Difficile d’expliquer cette sensation de bien-être. Celle qui vous dit que vous êtes au bon endroit. L’accueil sympathique et professionnel, le local chaleureux, la carte alléchante? Ou simplement la table près de la fenêtre? Le talent du restaurateur, c’est aussi celui de créer cette ambiance unique, accueillante. Le vaste local, celui de l’ancien traiteur-restaurant La Forchetta, n’a gardé qu’une cinquantaine de places. De l’espace, donc, et de la classe: boiseries, murs de briques, grand comptoir gardent un esprit zen. Assis à la fenêtre, on s’amuse beaucoup à zieuter la faune locale qui défile avenue Laurier: styles éclectiques mais toujours soignés. Il faut aussi voir Jaguar et Mercedes s’arrêter, une blonde pimpante et mince sortant par la portière de droite et attendant que la grisonnante tête d’à côté trouve une place où se garer… Certains soirs, il y a aussi ce que j’appelle "l’effet The Gazette". Vous en ai-je déjà parlé? Des tonnes d’anglos, souvent âgés, déferlant dans les restaurants les jours suivant la parution d’une chronique gastronomique. On les repère, franchement, facilement. Toute une ambiance!
LES PLATS
La veille, c’était bien calme. Car on s’est repris à deux fois pour bien profiter de ce Salute. La raison était simple: les portions. Tellement généreuses qu’après le plat principal, impossible d’avaler un dessert. Alors, le truc? Partager. Ou simplement profiter de deux entrées pour pouvoir se délecter des merveilleuses sucreries.
C’est aussi lors du deuxième passage que la tête du chef a fini par me dire quelque chose. Mais oui, c’est bien Angelo Balagio, de l’ancien Alto Palato! Un excellent restaurant qui a malheureusement fermé, et dont je fréquentais assidûment les repas du midi. En 2003, j’écrivais être tombé en amour avec la cuisine du chef. Bonne nouvelle, Angelo a gardé ce sens du produit, de sa fraîcheur et de son intégrité. Même les tomates, alors que la saison n’est pas commencée, il sait les choisir, les soigner. La farandole (deux variétés de tomates) est tout simplement rehaussée de fines tranches de ricotta et d’un léger pesto de basilic. Et de coeurs d’artichauts tout frais, bien nettoyés et surtout joliment croquants. Un petit délice.
Notez bien que vous ne dégusterez peut-être pas les plats que nous vous décrivons ici: la carte est en voie de reconversion. Le chef et son équipe en ont apparemment plein les bras. Elle sera donc épurée, ce qui diminuera sûrement la tension qui semble régner en cuisine. En cuisine ouverte, imaginez, en plus. Quelques classiques devraient rester, comme le tartare de saumon, m’a-t-on promis. On leur souhaite surtout de trouver un filon plus zen!
Ce tartare, d’ailleurs, est bien réussi. Servi sur de l’avocat en dés, fleurant bon le basilic. La simplicité du bon goût. Plus riche, l’entrée de raviolis aux cèpes dans un jus de viande court et savoureux vous envoie directement au paradis. La tarte de tomates confites, sur sa pâte croustillante, est décorée de fromage de chèvre, dans un jeu d’équilibre réussi. Sympa!
Honnêtement, je ne vous recommande habituellement pas les plats de saumon grillé. Car ce poisson est devenu un peu banal, et il y a tant de choix chez le poissonnier. D’ailleurs, il était un poil trop cuit. Mais c’est pour l’accompagnement qu’il faut s’y attarder: un risotto au citron vert et mascarpone à la fois croquant et crémeux, à la pointe d’acidité revigorante. Deux asperges parfaitement rôties terminent ce plat encore une fois d’une simplicité désarmante.
L’osso buco devrait disparaître de la carte. Pourtant, il est diablement bon, avec son os à moelle présenté à côté, son rapini justement poêlé et sa sauce pleine de sucs savoureux. En plat de pâtes, de grosses pennes dans une sauce à la viande crémeuse, avec rapini et chair à saucisses, plutôt roboratif. Parfait.
DOUCEURS
Cette carte doit aussi changer. Mais on me promet que les churros, ces fantastiques petits beignets (il y en a cinq), resteront. On les trempe avec plaisir dans une sauce au chocolat intense, ou dans un dulce de leche comme un caramel au beurre salé, accompagné d’une crème glacée aux amandes. Trop cochon!
EMBALLANT /
La cuisine, vous l’aurez compris. Un (presque) sans-faute pour les recettes d’Angelo, qui nous ravit avec sa justesse et son amour des bons ingrédients.
DÉCEVANT /
Si la cuisson approximative du saumon était due à la tension en cuisine, alors oui, épurez la carte, les amis. Un menu plus court et bien sélectionné fera de ce Salute un véritable incontournable de l’avenue Laurier. La carte des vins? Intéressante et à bons prix, certes, mais elle manque encore de propositions inusitées.
COMBIEN? /
Il vous faudra compter environ 20 $ le midi et 40 $ le soir par personne pour profiter amplement de ce joyeux festin. Chanceux, va!
QUAND? /
Les midis de semaine de 11 h 30 à 15 h. En soirée, du lundi au samedi, de 17 h 30 à 23 h.
OÙ? /
Salute
234, avenue Laurier Ouest, Montréal
Réservations: 514 273-9378
Pour d’autres critiques, consultez le site www.guiderestos.com