Édouard Baer : Juste pour rire… et se régaler
Avec la pièce Miam miam présentée dans le cadre du Festival Juste pour rire, Édouard Baer invite les gastronomes à ne pas se prendre trop au sérieux. Entrevue à la bonne franquette.
"Dis-moi ce que tu manges et je te dirai qui tu es!" Pour nous, journalistes de la rubrique gastronomie du journal Voir, passionnés de restos, de bonnes bouffes, de bons vins et de produits savoureux, cet adage est quasiment une devise. Pour l’humoriste français Édouard Baer, c’est le point de départ de sa pièce de théâtre, justement baptisée Miam miam, qu’il vient présenter à Montréal dans le cadre du Festival Juste pour rire. Le pitch? Pour échapper à la colère d’un mafioso, une bande de comédiens se voit contrainte de transformer en quelques heures sa salle de théâtre en crise en restaurant à la mode. "Un resto, c’est un observatoire génial. Dès qu’on parle de nourriture, on s’intéresse à la transformation, à l’agriculture, aux problématiques qui concernent la faim, la soif. En France, où la croyance populaire affirme que "dans le cochon, tout est bon", c’est un sujet particulièrement important. Et puis au resto, toutes les conversations sont possibles: l’amour, les affaires, la famille… bref, on y a vue sur le monde", explique l’auteur et comédien. Connu des Québécois pour son rôle de scribe dans Astérix et Obélix: mission Cléopâtre, Édouard Baer a déjà été invité au Festival Juste pour rire en 2008 pour y présenter un Cabaret. Il garde d’ailleurs de Montréal de mémorables souvenirs gourmands. "Je suis allé au resto de sandwichs juifs Schwartz’s, ça m’a rappelé les films de Woody Allen et ce New York typique qui n’existe plus. Tout le monde voulait me convaincre de manger de la poutine, mais j’ai résisté. À la place, je suis allé au resto du fils de Charlebois (L’Assommoir, ndlr). C’était super. Cette fois-ci, je compte bien découvrir de nouvelles tables… D’ailleurs, vous n’auriez pas des suggestions?" demande-t-il, saisissant l’occasion de l’entrevue pour se faire recommander de bonnes adresses.
Resto-théâtre
"J’aime aller au restaurant parce que j’aime les surprises, l’improvisation. Comme au théâtre ou au cabaret. Il y a toujours des accidents, des rencontres, des hasards… J’adore les bistros, une cuisine pas trop transformée, pas trop maquillée. L’élégance au théâtre ou en cuisine, c’est quand les comédiens ou le chef te donnent l’impression que tout est simple et facile, alors que c’est le résultat de dizaines d’années de travail. C’est très émouvant", évoque Édouard Baer chez qui nous décelons la passion d’un véritable épicurien. "On se moque toujours avec plaisir des choses qu’on aime", affirme-t-il simplement quand on lui demande si sa pièce ose s’attaquer au "monument national" de la cuisine française. "Dans la pièce, c’est vrai, je tourne en dérision les prétentions de la gastronomie française et ses discours supérieurs boursouflés et grandiloquents. Je me moque de ceux qui pensent qu’en dehors de la France, il n’y a pas de cuisine digne de ce nom et qui veulent éduquer les "sauvages" en leur donnant à manger du foie gras… C’est vrai que c’est très poétique et délicat, le gavage des oies dans le Périgord!" remarque-t-il en riant.
De l’absurde en cuisine
Parade de comédiens déguisés en légumes, "complainte de la serveuse qui en a assez des mains au cul", chanson en l’honneur d’un cochon-marionnette dénommé Papinou qui a peur de passer à la casserole, dialogues bourrés d’ironie qu’il cite de mémoire au téléphone pendant l’entrevue: la table est mise! "Je n’aime pas l’humour trop direct. Voilà pourquoi je préfère passer par l’absurde. Si on accepte d’emblée que tout est sérieux, on étouffe! Et en ce moment, peut-être que la gastronomie se prend trop au sérieux… Il y a, par exemple, cette mode des plats avec des noms à rallonge que le serveur prend 10 minutes à présenter, interrompant pour chaque bouchée les conversations et déclamant: ce soir, on vous propose un émincé de porc de la ferme machin, élevé par le fermier truc dans le beau village de Truc-les-oies… Ce n’est plus un repas, mais une dégustation! La nourriture et le vin devraient amener la conversation sur autre chose, à mon avis, pas monopoliser l’attention des convives… Mais, et pour finir sur une touche plus politiquement correcte: heureusement, au milieu de ce ridicule, il y a des restaurateurs qui font bien leur boulot et chez qui on se régale! Et je suis un fervent admirateur du travail de nombreux chefs!"
Miam miam de et avec Édouard Baer, du 13 au 19 juillet à 20 h au Théâtre du Nouveau Monde
Dans le cadre du Festival Juste pour rire
Billets: www.hahaha.com; 514 845-2322
Édouard Baer animera également le Gala français Vidéotron Juste pour rire, le 23 juillet à 19 h 30 au Théâtre Saint-Denis.