À travers la fenêtre, je remarque que la nuit tombe, figée dans le froid et l’haleine blanche des passants de la rue du Campanile. Le jazz ténu d’une compilation du Café Méliès rampe jusqu’à nous et, calés dans nos fauteuils en cuir, mon frère et moi trinquons silencieusement. Sans raison particulière.
C’est que depuis notre arrivée, le décor nous laisse sans voix. D’énormes dômes rouges survolent le haut plafond de béton et nous irradient d’une chaude lumière évanescente. Un grand bar en inox troué d’une cuve dans laquelle gisent des centaines de bouchons de liège naufragés impressionne et donne au resto des allures de loft new-yorkais.
"Un bel endroit pour amener sa douce", que je lance, m’imaginant une soirée chargée de sourires et de clins d’oeil complices. Le jeune frère approuve en levant sa pinte de blonde.
Ma Blanche de Chambly aux lèvres, je parcours le menu. Les choix sont variés sans être trop nombreux. On y trouve des raviolis d’agneau fumé, des ris de veau, de l’osso buco milanais, des pilons de porc confits laqués aux agrumes…
Philippe opte (une obsession propre aux Plante) pour les calmars frits au parmesan et au vinaigre balsamique. Citronnés à point et accompagnés d’une sublime sauce piquante et d’une mayonnaise à la lime et au basilic, légère et soyeuse en bouche. On s’étonne. On trinque à nouveau. Les petits amis graisseux, servis dans un joli cône métallique, disparaissent avant que nous ayons eu le temps de nous lécher les doigts. De mon côté, ma terrine de foie gras fond sur ma langue avant de rencontrer la résistance sucrée de la figue séchée, présage d’une soirée riche en vertiges culinaires.
Mais nous devrons revenir sur terre. Carnivore réputé, mon frère a choisi le bifteck de faux-filet que l’on a nappé d’un beurre composé au poivre vert. Dommage que le bovin ne livre pas la marchandise: la texture est pleine de mollesse et le goût, assez fade. Le cahors Pigmentum qu’il avait sélectionné lui est donc apparu trop mordant, dans les circonstances.
À la suggestion de mon serveur, je me lance dans une orgie de grillades de la mer (que j’accompagne d’un Borsao espagnol qui se révélera juste assez sec) composée de pétoncles, de crevettes, de calmars et de saumon. On les a malheureusement trop cuits, et leur risotto d’ami n’est pas crémeux et manque de personnalité.
Nos gâteaux (au fromage pour le fraternel, croustillant au chocolat pour moi) sont agréablement moelleux et plaisent à notre palais, et nous rappellent qu’il ne faut pas se laisser berner par la première impression: malgré tout, l’Urba mérite que l’on apprenne à mieux le connaître.
COMBIEN? /
Pour trois services, pour deux personnes, environ 65 $ le soir et 25 $ le midi (excluant boissons, taxes et service).
OÙ? /
Urba resto lounge
3745, rue du Campanile
418 653-7643
urbacafe.com