Restos / Bars

Bien cuit : Ébats avec abats

Ce n’est pas toujours évident pour un chef de faire aimer les abats. Lorsqu’on les nomme, certains s’imaginent croquer dans un foie comme Hannibal, et si on cause boudin, d’autres se voient boire du sang…

J’aime bien dire pour la décence de nos abats qu’un steak, c’est une tranche de muscle… Un peu premier degré me direz-vous, mais ça arrive de temps en temps que je doive jouer d’astuce pour faire goûter de la langue par surprise, ou même de la délicieuse cervelle panée. Les victimes sont en majorité charmées et, quand vient le pot aux roses, la gueule leur tombe. "Oh mon salaud! Tu m’as fait bouffer ça! …C’est pas si mal après tout!" Il ne s’agissait que d’un peu de confiance et d’ouverture…

Après la répulsion, la passion? Je dirais qu’une fois la barrière tombée, les gens ne sont pas peu fiers et se poussent eux-mêmes vers l’aventure. Au resto, une bonne partie de la carte se compose de délicatesses saugrenues. Gésiers, langue, foie de veau, foie gras, ris et boudin sont des réguliers et ont leurs fans.

Pour les plus vieux, manger des abats, c’est normal. On abat la bête, on fait boucherie et ensuite on mange ce qui se périme le plus rapidement en premier. Pour les plus jeunes, l’expérience ressemble plus à Fear Factor… mais le seul risque est celui de bien manger. C’est aussi une belle réintroduction aux moeurs d’antan, aux plats d’enfance de nos aïeuls, avec un petit côté funky et sophistiqué.

ACHETER DES ABATS

Pour les abats de veau, viser le veau de lait. C’est plus doux et sucré. Le foie est rose pâle, les rognons bien doux, les ris ronds et dodus, la cervelle blanche et satinée. Le boudin doit impérativement être de porc et fait par de vrais charcutiers qui aiment la crème et les oignons. Pour la langue, c’est le boeuf, et du VSC (Viandes sélectionnées des Cantons) s’impose. Vous trouverez tout ce que vous cherchez chez Clément Jacques, et le meilleur boudin est vendu chez le saucissier du Marché de la gare. Voici une recette qui en mettra plein vos papilles.

RECETTE /

Salade tiède de langue de boeuf, cresson et betteraves marinées

1 langue de boeuf dégorgée (trempée une nuit dans de l’eau au frigo)

1 oignon

2 clous et 1 feuille de laurier

1 bouquet de cresson

1 pot de betteraves marinées de votre grand-maman

1 oignon rouge émincé

100 ml d’huile d’olive

Pocher 4 heures dans un chaudron la langue de boeuf avec l’oignon et les aromates en prenant soin de bien saler l’eau. Laisser refroidir dans le bouillon. Peler avec un couteau; la peau s’enlève comme une vieille chaussette. Trancher en de minces escalopes et poser sur une assiette. Passer au four chaud 2 minutes. Prendre l’oignon, le cresson et l’huile. Assaisonner et poser sur la langue sortie du four. Finir avec de petits dés de betteraves marinées et servir.