestige de la côte levée. Plus tard, bien plus tard, le chef revient nous voir avec un petit attirail: dans l’azote liquide qui semble bouillir au fond d’un récipient, il plonge tour à tour ce qui devient des sorbets instantanés qu’on dépose sur la langue. Il vous suffit de fermer la bouche et de déguster les saveurs exaltées par le froid intense, tout en expirant par le nez un nuage de vapeur fraîche. C’est "l’effet du dragon".

Le Kaméléon
27, rue Sainte-Angèle
Québec (Québec)
Téléphone: 418 692-3835
Menu midi "Petit appétit": 7,95$
Table d’hôte du midi: 13,95 à 25,95$
Table d’hôte gastronomique à partir de 25,95$
Souper pour deux (incluant boissons et taxes): 112,20$

LÉGENDE

Grande table:
Très bonne table, constante :
Bonne table :
Petite table sympathique :
Correcte mais inégale :

Pour d’autres critiques, consultez le site www.guiderestos.com