Fromagers, ils sont. Et pas à peu près. Éric Proulx mène d’une main de maître depuis nombre d’années la Ferme Tourilli à Portneuf; Pascal-André Brisson, lui, produit l’excellente Tomme du Kamouraska – et dès cet automne, un bleu persillé – dans sa Fromagerie Le Mouton blanc, à La Pocatière. Comment ces deux travailleurs acharnés et artisans du pays ont-ils réussi à trouver le temps de démarrer l’an dernier L’Artisan et son pays, leur petite entreprise? Le mystère reste entier… Mais le succès, lui, se pointe le bout du nez.
En 2009, à la suite d’une année désastreuse côté fromages artisanaux québécois – comprendre crise de la listériose et réponse (très) musclée du MAPAQ -, les deux hommes se sont alliés devant la nécessité évidente, pour eux, de mettre en valeur les produits du terroir, de donner une vitrine aux artisans, bref, d’"expliquer le pays" aux citadins, indique Éric Proulx.
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Attablés à une table près de la fenêtre où on voit les passants déambuler dans la rue Saint-Joseph, les deux hommes m’expliquent leur cheminement. "On était à la merci de tout le monde, sans marge de manoeuvre, avec beaucoup d’intermédiaires avant d’arriver au consommateur, se rappelle Pascal-André Brisson. Ici, on vend directement au client, l’approche n’est pas la même… et certains de nos produits fromagers sont moins chers à cause de ça!"
"Notre concept est unique au Québec, car nous sommes des producteurs qui vendent leurs produits, évidemment, mais aussi ceux de plusieurs autres artisans que nous avons sélectionnés. Parmi eux, plusieurs travaillent manuellement selon un savoir-faire traditionnel", ajoute le producteur des fromages de chèvre Tourilli. Sur les tablettes et dans le comptoir réfrigéré, on trouve des produits de tous les horizons, dont plusieurs exclusivités: charcuteries, fromages, gibiers, poissons, mais aussi miel, champignons sauvages, épices forestières…
L’ajout d’un espace bistro s’inscrit en plein dans le mille de la mission à laquelle les fromagers se dévouent: développer et encourager une culture culinaire où le pays est représenté, et ses produits, apprêtés. "Nous allons offrir un menu rotatif, selon les saisons, où nous pourrons faire découvrir les curiosités qu’on a sur les tablettes. Car on a plusieurs produits méconnus, comme le pigeonneau, que les gens hésitent à essayer", explique Éric Proulx.
Car sans lieu de diffusion, il peut être difficile pour les urbains de développer une appartenance au terroir: "Nous voulons que le monde sente qu’il y a un pays habité hors des villes, continue Proulx. On garde même des journaux des régions, on souhaite que ça devienne un lieu de rencontre pour les ruraux qui ont émigré en ville!"
"Ceux qui ont le mal du pays, on les ramène ici!" conclut en riant Brisson.
L’Artisan et son pays
241, rue Saint-Joseph Est
418 522-6924
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SUR LES TABLETTES DE L’ARTISAN
Pigeonneaux Turlo: Quand on pense pigeon, on pense rarement assiette. Pourtant, le pigeon de chair est reconnu pour sa viande savoureuse – c’est en fait le pigeonneau qu’on déguste. Nicolas Turcotte et Rhéa Bélanger se sont lancés dans l’élevage en 2004 et tentent depuis de changer les perceptions autour de cette volaille méconnue au Québec. www.pigeonneauxturlo.com
Jos Paquet: Il est le dernier pêcheur commercial dans la région et il remonte à la surface, entre autres, anguilles et esturgeons, qu’il fume. Il déplore le manque de relève alors que l’heure de sa retraite approche. Des intéressés? www.poissonneriejospaquet.com
Épices d’Origina: Ces épices forestières 100 % québécoises sont décidément à découvrir! Un goût différent – essayez le poivre des dunes ou le thé du Labrador -, résultat de recherches menées depuis plusieurs années par la Coop forestière de Girardville dans la région du Lac-Saint-Jean. www.dorigina.com