C’est immanquable. Chaque fois que nous ouvrons la carte de ce resto, nous nous rappelons en rigolant la blague de notre toute première visite: le martabak n’est pas un sacre mal prononcé, mais une entrée aux arômes d’Asie. Elle nous amuse toujours, sans doute parce que le décor sobre et beau du Ciccio porte à la détente, à une certaine légèreté d’humeur – à quoi nous prédispose déjà la cordialité de l’accueil. Allons-nous, ce soir encore, céder à ce petit délice mouillé de sauce asiatique, farci de porc et de crevettes au gingembre et à l’huile de sésame? Nous hésitons à répondre non, car nos regards y reviennent sans cesse, malgré toutes les autres sollicitations – panaché de mesclun au bocconcini, terrine de cerf aux pommes vertes et noisettes… Nous nous promettons d’y repenser une fois que nous aurons décidé de nos plats de résistance. Pour le moment, vivement l’apéro! Mon amie ne se fait pas prier pour commander un Campari soda. Pour moi, une Moretti. Viandes, pâtes, poissons… "Ah, je vais prendre les linguine Ciccio…" Je rappelle à mon vis-à-vis qu’elle les avait commandés la dernière fois, mais elle affirme que cela ne fait rien et, sur la même lancée, jette son dévolu sur une entrée de foie blond. Me voici maintenant tout seul dans l’embarras… du choix. Cannelloni di vitello piémontaise? Sais pas. Entrecôte aux trois poivres, pavé de saumon frais grenobloise, escalope de veau charcutière? Tiens! un médaillon d’autruche au porto… Finalement, passant outre la brochette de volaille marinée aux cinq épices, le duo de pétoncles et crevettes, l’entrecôte au roquefort, les filets d’agneau grillés au romarin, je convaincs ma faim qu’un risotto lui irait bien, surtout accompagné d’une casserole de fruits de mer provençale. Il ne nous reste plus qu’à attendre. Dans les haut-parleurs, Diana Krall jazze des états d’âme. K.D. Lang lui succédera. L’entrée servie en face de moi est un fondant de foie blond nappé d’une sauce aux cèpes chaude, crémeuse et gorgée de saveur, dans laquelle s’estompe la légère amertume résiduelle du foie. À chaque bouchée (lestée de bon pain), l’appétit s’en trouve excité et satisfait tout à la fois. En deux mots: délicieux et bourratif. Mon amie me laisse les coudées franches, sachant que la suite sera généreuse. Quand celle-ci s’amène, un peu plus tard, un verre de vin blanc sicilien l’a déjà précédée (Corvo, Duca di Salaparuta, 2008). Deux grandes feuilles de basilic s’étalent sur les linguine Ciccio garnis de porchetta et de champignons dans une sauce à base de crème, de vin blanc, de tomates et de pesto. Et dessus, à la demande, du parmesan râpé… beaucoup. "Ça goûte maison…" Je m’en assure, puis acquiesce d’un murmure, la bouche pleine. Ce qui m’est servi contenterait aisément deux personnes. Intimidé, je l’aborde tranquillement, par l’une des moules ouvertes (si dodues!) qui s’érigent tout autour de l’assiette. Puis une pince de crabe, puis une grosse crevette, puis un pétoncle moelleux. Bien qu’un peu claire, la sauce rosée se révèle goûteuse. Elle submerge de peu le risotto crémeux que je me décide enfin à goûter. "Qu’est-ce qui ne va pas?" J’ai dû froncer les sourcils sans m’en rendre compte. Rien, dis-je. Au lieu de me lancer le classique "Mais encore?", mon amie déclare avec assurance: "Pas assez cuit?" Je nuance: trop al dente. Je me sais… et elle me sait particulièrement difficile en ce qui concerne la cuisson du riz et des pasta. Cette fois, au moins, elle concède de bonne grâce: "Un peu trop." Mais ce petit détail n’atténue pas outre mesure le plaisir que procure ce plat parfumé, aussi savoureux que les légumes servis à part – bok choy, courgettes, poivrons. Qui saurait résister à la tentation des profiteroles au chocolat? Pas nous.
Ciccio Café
875, rue de Claire-Fontaine
Québec
Téléphone: 418 525-6161
Menu du jour: 12,95 à 20,95 $
Table d’hôte: 24,95 à 36,95 $
Souper pour deux (incluant boissons et taxes): 92,84 $
LÉGENDE /
Cuisine
Du grand art! Très bonne table Bonne table Satisfaisante Passable