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Bouchonné : Au paradis des tire-bouchons

La cuisine française est indissociable du vin. Au Bouchonné, on mise d’abord sur le cellier, rempli de curiosités. Et pour accompagner les bonnes bouteilles, des petits plats bien mitonnés.

Du minuscule mais charmant cagibi de la rue Fairmount à ce superbe pied-à-terre boulevard Saint-Laurent, le Bouchonné, ce bar à vin créé par l’équipe du restaurant La Montée, a bien fait de déménager. Il profite maintenant d’un espace plus vaste. Et charmant, avec son allure vieillotte: portes et comptoir en bois massif, mur de brique, plafond forgé. Cet endroit semble avoir une âme.

La cuisine est ouverte, en forme de télé HD. De l’entrée, c’est spectaculaire. Et tant pis pour ceux qui trouvent que ça sent le graillon. Au mur, les bouteilles de vin et les ardoises donnent le signal: c’est un bistro. D’ailleurs, amateurs de bons pinards, vous aimerez le Bouchonné. La carte des vins est presque plus intéressante que le menu, c’est dire. Ne vous méprenez pas, ce n’est pas une manière polie de démolir la cuisine. C’est juste qu’ici, le menu est tout petit. C’est l’excuse, la bonne excuse, pour découvrir le cellier. L’occasion, exceptionnelle, de choisir le vin avant le plat. Les importations privées viennent surtout de France ou d’Italie. Côtes de Provence, Vinsobres, Vermentino: ou comment mieux comprendre les subtilités entre un assemblage de syrah-grenache et un syrah-merlot. Alors, vous êtes du genre floral ou plutôt cuir?

Au menu

La carte est signée Martin Juneau. Oui, celui qui trône en Une du Guide Restos Voir. Le beau bonhomme qui nous a offert La Montée, un des régals des dernières années. Et comme il ne peut pas se cloner, c’est Louis-Philippe Breton qui s’occupe des fourneaux du Bouchonné. Un menu en forme de tapas, essentiellement. On picoche, on goûte, entre deux gorgées de vin. Moi, j’ai tendance à qualifier ça de bonheur. Vous attendez votre invité? Ne vous gênez surtout pas. Ici, c’est permis: on commande un verre de vin et quelques bouchées qui vont avec. Par exemple, les oeufs de caille. C’est tout bête et pas cher: le jaune a été retiré, fouetté à la mayonnaise et saupoudré de paprika arménien et de ciboulette. Délicieux. Les rillettes maison? Avec du rouge, si vous préférez. Elles sont servies chambrées, tant mieux, accompagnées de quelques betteraves toutes douces. Un régal. Croûtons secs ou baguette tendre, c’est au choix.

Lors de ma précédente visite, j’étais tombé à la renverse en goûtant au "chopped liver". L’appellation anglo d’une recette typique de la cuisine juive. Des foies de poulet sautés puis hachés avec des oignons marinés. Ce plat est absolument fin et délicieux, et nous fait chavirer au-delà des plaisirs du bête pâté de foie, même gras. Petit tour du côté du tartare de saumon: ici préparé à la manière du boeuf. Donc moutarde (dominante), câpres, échalote et sauce Worcestershire. Honnêtement, la chair délicate du poisson ne se prête pas à l’aigreur du condiment principal. Mais ça, c’est vraiment une question de goût car le tartare, lui, est bien préparé.

Au-delà des assiettes d’entrées, le chef prépare tout de même trois plats principaux. Parmi lesquels une cuisse de canard confite sur lit de lentilles, un classique indémodable qui ne s’est pas renouvelé ici. Le plat a exactement la saveur attendue, ce qui n’est pas un problème en soi. À 16 $, faut dire, c’est une aubaine.

Le thon rouge est frit rapidement (pour en garder le coeur cru), façon tataki. Tendre, certes, mais sans assaisonnement, c’est un peu ennuyeux. Les frites qui l’accompagnent sont de qualité moyenne, malgré une sauce plus inusitée qu’une banale mayonnaise, de crème sure et d’ail.

Douceurs

Pourquoi pas plutôt un plateau de fromages? L’idéal pour un match amical entre croûte lavée au lait cru et bon cru! Mais si vous préférez conclure sur une note sucrée, on prépare une jolie poire pochée au vin, avec glace à la vanille. Un verre de moelleux avec ça?

Emballant /

Un gros plus pour la déco vraiment réussie. La carte des vins, qui "privilégie les vins nobles des appellations obscures; les vins obscurs des appellations nobles". Et un concept intéressant: ici, vous pouvez acheter des bouteilles à emporter à bon prix. Des vins de table plus qu’intéressants à partir de 20 $.

Décevant /

Des petites imperfections çà et là, comme le thon par exemple, mais rien de majeur.

Combien? /

Bon rapport qualité/prix, cependant! Comptez une quinzaine de dollars par personne le midi. En soirée, un minimum de 30 $.

Quand? /

Du lundi au vendredi, de midi à minuit. Le samedi, de 17 h jusqu’à tard dans la nuit. Brunchs les dimanches.

Où? /

Bouchonné
5171, boulevard Saint-Laurent (angle Fairmount), Montréal
Réservations recommandées à partir du jeudi: 514 273-8846 www.bouchonne.com