Facebook? Dépassé! Trop chronophage et pas assez professionnel. C’est la conclusion à laquelle sont arrivés de nombreux chefs québécois. Par contre, ils sévissent sur Twitter… avec plus ou moins d’assiduité, selon leur disponibilité. Les chefs gazouillent en grande partie pour faire la promotion de leur restaurant. On ouvre un compte sous son nom – c’est le cas de Danny St-Pierre, Seth Gabrielse, Patrice Demers, Michelle Marek ou encore Éric Gonzalez – ou sous le nom de son resto – Les 400 coups, Chez Chose, Restaurant Toqué!, Europea, L’Emporte-pièce…
"Facebook et Twitter sont très pratiques, affirme Michelle Marek, chef pâtissière chez Laloux. Je n’ai pas nécessairement les courriels de mes collègues, j’utilise donc les réseaux sociaux pour leur poser des questions. Ils répondent en général très rapidement, surtout lorsqu’il est question d’ingrédients. On se lance des appels, par exemple si on cherche à embaucher quelqu’un." Si elle n’y trouve pas nécessairement des inspirations pour créer un plat, Michelle Marek utilise régulièrement Twitter pour voir quel produit est disponible ou encore pour découvrir ce que font ses collègues. "Au Québec, il n’y a pas de jalousie entre les restaurateurs, note-t-elle. Nous sommes toujours très excités de voir ce que font les autres et nous n’hésitons pas à envoyer des clients chez nos confrères."
Suivez le chef!
Pas jaloux en effet! Marc-André Royal suit Éric Gonzalez, Le Jolifou, Bob le Chef et Les Cavistes. "Je me suis abonné à Twitter il y a un an, confie-t-il. Je ne l’utilise que pour le restaurant, en suivant des collègues à Montréal, mais aussi ailleurs – dont Thomas Keller, du French Laundry en Californie, et Heston Blumenthal, du Fat Duck en Angleterre. Je consulte également les tweets des sections gastronomiques de journaux comme le New York Times ou le London Times. J’échange beaucoup en privé avec certains collègues." Et lorsqu’un abonné gazouille qu’il va au St-Urbain, Marc-André Royal se fait un devoir d’avoir une petite attention pour celui-ci.
Il faut participer à la conversation, sinon cela ne sert à rien d’être dans les réseaux sociaux; Mathieu Bonneau, copropriétaire de L’Emporte-pièce, l’a compris. "Avant même d’ouvrir, nous n’avons pas arrêté de tweeter pour parler de ce que nous étions en train de faire, et nous amenions nos abonnés vers le blogue du restaurant. À l’ouverture, une centaine de personnes qui nous suivaient se sont présentées. Je me sers beaucoup de Twitter pour suivre les foodies, les traiteurs et les clients, c’est une question de respect: il faut suivre ceux qui nous suivent. C’est drôle d’être toujours en contact direct et cela permet d’avoir une relation ininterrompue." Mathieu Bonneau affiche clairement ses opinions dans ses micromessages et sur son blogue, une obligation pour un entrepreneur, croit-il.
Danny St-Pierre, chef-propriétaire d’Auguste, à Sherbrooke, est plus Twitter que Facebook. "Tout le monde ouvre sa page Facebook et tout ce que font les amis, c’est cliquer sur "J’aime" ou "J’aime pas", affirme-t-il. Personnellement, je préfère les personnes aux groupes." Mais il faut que les micromessages soient intéressants! Savoir quel pyjama on a mis à son petit dernier, très peu pour lui. Par contre, il suit assidûment les chroniqueurs restos montréalais. "Je suivais déjà les blogues des journaux américains et européens, je continue d’aller directement à la source. En fait, si je n’étais pas en affaires, je serais plus receveur que donneur."
Où est le chef?
Nos chefs 2.0 se méfient par contre des outils de géolocalisation du genre Foursquare. "Le repérage, j’haïs ça, lance Danny St-Pierre. Ça sert seulement à dire aux cambrioleurs qu’ils peuvent passer chez moi parce que je n’y suis pas! Il faut éviter d’exposer des informations personnelles sur les réseaux sociaux. Personnellement, je demeure méfiant: de tout petits gestes peuvent entraîner de lourdes conséquences. Il faut respecter une certaine déontologie." Même son de cloche chez Michelle Marek, Mathieu Bonneau et Marc-André Royal: Twitter, Facebook, les blogues, d’accord, mais leur incursion dans le monde du Web 2.0 s’arrête là.