Restos / Bars

Le Bistingo : Les bourlingueurs

Quand deux restaurateurs-voyageurs décident de s’installer à Montréal pour relancer une jolie table: Le Bistingo.

Florent Risser et Benjamin Eber ont la bougeotte. Le premier, chef et le second, serveur, arrivent tout juste de la Martinique où ils ont tenu un resto pendant deux ans. De l’Alsace à Barcelone, en passant par Monaco, ils ont déjà avalé pas mal de kilomètres. Considérant qu’ils avaient fait le tour de cette île des Antilles alors en pleine crise sociale, ils se cherchaient une nouvelle étape et entendirent parler, beaucoup, de la métropole québécoise. De bons produits, une ambiance sympathique, Montréal serait-elle considérée comme la Barcelone du Nord? C’est bien gentil.

En tout cas, un mois après leur arrivée, ils semblent ne pas regretter leur choix. En fouinant, ils sont tombés sur un resto que les proprios avaient fermé pour repartir en France: Le Bistingo. Et les voici sous le charme de cette petite table (tout juste 24 places à l’intérieur, 24 autres en terrasse) de l’avenue Van Horne, dans le ravissant quartier d’Outremont. Un coup de peinture, de nouvelles lampes, de beaux fauteuils cossus à la place des chaises en bois, voilà pour la transformation. Et une nouvelle carte, bien sûr. Une cuisine du monde empruntant aux sentiers préférés de nos deux baroudeurs: France, Italie, Espagne et même quelques touches antillaises et asiatiques.

AU MENU

La table s’appelle toujours Le Bistingo. Un bistro distingué. Le service de Benjamin est efficace et soigné. Un peu bavard, mais c’est parce qu’il aime parler des plats, qu’il connaît sur le bout des doigts. Beaucoup d’attention, également, portée aux petits cadeaux, comme cette mise en bouche en cuillère, un morceau de maquereau mariné sur fenouil et agrumes. Bouchée sensuelle et savoureuse qui met l’accent sur le produit. Ça commence bien.

Le chef aime mettre de la couleur dans ses plats et dans les intitulés, comme ce velouté de carottes à l’orange et gingembre, à la coriandre fraîche. Ou cette brandade de morue safranée, avec julienne de pomme acide. Le canelone d’espadon est surprenant. Le filet de poisson est roulé comme la pâte italienne, garni de roquette et de fraises. Un mariage épatant, rehaussé de pignons de pin grillés et d’un filet de réduction de porto. Un exercice d’équilibre réussi. Moins convaincante, la salade romaine aux crevettes marinées au masala tandouri souffre d’imprécisions: vinaigrette presque absente, traces de parmesan râpé, crevettes sèches, l’ensemble est malheureusement un peu banal. Et ne vaut surtout pas le 15 $ demandé.

N’espérant qu’une erreur de parcours, nous buvons avec optimisme le second cadeau de la soirée: une soupe froide d’asperges au poivron rouge rafraîchissante, tel un trou normand.

Passons maintenant aux choses sérieuses: les viandes. Le filet mignon éblouit le carnivore car la pièce est généreuse. La cuisson, saignante, est impeccable. La sauce, un jus de viande court, tire un joli trait d’union avec le risotto au vin rouge et une délicieuse brochette de blancs de poireaux grillés, glacés à la réglisse. La souris d’agneau cuite sept heures est un classique. La chair est tendre, agrémentée de légumes-racines et d’une pomme fondante, soutenue par une sauce coulante au fromage Pizy, un petit trésor de Lanaudière. Pas mal du tout!

Notez que le chef s’occupe aussi très bien des poissons. Le filet de turbot et sa salsa de mangue et citron vert est servi avec une fine purée de topinambours, et le bar rayé, qui a visiblement séduit la table voisine, est apprêté à la sauce romesco (tomates et ail confit, amandes), accompagné de tranches d’artichauts poêlés et de pointes d’asperges croquantes.

AU DESSERT

On prépare avec autant de soin les desserts, comme cette gourmande tarte au chocolat intense parsemée de poires pochées. La joue de mangue est rôtie à la vanille de Madagascar et décorée de zeste de citron vert, d’un sorbet à la mangue et d’un coulis de mangue au ras el hanout. Un point faible: la chair était fibreuse. Dommage!

EMBALLANT /

Un bon départ pour nos deux acolytes, à qui nous n’avons pas laissé beaucoup de temps pour s’adapter. Ils nous promettent une belle table, qui ne peut que s’améliorer alors que nous entrons dans la belle saison. Ils auront sans doute beaucoup de plaisir à découvrir les produits du Québec d’ici les prochains mois. C’est bon signe.

DÉCEVANT /

Le chef hésite parfois à mettre le turbo. Un peu trop doux, le démarrage, même si c’est subtil. Il suffira de pousser la machine à saveurs pour que tout aille bien. La carte des vins est intéressante, mais on souhaiterait, en fins connaisseurs qu’ils sont, un peu plus d’importations privées. Ça viendra sûrement.

COMBIEN? /

C’est un peu compliqué. Menus "découverte" de 26 $ à 30 $. Menus "saveur" de 29 $ à 35 $. Menu gastronomique à 52 $. Et à la carte, comptez un minimum de 40 $ par personne. On vous expliquera tout cela sur place. À midi, intéressante table d’hôte à 18 $.

QUAND? /

Du mardi au dimanche, de 11 h 30 à 14 h 30 et dès 17 h 30.

OÙ ?/

Le Bistingo
1199, avenue Van Horne, Montréal
Réservations recommandées: 514 270-6162

Pour d’autres critiques, consultez le site www.guiderestos.com